Mais qu’est-ce que c’est que cette histoire de Lenin Café au fin fond de la campagne angevine ? On la voit de loin, la silhouette du militant communiste sur le pignon de la vieille bâtisse, brandissant son verre, comme pour nous dire Na zdorovye ! (À la vôtre !). De l’extérieur, on n’aperçoit rien de plus qu’une guinguette des bords de Loire, située pile sur la route du circuit « La Loire à vélo ». Mais à l’intérieur… quelle découverte ! On enfile la chapka et on pénètre dans une véritable datcha russe.

Le concept de cet endroit atypique ? Un bistrot où Martine vous servira au comptoir une vodka, un Breizh cola ou un canon de Coteaux du Layon, c’est au choix. Mais aussi un musée entièrement dédié à Vladimir Ilitch Oulianov, plus connu sous le nom de Lénine. Le militant communiste est partout ici. En photo, en peinture, en statue… « Oui j’ai ma carte au Parti communiste », avoue Martine Thouet, propriétaire du lieu. « Pour autant je ne fais ni d’apologie, ni de prosélytisme. Je n’ai pas d’admiration particulière pour l’homme politique mais plutôt pour le combat d’un homme qui s’est battu comme il a pu avec ses moyens. » Et pourtant, en 2006, à l’ouverture du lieu, quel ne fut pas le ramdam ! « La chapelle de Lénine », « un lieu de déperdition », « un endroit malsain ». Martine a tout entendu ! Finalement, six années plus tard, l’association qui gère le lieu compte près de 5000 adhérents et les soirées concert font le plein. « Mais on ne peut pas empêcher les gens de parler », regrette Martine.

Un bistrot, un musée, et bien plus encore…

Bien loin d’être malsain, le Lenin café est une véritable bulle d’oxygène. Un lieu convivial tenu par des gens généreux et passionnés. Il suffit d’écouter Martine vous conter ses voyages en Russie, en Ukraine ou en Tchéquie pour vous évader du côté de Moscou, à 3185 kilomètres de là. Éternelle voyageuse, c’est au fil de ses escapades en Europe de l’Est que Martine a rapporté tout ce qui fait l’âme slave du musée/bistrot. Statues de Lénine, peintures et fresques russes, ouvrages reliés annotés de la main du dirigeant russe, médaillon de collection, etc. C’est le seul endroit au monde qui possède autant d’objets ayant appartenu à Lénine.

Et bien plus qu’un bistrot où l’on vient discuter, bien plus qu’un musée où l’on vient appréhender la vie du militant communiste, le Lenin Café témoigne d’une époque. Celle allant de 1870 à 1924, qui a vu, après la fin de la grande guerre de 1914, se succéder deux époques et deux politiques fondamentalement opposées, l’Impérialisme et le Communisme. Alors si Martine vous sert le bortsch avant que vous passiez votre commande, ne le refusez surtout pas, ce serait une offense. Il s’agit de la tradition russe pour montrer son hospitalité.

Un musée qui vit et dont l’histoire se dessine au fil des soirées et des rencontres.

Ici, l’hospitalité, ce n’est pas cela qui manque. Routards ou touristes en balade, le café offre le gîte à qui le demande. Sous les combles se niche un dortoir. Vous n’aurez alors qu’à vous laisser bercer par le piano qui résonne en bas ou par la guitare manouche du groupe en concert ce soir-là. Bien au chaud sous la couette, vous entendrez tout le monde chanter, reprendre les airs tziganes en chœur. Ce Lenin Café est décidément un musée qui vit et dont l’histoire se dessine au fil des soirées et des rencontres. Un musée qui refuse de se figer dans le temps, même si, dès qu’on y pénètre, le temps semble pourtant bien être suspendu.

Textes et photos : Delphine Blanchard

  Pratique : le Lenin Café (La Basse île - 49290 Chalonnes-sur-Loire) est ouvert tous les jours d’avril à octobre. En dehors de cette période, ouverture ponctuelle le week-end. Renseignement : www.lenincafe.com ; mail : lenincafe@gmail.com ; tél. 02 41 47 32 33.

  À noter : le 6 avril 2013, concert exceptionnel de Victor Villena, le bandonéoniste du célèbre groupe de tango Gotan Project.