Embarquement immédiat avec K2 Airlines
Interview de deux musiciens de K2R : Christophe et Patrick.
Actuellement en tournée sur toute la France, K2R Riddim nous a fait le plaisir de faire escale à Nantes lors de la manifestation Tissé Métisse. Comme à son habitude, ce groupe (10 musiciens) originaire de Cergy-Pontoise nous entraîne dans un voyage guidé par des mélodies jamaïquaines. De nouveaux musiciens et chanteurs viennent enrichir l’équipage. Le résultat : K2 Airlines, nouvel album que certains trouveront peut être plus posé mais qui est indéniablement débordant de good vibes. Fidèle à lui-même, K2R investit la scène avec vitalité tout en sachant allier réflexion, engagement et humour. Envolez vous dans les airs harmonieux de K2 Airlines où aucun crash n’est possible !
Nouvel album sorti début septembre, nouvel équipage, nouveau vol ?
Christophe (Sax, flûte, clavier) : C’est une occasion de resolidifier l’équipe et de faire de nouvelles chansons depuis le départ des deux chanteurs avec qui on a tourné pendant 8 ans. Sur ce nouvel album, on a continué l’expérience avec Lord Bitume que l’on retrouve déjà sur l’album Foule Contact et sur le dvd Les routes de l’indépendance. Humainement c’est une personne géniale. Il est d‘une efficacité redoutable. Nouvelle équipe puisque l’on a également un nouveau clavier et un tromboniste.
Qu’est ce qui selon vous a changé musicalement ? Et quels sont les invariants ?
Christophe : Ce qui reste au niveau musical c’est l’influence jamaïcaine et la mixité des styles . On est toujours aux frontières du rythm’n’blues, de la soul, la funk ou du jazz tout en s’inspirant de la tradition jamaïcaine. On remodèle à notre manière et cette fois ci avec un peu plus de textes en français, un peu plus d’histoires et des chansons qui s’articulent autour de messages à caractère sociaux.
un peu plus d'histoires et des chansons qui s'articulent autour de messages à caractère sociaux.
Comment concilier vous musicalement vos différents points de vue ?
Christophe : La musique jamaïcaine est ce qui nous réunie tous. Il y a plus ou moins certains d’entre nous qui donnent des directions mais les décisions sont prises de façon collégiale. Tout dépend aussi des projets car sur un album chaque titre est un projet porté par différentes personnes. Ensuite chacun intervient. En réunion on essaie de discuter des angles que l’on veut aborder. Sur cet album on voulait des chansons à caractère plus social.
Les chansons de K2 Airlines témoigne de nouveau de votre engagement. Par exemple, Homoriginal aborde la question de l’homosexualité, ceci est plutôt rare ?
Patrick (Trombone) : C’est une chanson qui parle avant tout de l’homophobie c’est à dire de l’homosexualité vue par certaines personnes qui sont suffisamment intégristes pour s’en prendre à eux. Dans le milieu reggae il y a beaucoup de personnes qui sont comme ça. Il n’y a pas que des Bobos (secte de rasta) mais il y en a quand même. On a juste voulu relancer le débat et dénoncer ce coté de la musique jamaïcaine qui s’exporte très bien en France et un peu partout. L’affaire Capleton avait mis le feu aux poudres. On aimerait bien chasser ses mauvais échos de la musique jamaïquaine qui est avant tout censée apporter du soleil et des réponses positives.
Christophe : L’homophobie c’est aussi quelque chose que l’on a vécu dans le groupe. Nos deux anciens chanteurs étaient très inspirés par ce qui se fait en Jamaïque et petit à petit il y a eu des dérives qui n’étaient plus supportables pour nous. D’ailleurs ce morceau a été réalisé dès le troisième album mais ça a tellement fait polémique dans le groupe que l’on n’avait pas pu le faire. Ce sujet était vraiment important pour nous, ça nous tenait vraiment à cœur de le placer sur cet album. On s’interroge sur la façon dont la musique jamaïcaine est vécue par les jeunes en France. Beaucoup kiffe le ragga sans vraiment comprendre les textes. On a vite fait de soutenir une cause dont on a rien compris.
Beaucoup kiffe le ragga sans vraiment comprendre les textes. On a vite fait de soutenir une cause dont on a rien compris
Patrick : À copier le modèle jamaïcain, tu finis par prendre partie car on te pousse à être dans un camp. On peut donc vite se laisser embrigader. C’est pour cela que certaines personnes qui, à la base n’ont pas forcément de point de vue, peuvent devenir intégristes.
