
FESTIVAL ASSIS, DEBOUT, COUCHÉ 2/3
Moodoïd : pop psychédélique et « caméléon  »
Interview du chanteur de Moodoïd, Pablo Padovani
Le 21, 22 et 23 mars avait lieu la deuxième édition du festival Assis ! Debout ! Couché ! au Lieu Unique. Retour sur la seconde soirée avec une interview du chanteur de Moodoïd, Pablo Padovani.
Moodoïd est un jeune groupe mais déjà très remarqué sur les scènes françaises. Menées par Pablo Padovani - guitariste de Melody’s Echo Chamber - et accompagnées de trois musiciennes, leurs chansons aériennes ont su réveiller les pieds du public du Lieu Unique. Leur premier EP, mixé en Australie par Kevin Parker - leader de Tame Impala - est sorti sur Les Disques Entreprise. Après un set énergique, Pablo prend le temps de nous accorder une interview.
Fragil : Comment définirais-tu le son de Moodoïd ?
Moodoïd : Ce qui fait la particularité de Moodoïd - en tout cas moi c’est quelque chose que j’aime beaucoup - c’est de pouvoir être un peu « caméléon ». Cela permet d’être très doux si on est dans un cadre qui s’y prête, par exemple. En fait, c’est une musique très libre, on n’a pas du tout d’éléments électroniques, on joue tout, contrairement à ce que font un peu tous les groupes en ce moment. Si un soir j’ai envie de changer mon son de guitare et de faire quelque chose de très violent, je vais le faire et personne ne peut me dire de jouer autre chose !
c'est une musique très libre, on n'a pas du tout d'éléments électroniques
Fragil : Comme sur un set comme celui de ce soir finalement, où l’on voit que ça évolue. Vous pouvez passer d’un moment assez calme à quelque chose de plus violent, de plus rock...
Moodoïd : Oui. À la base quand j’ai fait ces chansons, c’était vraiment en solitaire. J’avais une envie justement de quelque chose d’hyper doux et de naturel parce que j’étais justement dans la nature, et j’avais envie d’un truc qui soit hyper, euh... tente de mimer une attitude décontractée Du coup je me suis retrouvé à faire ces morceaux et je ne voulais vraiment pas de distorsions, de trucs comme ça, je voulais seulement des éléments hyper-cristallins... Et puis, en travaillant, à force de faire des concerts, en voyant les réactions du public face à certaines choses, on a pu se permettre d’évoluer vers ça.
Fragil : Comment vous êtes-vous rencontrés avec tes musiciennes ?
Moodoïd : Pour chacune d’entre elles ça a été un peu différent. La batteuse par exemple, c’était par le bouche-à-oreille. Elle était percussionniste en musique contemporaine et elle n’était pas batteuse à la base, mais on m’avait parlé d’elle, et puis je l’ai rencontrée et je suis tombé sous le charme. Elle est devenue une batteuse incroyable entre-temps. Pareil, la bassiste, qui était à la base une contrebassiste, je l’ai mise à la basse depuis six mois maintenant, elle me convient aussi parfaitement ! Et la claviériste était guitariste à la base, puis je l’ai mise au clavier. Je l’ai rencontré car elle avait fait la première partie de Moodoïd il y a très longtemps.
Fragil : Ça donne quelque chose de très hybride, finalement.
Moodoïd : Ouais, il y a un peu ce truc où on progresse tous en commun finalement. On joue tous ensemble depuis le mois de juillet, notre premier concert était en septembre et tout ce qui nous arrive, on ne s’y attendait pas. Tout ça se passe hyper vite. Du coup on travaille nos instruments, on progresse en même temps, on apprend nos chansons. Là on prépare le disque, du coup il faut apprendre tous les nouveaux morceaux... On est toujours comme ça, dans une sorte de course, et c’est assez excitant parce qu’on essaye de se surpasser, de faire du mieux possible.
c'est assez excitant parce qu'on essaye de se surpasser, de faire du mieux possible
Fragil : Tu as déclaré que vous étiez comme dans une optique de championnat à la fin de l’année dernière, avec les Transmusicales de Rennes comme ligne d’arrivée.
Moodoïd : Oui pour nous les Trans c’était quand même un truc très impressionnant... Il faut reposer les choses dans leur contexte, on faisait juste un EP, donc quatre chansons, et on sort un clip sur Internet. Puis, tout à coup, il y a comme un truc qui se passe... On a joué un premier soir à Paris, la salle était pleine à craquer, on s’y attendait pas du tout. On nous propose de faire les Transmusicales trois mois après. « Dans trois mois vous devez faire un concert devant tous les professionnels, de tous les festivals. » C’était un challenge énorme parce que ça allait décider de toutes nos dates pour l’année prochaine, du coup c’était hyper intimidant et pour nous c’était un vrai défi. Trois mois qu’on préparait ça un peu en se disant « l’examen final ça va être cette date-là ! ».
Fragil : Un examen réussi avec brio ?
Moodoïd : Je sais pas... On a été déçus parce qu’on a eu plein de problèmes techniques lors de cette date et du coup ça nous a un peu frustrés.
Fragil : Mais l’accueil a été bon, non ?
