Le rock est mort, vive le rock !

A leurs débuts, Fred Jimenez ,Michael Garçon,Peter von Poehl,Stéphane Salvi et Hervé Bouétard se cachaient derrière Michel Houellebecq faisant office de groupe de groupe d’accompagnement. Bertand Burgalat (maître du label Tricatel)les prend sous sa protection et se réjouit de ces présentations ( cd "Bertrand Burgalat meets A.S Dragon"). Mais la classe terminée, ces musiciens rêvent d’un album. "Spanked" (sans Peter von Poehl et Fred Jimenez) sera l’occasion de voler de leurs propres ailes, avec aux rênes de cette nouvelle formation Natasha Lejeune, danseuse russe, qui décide de faire valser sa voix sur le fil des guitares.

De ses premiers pas, les cinq membres gardent le souvenir de la précieuse aide de leur mentor : "Il force l’admiration et le respect avec toutes ses "casquettes" : compositeur, arrangeur, directeur du label Tricatel. Il a formé notre personalité mais sans nous influencer au niveau des compos, en laissant toujours la porte ouverte. Il nous a aussi appris à travailler dans l’urgence, à prendre les premières prises". Critiques et public applaudissent la "fessée" donnée par cette pop rock dont l’identité est clairement affirmée : les guitares ne sont pas ménagées, les claviers sont dépoussiérés. As Dragon résout également le préoccupant dilemme des paroles : français ou anglais ? engagement ou divertissement ? "La musique vient en premier donc le chant s’adapte. La langue choisie dépend de la mélodie."

Quand aux amateurs de politique qui voudraient hurler "Au Secours, un DRAGON à la fête de l’Huma"et aller "chercher la police", ils n’ont d’autre choix que de ranger leur pudeur devant l’ironique réponse de Michel Garçon : "l’engagement...on préfère être engagé pour des contrats. Mais nous ne sommes pas là pour faire de la politique. La chanson engagée est en générale très maladroite." Plutôt démon rock que chimère politique, les quatres garçon et Natasha ont trouvé des parrains de choix. Les signatures prestigieuses s’accumulent dans le livre d’or, le groupe prête la plume à Patrick Eudeline qui ne cache pas dans la bio ses impressions enthousiastes de journaliste et de musicien, Virgine Despentes montre également le bout de ses doigts sur trois textes : "cher tueur", "seules à paris" et " cloue moi au ciel". "Ces personnes sont venues à nous pour nous apporter leur soutien, affirme notre interlocuteur, ces démonstrations nous touchent".

Leur identité n’est donc plus à prouver : oser dans l’ambiguïté, "ne jamais se poser de limite et suivre l’envie du moment", brouiller les pistes par leurs clips. "Mais pas chez moi" ou "Comme je suis" construisent le visuel provocateur du groupe. Pendaison de guitares aux branches des arbres dans le premier, images de "musées du rock" (notamment à Philadelphie) ou encore anti-référence aux Smiths ( que le groupe n’aime pas) suffisent à alimenter leur réputation. "Le rock est mort si l’on veut...mais il faut y voir plus particulièrement un clin d’oeil à ceux qui se disent être rock’n roll, cloîtrés dans leur villa, par exemple". A la lettre R du dictionnaire d’AS Dragon, la définition musicale est limpide : "On a su prendre des risques, se lancer dans la musique plutôt que dans une vie rangée avec un métier,etc..."

Tout feu, Tout flamme

Exercice pratique. S comme Scène, les Dragons connaissent leurs gammes mais décident en général d’ajouter du piment pour embraser la foule. La frontwoman est spécialiste pour maintenir le chaudron de la fosse bouillonant. Qui ne connaît pas sa réputation née au fur et à mesure des lives et, entre autre, au Bol d’or en 2003 ? As Dragon assurait la première partie d’Iggy Pop and the Stooges. La chanteuse commença à se dénuder, stimulée par l’ambiance. S comme seins. Pour cette première soirée de Nantes by Fac, elle récupère les braises brillament déposées dans les yeux du public par Link et, en bonne "alchifumiste" les convertit en une puissante énergie. La soirée dites des "voix féminines" met à l’honneur le chant entraînant de Natasha mais ne doit pas faire oublier le travail des quatre garçons qui envoient riffs et notes à un rythme endiablé. Le chapiteau est ouvert à la démonstration d’un dragon déchaîné, la température grimpe, les chansons s’enchaînent, deux albums suffisent à nourrir un répertoire pour des lives variés mais sans temps morts.

Derrière la fumée, après la bataille, des yeux fatigués semblent avoir vécus pleinement cette expérience. Que certains reprennent des forces:les concerts Nantes by Fac se poursuivent juqu’au 30 septembre sous le signe de la diversité et de l’éclectisme.

Chloé Vigneau