PORTRAIT DU PUBLIC
Utopiales 2010 : la Grande réunion...
A la rencontre des visiteurs du Festival International de Science-Fiction de Nantes
Episode 2 / Station Utopie 20-10 : l’air conditionné et la gravité reconstituée ont fini de réconforter le visiteur éprouvé par les tempêtes stellaires ligériennes. La Grande réunion s’annonce encore plus excitante et harassante que prévue. Les Utopiales 2010 sont l’occasion pour beaucoup de laisser libre cours à leur passion sans passer pour d’étranges illuminés, c’est donc l’esprit complice que je suis partie à la rencontre de ces quelques visiteurs parmi la foule...
Johan, 20 ans
« La science-fiction c’est un domaine très vaste, il y a beaucoup de sous-parties, de branches, il ne faut pas se limiter à un a priori global, il faut s’ouvrir. Ça a toujours un intérêt de s’évader, surtout par rapport à la société actuelle, il ne faut vraiment pas se fermer. »
Originaire de Lyon, il vient aux Utopiales depuis cinq ans déjà et y retrouve des amis, arrivé dès jeudi matin il compte bien rester jusqu’à la fin. Il s’intéresse surtout aux œuvres graphiques présentées et à toutes les expositions de dessins ou illustrations. Plutôt attiré pas la science-fiction, certains de ses amis penchent eux du côté fantasy.
Ludovic et sa petite famille
« Ça restera beaucoup de dessins dans un premier temps car j’aime beaucoup le dessin mais après dans l’écriture ça peut être vraiment intéressant, il faut essayer... »
Habitant St Nazaire, c’est sa première visite aux Utopiales. A l’origine, il est venu admirer le travail de Didier Graffet (l’illustrateur contemporain le plus important de l’œuvre de Jules Verne, il présentait une exposition intitulée « Mondes et Voyages ») dont il a découvert les dessins par les affiches réalisées pour la brasserie Lancelot, autour de l’imaginaire arthurien. Sa femme l’accompagne dans sa passion et trouve elle aussi cette exposition magnifique, et le rire heureux de leur petite fille, future fan de fantastique peut être, nous laisserait presque imaginer qu’elle aussi apprécie.
Ludovic commence à peine à s’intéresser à cet univers mais, après avoir vu un grand nombre de dessins et aimé l’imaginaire qui s’y exprime, il se dit tenté par la lecture de livres de sf et de fantastique ; la librairie du festival, riche en découvertes, lui a certainement donné quelques idées...
Laurent, 23 ans
« On peut être absorbé par l’histoire sur le moment puis refermer le livre et réaliser que ça ouvre vraiment une réflexion intéressante, c’est en général une transposition à peine poussée des problèmes qu’on rencontre tous les jours... »
Il fait le trajet depuis Paris depuis 4 ans pour les Utopiales. Fan de littérature et de cinéma SF, il s’attache à explorer tous les aspects du festival, expositions, conférences et programmation cinématographique.
Pour cet informaticien qui voit au travers des murs (mais que durant son sommeil hélas...), la SF est un genre éminemment varié mais dont l’importance est réelle pour saisir les enjeux du monde contemporain :
« C’est un genre qui est à la fois extrêmement divertissant -il y a énormément de choses à voir, des phénomènes amusants ou fantastiques, l’espace par exemple - mais ça ouvre aussi pas mal de perspectives de pensée, des problématiques qui sont très actuelles mais qui se posent au travers d’une histoire fascinante et qui sont donc plus faciles à appréhender. »
Lina, 14 ans
« Mon super pouvoir ? Non, ça doit rester secret... »
Cette jeune fan de science-fiction et de productions asiatiques vient des alentours de Nantes pour retrouver aux Utopiales une bande d’amis cosplayers et profiter des multiples activités liées à sa passion (expositions, films d’animations, concours).
Son intérêt pour l’univers manga et fantasy a commencé très tôt : cela fait cinq ans qu’elle a découvert cet univers par les mangas, et, depuis trois ans, elle est devenue plus active en s’impliquant dans des concours de cosplay. Elle défilera d’ailleurs dimanche pour une jeune créatrice nantaise dont les créations s’inspirent de l’esthétique japonaise.
Cette ferveur et cet engagement sont, pour elle, amenés à durer et elle commence déjà à imaginer comment allier sa passion avec un projet professionnel ; même si elle demeure curieuse de tout et ne s’enferme pas dans ce monde, lisant beaucoup de littérature et n’oubliant pas qu’en dehors des mangas, il y aussi la philosophie...
Adrien, 27 ans
« Tout le monde lit de la SF au fond.. »
Il n’est pas informaticien ( !) mais ce nantais se considère bien comme un vrai geek, même s’il insiste sur le fait que l’image du geek [1] a beaucoup évolué depuis quelques années (il est même devenue assez à la mode...) et que la démocratisation des technologies a nettement fait reculer le cliché du nerd programmant son ordinateur ou piratant des sites. L’accès aux jeux vidéos, aux films et à l’information est aujourd’hui bien plus aisé pour les néophytes.
Fan de science-fiction, rôliste [2], il vient aux Utopiales depuis 7 ans et y croise beaucoup de visages familiers (souvent des amateurs de jeux de rôle grandeur nature comme lui).