Christophe : K2R existe depuis maintenant 15 ans. Quand je suis arrivé dans le groupe il y avait certaines valeurs qui c’étaient dessinées et auxquelles j’adhérai. Quand tout ça a commencé a disparaître on a recentré la chose sur un nouvel équipage où tout le monde a le même état d’esprit. Il fallait que l’on continue à faire de la musique avec cette unité originelle. Sans cela, rien est possible. La diversité des idées, des cultures est une bonne chose mais il faut que l’on se rallie autour de valeurs fondamentales. Et ce sont toutes ces choses que nous avons retrouvé aujourd’hui.
Patrick : On est censé pouvoir tout dire sans gêne, sans zone d’ombre. Là on repart justement sur des bases positives. On veut vraiment parler de tout. On veut parler des petits oiseaux mais aussi de sujets plus sérieux comme l’homophobie.
Avec la chanson Bizness vous vous positionnez également vis à vis du commerce équitable et de la musique. Quel en est l’enjeu ?
Christophe : C’est bien que tu poses cette question car on a justement voulu répondre aux problèmes liés au piratage et à la crise économique du disque. On s’est demandé pourquoi les gens n’achètent plus de disque aujourd’hui. Premièrement, tout se trouve gratuitement sur Internet. Deuxièmement quand un pote a un CD on peut lui emprunter et le graver. On a donc décidé de faire un disque moins cher en éliminant les intermédiaires c’est à dire faire le lien directement entre les artistes, le producteur et le consommateur. On a créé le site de Cd1d qui est une association de label de différents groupes comme les Ogres de Barback. Cette plate forme propose de la vente de disque où le public peut donc acheter directement aux artistes.
Vous faites partis du collectif Tous aux urnes. Avez vous un message à faire passer à ce niveau là ?
Christophe : J’ai ma carte d’électeur depuis longtemps mais je ne me sens pas du tout représenté. Avec ce projet on essaie justement de se rassembler et de se mobiliser pour échanger des idées. Donc ce n’est pas seulement aller soutenir un parti plutôt qu’un autre. C’est avant tout se retrouver et commencer à réfléchir à ce qu’est réellement une élection.
J'ai ma carte d'électeur depuis longtemps mais je ne me sens pas du tout représenté
Patrick : Je ne suis pas sure que ça change beaucoup de choses pour les élections à venir mais c’est déclencheur d’une réflexion où l‘on se pose des questions telles que : a t-on encore les bonnes habitudes ? Est ce que les vieilles lois vis à vis du vote sont encore de rigueur ? On parlait de l’économie du disque où l’on s’interroge sur la nouvelle façon de promouvoir un disque. Je pense que pour le vote c’est la même chose, il faut que l’on s’adapte aux changements. Je m’étais toujours dis que je ne prendrai ma carte d’électeur qu’à partir du moment où je sentirai un candidat. Là ce n’est pas le cas mais j’aimerai bien, comme beaucoup de personnes, que le vote blanc soit pris en considération. C’est vraiment dommage que ce ne soit pas encore le cas mais c’est envisageable. Ce que propose Tous aux urnes, c’est de réunir les gens. C’est un milieu très ouvert où les associations et les personnes se rencontrent. L’objectif n’est pas de diriger vers un candidat précis. Il faut avant tout discuter et repenser les choses.
Christophe : Le but est aussi réunir des gens qui ont un peu les mêmes sensations, qui ne se sentent pas représentés. Tous les gens qui votent blanc ont aussi des idées. Il faut que chacun intervienne à son niveau.
Vous êtes un groupe qui se définit beaucoup par ses engagements ?
Patrick : On n’a pas de réponse à tout mais on propose une réflexion. On voulait aussi créer des présidentielles à nous en créant une fanfare et en ayant notre propre candidat. On voulait faire ça avant les concerts un peu comme un show à l’américaine avec des pom-pom girl et tout ce qui va avec. À l’heure actuelle, on a l’impression d’aller voter pour des vedettes.
Christophe : Ça aurait été une manière de dire attention il va se passer quelque chose, soyez à l’affût. Sous le couvert de la rigolade on veut faire prendre conscience de l’enjeu de ces présidentielles. On en parle souvent entre nous.
Patrick : On profite de notre place pour émettre nos opinions mais il ne faut pas non plus se dire que nous sommes systématiquement engagés. On fait pas mal de concert de soutien mais on ne fait pas que ça.
Christophe : On a beaucoup été sollicité pour des causes humanitaires mais au bout d’un moment on ne peut pas trop en faire non plus. Il faut aussi que l’on se rémunère car notre but s’est aussi de continuer à faire de la musique. On continue d’exister parce qu’il y a y aussi une économie derrière.
Propos recueillis par Solenne Legeay
le site de K2R Riddim
CD1D, fédération de labels indépendants
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