Installée en 2007 du côté de Lavau, elle avait fini par couler au gré des flots.

La maison de Couëron

La Maison dans la Loire de Jean-Luc Courcoult (le monsieur loyal de Royal de Luxe), telle un phénix, renaît de ses cendres lors de cette dernière édition, mais sur la commune de Couëron cette fois. Tout est bien pensé, l’estacade quai Pontgibeau permet d’avoir une belle vue d’ensemble. Les fondations capturées par la vase penchent légèrement, d’où cette impression apocalyptique. Que serait-il donc arrivé à ses fantomatiques occupants ? Quel mystérieux phénomène aurait-elle subit ? « Elle semble aussi solitaire que nous le sommes de temps à autre dans la nature » raconte l’artiste. Cette maison endormie est à la fois réaliste et poétique, concrète et secrète. Un tableau en trois dimensions qui interpelle le passant accoudé au quai.

Vous vous rappelez ce banc magique ? Mais oui, celui-là même qui, quand on s'y assoit, déclenche le jet du plan d'eau !

Le château de Saint-Jean-de-Boiseau

Direction le bac pour passer de l’autre côté de la Loire et reprendre la route vers Saint-Jean-de-Boiseau où nous attend le Château du Pé. C’est ici même qu’en 2007 avait été installé Did I miss something ? de Jeppe Hein. Vous vous rappelez ce banc magique ? Mais oui, celui-là même qui, quand on s’y assoit, déclenche le jet du plan d’eau ! Un truc un peu fou qui force le promeneur à se pencher sous le banc, à regarder à gauche, à droite, où se trouve le "truc". En face de ce banc, le château du Pé qui, cette année, a fait appel à six couples d’artistes (en art comme à la ville) pour décorer les six chambres.

Et alors là, quelle bonne idée ! Ces chambres d’artistes sont ravissantes, surprenantes, parfois touchantes. Comme celle d’Eva & Adèle, couple d’artiste déjanté. Des hommes ? Des femmes ? On ne sait pas, le couple entretient le mystère et la chambre décorée est à leur image. On y voit de l’amour, de la sexualité, des rêves… Des illustrations qui semblent enfantines au premier abord mais lourdes de sens en y regardant de plus près. La mort n’est jamais loin. Pas facile d’y faire de beaux rêves (il faut rappeler que chaque chambre est louable à la nuit) mais c’est, en tout cas, un beau voyage nocturne.

L’antichambre des écrivains Frédéric Dumond et Emmanuel Adely, toute blanche, comme une page nouvelle à écrire est, quant à elle, une véritable curiosité. Portes camouflées : ici se niche le lit, puis un autre, un secrétaire, une étagère. La chambre prend forme peu à peu, à la manière d’un livre qui s’écrit au fil du temps, après ratures et brouillons.

Le serpent de Saint-Brévin-les-Pins

On quitte la campagne pour le littoral pour aller admirer le Serpent d’océan de Huang Yong Ping. À la pointe du Mindin, face au pont de Saint-Nazaire, l’immense animal surgit. À marée haute, le squelette apparaît à peine, comme issu d’une fouille archéologique. À marée basse, le serpent se découvre entièrement et son mouvement le rend vivant : on devine qu’il a traversé les mers pour venir échouer sa gueule démesurée sur cette plage. La ligne de ses vertèbres joue avec la courbe du pont de Saint-Nazaire et la manière dont il se pose rappelle l’architecture des carrelets, ces pêcheries typiques de la côte atlantique. Une œuvre démesurée qui touche également le passant non avisé, venu se balader par hasard sur cette plage atypique. Le Loch Ness a son monstre marin, Saint Brévin a désormais son serpent d’océan, totalement inoffensif, lui.

Delphine Blanchard

Sur le même sujet : « En croisière pour la dernière édition d’Estuaire » par Francis Coraboeuf.