Désert Rebel
Opération Tempête du désert… en musique
Des touaregs et des guitares électriques
Rébellion dans le désert. Le projet musical Désert Rebel, crée en 2005, veut allier musique touarègue et européenne (avec entre autre Daniel Jamet, ex-guitariste du groupe Mano Negra, Guizmo du groupe Tryo…) pour faire souffler un vent de conscience politique dans les oreilles occidentales. Sur la partition : un air de révolte et une mélodie idéale composée à partir de chants touareg et de guitares électriques. Cette communion entre artistes du Nord et du Sud se réalise-t-elle vraiment sans fausses notes ?
Loin des contours ondulés des dunes, sur le toit anguleux de Radio Nova à Paris, Farid Merabet, l’un des initiateurs du projet Désert Rebel, résume les valeurs qui l’ont motivé : "Notre histoire a commencé grâce à Abdallah Oumbadougoun, une figure de la rébellion touareg dans les années 1990. Nous voulions allier géopolitique et musique et raconter une histoire que l’on ne trouve pas dans les grands médias, au-delà de l’amnésie nationale". Désert Rebel, premier numéro de la collection Culture et Résistance, s’inscrit aussi dans l’esprit de la musique équitable pour une juste répartition des ressources. Mais cette étiquette n’était qu’un point de départ et les membres souhaitent aujourd’hui la dépasser.
Des grains de sable aux paillettes
Les médias se sont incroyablement échauffés au contact du Désert Rebel. Le projet récolte soutiens et articles élogieux insistant sur l’incroyable composition du collectif. Musiciens, journalistes, cameramans, ingénieurs du son, aviateur, jusqu’au fondateur de Radio Nova, Jean-François Bizot, ont travaillé main dans la main pour réaliser un album et un dvd. "Nous avons engagé de gros frais et nous sommes satisfaits des ventes (15 000 albums et 6 000 dvds) mais le buzz doit continuer par internet". L’ambition de Farid Mérabet est ambiguë. Il vise une diffusion rapide du projet, notamment à l’étranger, en gardant une structure de taille humaine. "Le monde de la culture est le dernier rempart pour délivrer ces messages. Mais une telle logistique demande beaucoup d’effort et c’est une énergie que je ne donnerai qu’une fois".
Nous voulions raconter une histoire que l’on ne trouve pas dans les grands médias, au-delà de l’amnésie nationale.
Les projecteurs médiatiques sont pour l’instant braqués en direction de François Bergeron, journaliste et réalisateur du film, qui vient de sortir de 45 jours de prison. Sur la question de l’indépendance du projet et du métissage culturel parfois artificiel, il se montre parfaitement conscient des limites imposées par le système de production : "Actuellement en France, pour produire un film, l’idéal est d’obtenir l’aide du CNC. Sans cet apport, on est obligé de rentrer dans le lobbying des boîtes de production. Nous avons choisi de ne pas passer par ces circuits et nous sommes donc obligés de jouer sur la résonance médiatique d’artistes connus".
Les luttes et les piège du désert
L’attirance des médias pour ce désert nigérien n’a pas été toujours aussi foudroyante. Elle aurait même pu être qualifiée de froide dans un territoire pourtant brûlant d’actualité. Le Niger riche en uranium attise l’envie de la société Areva (sous le nom de Cogema) ainsi que d’autres concurrents. Chacun entreprend une lutte pour s’en approprier une partie sans se soucier de l’exposition des populations à cette contamination, qui s’effectuait notamment par l’intermédiaire de l’eau. Dans ce climat de fébrilité, la tension entre le gouvernement nigérien et le MNJ (mouvement des nigériens pour la justice), qui lutte contre ces dérives, n’a cessé d’augmenter. Selon François Bergeron, "l’Etat accuse le MNJ d’être un groupe de drogués qui ne représente pas la population. Un blackout total est entretenu sur les événements se déroulant au nord Niger".
Le Niger est symptomatique du monde. On y côtoie le plus pauvre et le plus riche, la convoitise et la course à l’énergie
Le réalisateur est alors emprisonné pour « atteinte à la sûreté de l’Etat et complicité avec le MNJ ». Il transite par plusieurs prisons et connaît notamment les conditions de vie déplorables des prisonniers de droit commun. Après 6 semaine, il parvient à être expulsé. Il revient en France avec dans ses bagages une pincée d’amertume, une pointe de révolte et une question : "Qu’est qu’on fait du vivant, des gens qui résident sur ces exploitations radioactives ? Au Nord, nous avons des technologies pour garantir une haute sécurité et au Sud, rien ! Le Niger est symptomatique du monde. On y côtoie le plus pauvre et le plus riche, la convoitise et la course à l’énergie". Pour coller à l’actualité le collectif prévoit un deuxième volet de Désert Rebel. "Depuis le premier tournage, la situation évolue et de nombreux témoins présents dans le film ont maintenant intégré le MNJ". Se faire l’écho de la rébellion nigérienne demeure risqué. N’utilisant que la simple motivation comme puit d’énergie, le collectif espère, bon gré, mal gré, parvenir à son but : offrir des images et du son contre le silence du désert meurtri.
Pour écouter et voir des extraits de Désert Rebel
Chloé Vigneau
Photographies : Aurélia Blanc
Bloc-Notes
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