
Agit-prop
Ces manifs à contre-courant
De droite ou anti-écolos, ces manifestations se multiplient
Il ya quelques semaines, 300 personnes regroupées à l’occasion d’une manifestation de "la France qui se lève tôt" sortaient de leur torpeur les habitants du centre-ville de Nantes. Mercredi 19 décembre, c’est une "manifestation de droite" au départ de la place Graslin qui a attiré l’attention des badauds. Vous avez dit atypique ?
Les Manifs de Droite sont nées à l’initiative du collectif artistique "Restons vivants", en 2003, lors des mouvements d’intermittents du spectacle. La première de ces manifestations s’est déroulée à Paris le 15 octobre 2003, suite à l’appel du collectif. D’autres suivront, un premier film verra le jour en 2003, réalisé par Arnaud Contreras, puis un second en 2007, Manif de droite 2007 (A So Conservative Riot), du même auteur. Aujourd’hui le phénomène prend de l’ampleur, le concept étant libre, il est repris un peu partout en France. Un blog nous permet même de retracer la jeune histoire de ce mouvement atypique.
N’est pas "manif de droite" qui veut
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, une manif de droite ça s’organise. Et pas qu’un peu. Une charte de bonne conduite a même été élaborée afin de guider les néophytes en la matière souhaitant organiser un tel événement. Les tenues devront être soignées et les drapeaux français présents nous rappellent entre autres ladite charte.
Le but est évidemment de caricaturer au maximum afin de susciter la curiosité des passants. Certains le sont, d’autres plutôt moyennement amusés de la plaisanterie n’hésitent pas à lancer des seaux d’eau depuis leurs balcons. Le cortège nantais, quant à lui, composé majoritairement d’étudiants, semble avoir suivi à la lettre les recommandations : costumes, cravates et talons sont de rigueur. Les slogans, eux, n’ont pas de mal à arracher un sourire aux passants : "Cheminots, au boulot", "Pas d’alloc pour les dreadlocks", "CAC 40 CAC 40 ouais ouais !".
Cheminots au boulot, Pas d'alloc pour les dreadlocks, CAC 40 CAC 40 ouais ouais!
Un parcours tout aussi inhabituel
Après avoir occupé la place Graslin un petit moment, le cortège s’est engouffré dans les rues du quartier huppé de Nantes sous la surveillance discrète des renseignements généraux. Bien sur, le défilé a pris soin de ne pas gêner la circulation, les manifestants empruntant les passages cloutés ainsi que les trottoirs, s’excusant même parfois du dérangement occasionné ! Ces derniers ne pouvaient néanmoins s’empêcher d’afficher leur contentement à la vue d’une belle auto : "Ça c’est de la caisse !". Après un passage obligé devant le château des Ducs de Bretagne devant lequel les manifestants se sont extasiés ("Ça c’est de la baraque"), le joyeux cortège a terminé son périple devant la cathédrale St Pierre de Nantes, réclamant le retour de la messe en latin, avant d’entamer une prière collective.
Une majorité d’étudiants
Le cortège était effectivement composé en grande majorité d’étudiants. Ceux-là même qui avaient fait vivre le mouvement opposé à la loi Pécresse (voir article). Cependant, nulle contestation lors de cette manifestation, juste l’envie d’interpeller, de montrer que l’on existe toujours, mais aussi une manière de décompresser après deux mois de mobilisation soldés par un échec. C’était aussi une majorité d’étudiants qui s’était réunie à l’aube il y a quelques semaines afin de montrer qu’eux aussi faisaient partie de la France qui se lève tôt, sans pour autant soutenir Sarko et son gouvernement.
L’humour comme échappatoire ?
Alors qu’est-ce qui pousse ces étudiants à organiser de telles manifestations ? La répression du mouvement étudiant tant sur le plan national que local a été plus que ferme. Serait-ce, face à un président et son gouvernement, un nouveau moyen, par la dérision et la caricature, de faire entendre sa voix ? La nouvelle année va débuter, et le train de réformes va continuer avec notamment pour l’université la mise en place du plan Licence, seulement quelques mois après la mobilisation contre la LRU. L’échec de celle-ci va sans doute pousser les étudiants à trouver de nouveaux moyens d’action, et pourquoi pas ce genre de manifestation moins conventionnelle.
L’humour est aussi une façon de résister disait Bedos...et "sa disparition est le signe le plus évident d’un cancer social." (Edward Franklin Albee)
Article et photos : Régis Hémon
Voir le portfolio de Régis Hémon consacré à la Manif de droite nantaise
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