
CARNET DE FESTIVAL
Xavier Beauvois : « Je fais des films, je ne fais pas du cinéma  »
Lors du Festival International du Film de la Roche sur Yon, le cinéaste et comédien Xavier Beauvois a offert aux spectateurs yonnais une masterclass avec à l’appui quelques extraits de ses films de référence et, en exclusivité, quelques images de son dernier long-métrage. Actuellement en montage, le titre provisoire serait La rançon de la gloire, ou l’histoire vraie du rapt du cercueil de Charlie Chaplin quelques jours après son enterrement en décembre 1977.
Xavier Beauvois, vous le connaissez forcément. Qui n’a pas entendu parler du film Des hommes et des dieux, énorme succès en 2012, inspiré de l’assassinat des moines de Tibhirine en Algérie en 1996. Mais Xavier Beauvois c’est aussi, côté réalisateur, Le Petit lieutenant, Selon Mathieu, N’oublie pas que tu vas mourir ou Nord. Côté acteur, citons Ponette de Doillon, Le vent de la nuit de Garrel, L’Apollonide de Bonello ou Les adieux à la reine de Jacquot.
La rançon de la gloire
Souvent discret, le cinéaste a fait l’immense honneur au FIF d’être présent pour parler de son travail. Raconter la cuisine interne, un moment toujours intéressant pour les spectateurs lambda que nous sommes. Avec pour point d’orgue la projection en exclusivité des premières images de son prochain film, La Rançon de la gloire avec Benoit Poelvoorde et Roschdy Zem. Une comédie pour celui qui est plus habitué aux drames. « J’avais très envie de travailler avec Roschdy qui est un ami de longue date. Le choix de Benoît est venu bien plus tard mais c’est un plaisir de bosser avec lui. Cet acteur c’est de la nitroglycérine ! » sourit Xavier Beauvois. Les lumières s’éteignent. Premier extrait : début du film, vol du cercueil et demande de rançon. Les deux compères apparaissent vite comme de véritables pieds nickelés ! Rires du public. Le duo Poelvoorde/Zem fonctionne à merveille. Les lumières se rallument. Beauvois exulte : « Ça fait plaisir de vous entendre rire, c’est la première fois qu’on rit devant un de mes films. C’est vraiment émouvant. » L’alchimie entre les spectateurs et le réalisateur est telle qu’il offre un deuxième extrait, une scène improvisée dans la caravane de Poelvoorde. Ce dernier part dans une danse cocasse sur Zou bisou bisou de Gillian Hills. Zem le rejoint bientôt. Encore plus cocasse ! La blague fonctionne. Espérons que cette scène sera conservée au montage. Xavier Beauvois explique alors : « Comme dit Téchiné, “il faut laisser le plateau ouvert pour que l’inattendu arrive”. J’aime que les acteurs proposent des choses, qu’il s’emparent des personnages. Parfois, lors du tournage, je sens où le scénario n’est pas bon. Alors on va tous boire un coup, réfléchir tranquillement et on revient sur le plateau, prêts à improviser. Je n’aime pas la période d’écriture, ni du montage, je laisse cela à ma femme qui est monteuse ! J’aime ce qui se passe sur le tournage. »
C'est comme si vous me demandiez vous préférez être Léonard de Vinci ou La Joconde ? Forcément, je préfère être le créateur que le modèle
Les modèles
« Charlie Chaplin a tout inventé. C’est le cinéma à lui tout seul. Il y a la modernité. Il y a la direction d’acteur. Forcément c’est un de mes modèles. Ce projet de film était bien antérieur à Des hommes et des dieux, c’est tellement burlesque, il fallait en faire quelque chose, on est allé tourné en Suisse, dans le vrai cimetière, dans le vrai manoir, etc. » s’enthousiasme le cinéaste. Chaplin donc à qui, on l’espère, ce film rendra hommage également dans la façon de filmer et de raconter les histoires. Beauvois ajoute : « Sur la feuille de service en début de tournage, j’avais noté cette citation de Chaplin, “Le point de vue le plus simple est toujours le meilleur.” Chaplin est intemporel et universel, tout le monde le comprend. »
Les lumières s’éteignent à nouveau. À l’écran : Il était une fois la révolution de Sergio Leone. « C’est un des cinéastes qui me donne du plaisir. À chaque fois. C’est beau, intelligent, précieux et simple. Il fait des films, pas du cinéma, moi aussi » confie Xavier Beauvois. Et de poursuivre : « J’ai envie de tourner un western depuis très longtemps. Mais c’est très dur de tourner avec de vrais Indiens, ils sont tous gros, reclus dans leurs réserves ! Et puis j’ai peur des chevaux. Peut-être que je vais réaliser un film sur la guerre, façon western. »
Acteur versus réalisateur
Double casquette pour Xavier Beauvois mais laquelle a sa préférence ? Il rigole. « C’est comme si vous me demandiez vous préférez être Léonard de Vinci ou La Joconde ? Forcément, je préfère être le créateur que le modèle. Pour être acteur, il faut vraiment aimer le caravaning ! Mais, pour autant, j’aime l’ambiance du plateau. Et puis être acteur c’est jouer. Comme un enfant. J’aime jouer… avec des flingues ! Ou des chars d’assaut ! Quand on joue, on s’amuse, on ment… Entre les mots “Moteur” et “Coupez”, c’est le seul moment où tu ne réfléchis pas. Tu te laisses aller. C’est comme un petit saut en parachute, à chaque fois. »
Qu’il soit acteur ou réalisateur, on aime la douceur et la finesse de Xavier Beauvois. Qu’il joue ou qu’il réalise, c’est lui qu’on retrouve, sa personnalité, son authenticité, sa simplicité. Ce garçon qui fuit Paris et qui préfère les grands espaces pour jouer avec ses enfants dans des courts-métrages improvisés en vacances. Cet homme pour qui la vraie vie est tout aussi importante que le cinéma. Pour qui le cinéma se nourrit de la vraie vie. C’est sûrement pour cela que ses films touchent autant.
Delphine Blanchard
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