LES BATARDISES 2012
De l’art à la campagne ? Oh la vache !
Une petite commune vendéenne en pleine campagne. Une grange isolée. Des vaches, des champs… et des œuvres d’art. À Landeronde, au coeur du village de La Batardière, une manifestation artistique s’installe, tous les deux ans : les Batardises. De l’art en milieu rural ? Oui, c’est possible, la preuve.
C’est sur la route des Sables-d’Olonne, jusqu’ici, tout va bien. Le visiteur est rassuré, il ne part pas en terre inconnue. Puis, tout à coup, il faut bifurquer et là… place aux petites routes de campagne. Les vaches nous regardent passer, ruminant leur drôle de sort. La petite pancarte du lieu-dit apparaît enfin. Les Batardises se méritent, qu’on se le dise.
Mais quand on y arrive, quel bonheur. Ambiance champêtre, les bénévoles s’activent pour ranger les restes des festivités de la veille, vernissage oblige. Sur la pelouse de l’entrée, les mots « contemplation », « amour » et « solitude » nous accueillent. Une entrée en matière poétique.
Une histoire de famille
Au fond, un champ tout en longueur, à gauche une grange rénovée, à droite une grange en l’état. Ce lieu, c’est désormais l’antre des deux créateurs de cette Biennale : Christine Poupeau et Frédéric Jammes, couple à la scène artistique comme à la ville. Cette grange c’est un héritage familial, celui de la grand-mère de Christine. En 2002, ils habitent alors à Montpellier mais reviennent en Vendée l’été et décident de ne pas laisser ce lieu à l’abandon et d’y créer, tous les deux ans, une Biennale d’art. Organiser une manifestation artistique en milieu rural, un joli pari. Dix ans plus tard, on peut ajouter : un joli pari désormais réussi. Connue des galeristes, des initiés, des acheteurs, la manifestation draine tous les publics, y compris les voisins. Le cadre bucolique y est pour beaucoup, de même que l’éclectisme des œuvres sélectionnées, entre figuration et abstraction.
Marboeuf, Bulteau, Artaud…
De l’art contemporain donc mais pas obscur pour autant. Les œuvres exposées sont à l’image du lieu : mixtes. Entre techniques traditionnelles et contemporaines, entre œuvres picturales et in situ, c’est une sorte de « joyeux bordel » mais, ne vous méprenez pas, le bordel est de qualité. Les sculptures de grillage de Pierre-Augustin Marboeuf sont attachantes : poissons, cheval, chiens… L’envie soudaine d’adopter son bestiaire apparaît, le grillage prend vie, au fur et à mesure, ses sculptures deviennent créatures. Et on verrait bien ce cheval gambader dans le champ d’à côté.
On sort de la grange pour rejoindre le champ attenant. L'herbe est haute et l'installation de Jean-Claude Artaud monumentale
Dans la grange rénovée, on retrouve les œuvres de Christine Poupeau et Frédéric Jammes. Le reste de l’année, cet endroit, c’est leur atelier. Là, les cimaises sont de sortie : photographies, retravaillées au dessin et à la peinture, pour elle ; dessins au graphite, art numérique et sculptures en bois pour lui. Des œuvres « à quatre yeux » : les deux artistes travaillent ensemble, produisant chacun une œuvre personnelle mais portée par le regard de l’autre. Deux chemins artistiques parallèles pour une histoire commune.
À côté, les peintures abstraites de Rémy Jammes, ses dernières productions : fougueuses, colorées, envoûtantes. Un soupçon de Matisse, une touche de Miro, une pincée de Nicolas de Staël… de la belle peinture qui peut rivaliser avec les plus grands.
On sort de la grange pour rejoindre le champ attenant. L’herbe est haute et l’installation de Jean-Claude Artaud monumentale. Des arbres, des pancartes, un chemin qui se dessine… Le chemin que nous essayons tous de trouver. Bref, une promenade à faire dans ce champ verdoyant entre réflexion existentielle et bol d’air oxygénant.
On se retourne pour prendre le chemin de la seconde grange, en l’état celle-ci. Pur jus. On y retrouve les dessins bien alignés de Dominique Bulteau, de la craie noire, du crayon de couleur. Des terrains de foot transformés en jardins à la française, un univers fantasmagorique, des perspectives angoissantes et l’ambiance du lieu ne fait qu’y contribuer.
Le tour du propriétaire est terminé. Une dernière vue d’ensemble. De l’art en pleine campagne, l’image est réjouissante. Faire bouger les lignes, se dire que l’art n’est pas l’apanage des villes, rendre accessible la culture artistique. Une bien belle idée que quelques « illuminés » essayent de propager depuis maintenant dix ans. Souhaitons-leur encore au moins dix années de bonheur et de partage artistique.
Delphine Blanchard
Les Batardises à la campagne : jusqu’au 29 juillet à La Batardière à Landeronde
Les Batardises à la mer (extension de la Biennale pour la première fois cette année) : du 1er au 19 juillet au Prieuré Saint-Nicolas aux Sables-d’Olonne.
Bloc-Notes
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