4.48 Psychose, la violence de Sarah Kane sur les planches du TU
A l’écoute du rythme d’un texte
Oubliez l’optimisme des ailes du chat-papillon et l’atmosphère bon enfant de la Poche Parmentier : Sarah Kane, c’est noir, c’est violent, c’est choquant. Pas facile, donc, pour un metteur en scène, de montrer de tels textes au public. Françoise Cousin, comédienne et metteure en scène, a voulu relever le défi avec 4.48 Psychose, présenté dans le cadre du festival universitaire.
Le personnage principal de 4.48 Psychose est une femme dépressive au bord du suicide. Les monologues y alternent avec des dialogues entre la femme et son psychiatre. Et, comme presque toujours chez Sarah Kane, on retrouve une violence verbale et visuelle qui ne peut laisser le spectateur indifférent. Mais, ici, on est loin des délires sexuels gratuits de Copi (au TU en décembre dernier) : il y a, chez Sarah Kane, un dialogue étroit et intense entre la vie et l’œuvre, une force du verbe et un sens de l’image qui font défaut à Copi.
Aux origines du projet
C’est une relation très particulière qu’entretient Françoise Cousin avec ce texte. Elle l’a découvert en 2000 dans une mise en scène de Benedetti ; ensuite, elle l’a lu de façon récurrente pendant cinq ans - l’état du livre est là pour en témoigner ! Et, chaque fois, cette lecture s’est faite d’une seule traite, comme en un seul souffle. De là est née l’envie de travailler sur ce texte. Après en avoir parlé à un ami metteur en scène qui voulait interpréter ce texte de façon bouffonne, Françoise Cousin a décidé d’entreprendre elle-même la mise en scène. « Mais je ne pouvais pas le mettre en scène et le jouer, confie-t-elle, il ne m’était pas possible de tout assumer. J’étais tellement peu détachée de ce texte que je n’étais pas à même de le rendre au mieux », confie-t-elle. Elle propose donc le rôle à une amie comédienne, Manon Jomain. La grande question que se pose la jeune metteure en scène est alors la suivante : « Comment faire pour que les gens entendent ce texte ? »
"Il y a la sensation d'un souffle continu, de quelque chose de circulaire"
Faire ressentir le rythme du texte
Ce qui a paru très vite évident à Françoise Cousin, c’est que 4.48 Psychose avait un rythme très particulier. « Il y a la sensation d’un souffle continu, explique-t-elle, de quelque chose de circulaire ». Naît alors l’idée de retranscrire rythmiquement la langue, ce qui se manifeste surtout dans la course à laquelle la comédienne se livre sur scène : son essoufflement traduit physiquement le rythme du texte. Parallèlement à ce travail sur le rythme, il y a la présence très marquée de la musique. D’inspiration électro-punk, elle n’a pas spécialement été écrite pour la pièce. Selon F. Cousin, « c’est une musique très organique, animale ; les paroles sont énergiques, noires », ce qui, pour elle, rapproche cette musique du texte de Kane. « Clément [le musicien, ndlr] est le cœur de la comédienne », poursuit la metteure en scène, comme pour souligner les rapports profonds et étroits qui unissent la musique, le texte et la comédienne.
« Je veux que les gens se sentent concernés »
Ceux qui ont assisté à la représentation l’auront peut-être remarqué : les spectateurs étaient filmés, et les images étaient projetées sur un écran dans le fond de la scène. Non, ce n’était pas pour un enregistrement télé ! C’était bien une idée de F. Cousin : « j’ai voulu intégrer le spectateur, explique-t-elle, je veux que les gens se sentent concernés (...)On est dans une société où on ne parle pas de la dépression, où on est obligés d’aller bien ». De là, donc, le « refus de la simple fiction », la volonté de remettre en cause la position relativement passive du spectateur. De fait, après avoir entendu la violence du texte de Sarah Kane dans cette mise en scène très cohérente et aboutie, nul doute que le spectateur ne peut ressortir indifférent.
Gaël Montandon
4.48 Psychose mis en scène par Françoise Cousin est programmé du 11 au 14 janvier 2007 au Théâtre du Champ de bataille à Angers.
Bloc-Notes
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