Moodoïd : Oui c’était plutôt cool ! En plus, la veille, on a fait un concert devant 200 enfants et c’était génial, vraiment. Et puis, c’est vrai que les choses ne se sont jamais arrêt donc on a continué à travailler, à faire des concerts, donc oui c’était chouette !
pour moi la scène ça doit être un moment de spectacle, vraiment
Fragil : Il y a un côté très visuel avec Moodoïd, un réel travail sur l’ambiance. Qu’est ce que tu vois quand tu écris, quand tu chantes, quand tu joues ?
Moodoïd : En fait pour moi la scène ça doit être un moment de spectacle, vraiment. Je regrette d’ailleurs que ça ne le soit pas assez en règle générale. Moi le premier, je vais arriver dans une salle de concert, et si je vois un groupe, habillé comme dans la vie de tous les jours, je vais avoir ce réflexe un peu bête de me dire « Tiens ce groupe-là il s’habille comme ça donc il va faire ce genre de musique ». En fait je trouve que le costume, le maquillage, c’est en quelque sorte un élément de magie, qui crée des identités, des personnages. Quand un public arrive dans une salle et voit tout à coup des personnages, il devient curieux. Pour nous c’est un moyen de les attraper et de les amener avec nous dans un univers. Et c’est vrai que la musique qu’on propose elle prête à ça, à amener les gens quelque part, ailleurs, pendant... un petit moment !
Fragil : Vous les travaillez tous ensemble ces personnages ?
Moodoïd : Chacun est libre de faire ses costumes, etc. En fait, pour moi, ces personnages, ça devient assez rapidement des stéréotypes de nos personnalités, c’est-à-dire qu’on a tous des traits de caractère hyper-différents. J’ai rarement vu ça. Toutes les filles, entre elles, elles n’ont aucun rapport ! Elles sont toutes incroyables... La batteuse c’est quelqu’un avec le cœur sur la main, dans un style assez hispanique, vraiment dans l’émotion. Clémence est plus quelqu’un d’introverti mais qui a quelque chose de très sensuel. Lucie est plus timide, avec qui il faut aller chercher le regard. Et du coup, ce que je ressens c’est que quand on est sur scène, il y a ce truc là, ces traits de caractère qui ressortent plus, avec leurs costumes, le jeu, etc. Pour moi, vu que je suis un peu le petit chef d’orchestre, c’est le truc que je vais aller chercher chez chacune d’entre elles, en les regardant.
Fragil : Et vous jouez toujours sur ce côté paillettes, strass, etc.
Moodoïd : Voilà ! Ça je sais pas si on le fera toute notre vie, mais peut-être jusqu’au prochain disque au moins, oui !
Fragil : Qui est prévu pour quand ?
Moodoïd : Tout le mois de décembre on l’a passé en studio à Paris, et puis je suis allé mixer le disque pendant un mois aux États-Unis avec le producteur.
Fragil : Toujours Kevin Parker, de Tame Impala ?
Moodoïd : Non, là c’est un nouveau producteur que j’ai choisi. C’est un français, qui a un studio à New York depuis 20 ans : Nicolas Vern. C’est lui qui a fait la plupart des disques de Dirty Projectors, Deerhunter, Animal Collective... Beaucoup de disques que j’adore en fait. C’est un honneur de travailler avec lui.
Fragil : Un honneur et un rêve, sans doute ?
Moodoïd : Exact. Ça a été génial comme expérience !
Fragil : Qu’est ce que ça veut dire pour toi, « Je suis la montagne » ?
Moodoïd : En fait cette chanson, quand je l’ai écrite j’étais dans les Alpes, c’est un endroit où j’étais... bien ! (rires) J’ai juste pris une guitare et puis j’ai chanté comme si c’était la montagne qui le faisait elle-même. Une fois de plus, c’est une interprétation !
J'ai juste pris une guitare et puis j'ai chanté comme si c'était la montagne qui le faisait elle-même
Fragil : Tu avais une idée visuelle du clip ?
Moodoïd : Oui, le clip, de base, je voulais vraiment que ce soit une montagne qui chante. Du coup avec mon ami Jérôme Walter on a eu l’idée de mettre ma tête directement dans la terre, au centre de la montagne. En fait c’est lui qui a eu l’idée, très ingénieuse. Moi je cherchais un truc beaucoup plus compliqué !
Fragil : C’est une idée qui a très bien marché en tout cas. C’est ce clip qui vous a fait connaître.
Moodoïd : Oui c’est vrai, au vu de tout ce qui s’est passé, vu qu’on a travaillé avec Kevin Parker de Tame Impala pour l’EP, ça a été une longue, très longue période puisqu’il était en tournée donc ça a pris beaucoup de temps et nous ça nous a donné une année pour faire ce clip : on l’avait tourné depuis très longtemps en fait, et on a eu un an pour le fignoler, arranger les choses, moi j’ai fait le montage...
Fragil : C’est ton truc à toi le montage, la réalisation, etc. N’est-ce pas ?
Moodoïd : Oui c’est ça, c’est mon vrai métier en fait ! Je réalise des clips pour d’autres groupes, je fais des court-métrages, etc. En ce moment je fais beaucoup plus de musique parce que tout à coup il se passe plein de choses pour moi là-dedans. Mais je compte vraiment continuer à faire de la réalisation pour mes clips, et pour les autres aussi.
Fragil : On te souhaite quand même de continuer à faire un peu de musique en tout cas !
Moodoïd : Oui, oui, en priorité ! (rires)
Interview réalisée par Maxime Hardy et Joanna Pyk
Crédits photos et vidéo : Joanna Pyk
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