Si c’est au départ la présence d’un auteur en dédicace qui l’a attiré, il a depuis élargi son intérêt pour la SF à d’autres médias, vers les films en compétitions, les expositions et les conférences (même s’il estime que leur niveau est plutôt variable...). « On dit Science-Fiction mais ça regroupe des genres littéraires très très différents. On va en lire certains et pas d’autres. C’est un domaine très vaste. On oublie souvent qu’il y a beaucoup d’auteurs dits classiques qui font de la SF ou du fantastique en fait, mais comme ce n’est pas classé au rayon SF, on ne le voit pas forcément. Tout le monde lit de la SF au fond.. »
«Balzac c'est de la SF!»
Julie 26 ans
«Petite déjà je découpais des dessins d'étoiles et de galaxies.»
Informaticienne, elle vient de Paris pour le festival avec son père et son frère, tous deux fans de SF également.
Ce qui l’a attirée encore une fois aux Utopiales, c’est avant tout la richesse proposée par les nombreuses tables rondes, les discussions avec les auteurs, les séances de dédicaces, et le fait que les thèmes s’élargissent vers des questionnements politiques et sociaux.
Grande lectrice de SF, cela fait une dizaine d’années qu’elle se passionne pour ces genres ; depuis son adolescence et ses films fondateurs vus et revus, comme Dune ou Star Wars, elle se tourne plus vers la littérature et ses grands cycles. La BD la laisse un peu sur sa faim, comme le cinéma dont elle regrette parfois l’aspect trop réducteur :
« J’aime bien les films mais je trouve qu’il n’y a pas du tout la même richesse dans les bouquins que dans les films, où la plupart du temps ce sont des formats hollywoodiens qu’on va nous servir, des films d’actions principalement, sous une trame SF, mais c’est très creux au final. On a l’impression que les livres vont eux aussi être potentiellement très creux alors que ce n’est pas du tout le cas. Ils sont plein de références philosophiques, très bien écrits la plupart du temps et ont un fond vraiment intéressant.
J’ai l’impression que dans le cinéma de SF et fantastique il y a les films d’actions versus les films d’auteurs. Ces films sont souvent très difficiles à appréhender, au mode narratif assez complexe et pointu, alors que dans la littérature il y a des romans accessibles. Ils sont eux aussi pleins de rebondissements amènent une réflexion et une dimension philosophique : ils génèrent à la fois du plaisir et de la réflexion. »
Pour cette jeune femme fascinée par les sciences et les mystères de l’univers, qui rêverait de pouvoir se téléporter, la littérature de SF est « très exaltante...même si je comprends les gens qui peuvent complètement détester, car il y a des stéréotypes et des archétypes qu’on peut ne pas apprécier. Moi ça a toujours été là, petite déjà je découpais des dessins d’étoiles et de galaxies... »
Justine, 20 ans, et son groupe de cosplayers
« On cherche vraiment à produire quelque chose nous-mêmes et à l’exposer »
Tout comme le festival qui s’est terminé sur un concours de cosplay [3] et une journée asiatique (manga-tan) très fréquentée, finissons notre petit tour de rencontres par ce groupe de cosplayers qui se sont rencontrés aux Utopiales 2009 et depuis écument les conventions dans la région.
« On cherche vraiment à produire quelque chose nous-mêmes et à l’exposer en concours ou en libre. Il y a beaucoup de thèmes intéressants, pas que de la SF, il y a des expos etc, on va tourner...on a vu deux films déjà et la conférence de Bernard Werber, il y en a vraiment pour tous les goûts. »
Âgés de 16-17 ans en moyenne, mais parfois bien plus, il font leurs costumes eux mêmes (c’est une des règles des concours !) et passent de longues heures à préparer et répéter leurs prestations inspirées par les mangas et les jeux vidéos. Le ton est souvent espiègle, intelligent et humoristique. Il montre le recul réel dont ils font preuve par rapport à cet univers avec lequel ils ont grandis ; ils s’approprient maintenant les codes et les styles, à travers cette activité créatrice et ludique.
Leur passage en groupe de dix sera un des grands moments du concours de dimanche.
« Manga-tan n’est là que depuis 4 ans, donc ce n’est pas vraiment un festival axé costumes mais par contre cette journée a permis de faire connaitre le cosplay et c’est pour ça qu’aujourd’hui on se permet de venir déguisés... »
Propos recueillis par Georgina Belin
Crédit photo banière : Romain Ledroit
[1] geek / nerd :
Le terme geek est un anglicisme désignant une personne passionnée, parfois de manière intense, par un domaine précis. Il s’emploie entre autres dans le domaine de l’informatique ainsi que dans celui de la science-fiction. L’archétype le plus célèbre du geek est celui du jeune (ou de l’adulte resté jeune) féru de sciences/maths/logique, qui s’intéresse également aux nouvelles technologies et aux univers fantastiques (comics, science-fiction, heroic fantasy, etc.).
Cette passion s’applique concrètement par de nombreuses activités, telles que le jeu de rôle, le cinéma, les séries télévisées, les jeux vidéo ou encore la programmation informatique. Il y a souvent confusion entre les geeks, les nolifes, et les nerds, bien que cette confusion soit généralement mal perçue par les geeks eux-mêmes. De même, un amalgame est souvent fait entre les personnes passionnées de hautes technologies (les technophiles) et les geeks en général.
[2] Rôliste :
Adepte du jeu de rôle.
Un jeu de rôle, souvent abrégé en JdR, parfois appelé jeu de rôle sur table pour le différencier du jeu de rôle psychologique, est un jeu de société dans lequel plusieurs participants créent et vivent ensemble une histoire par le biais de dialogues, chacun incarnant un personnage fictif. Le support de l’imaginaire est très important. Des dés, du papier et des crayons constituent l’essentiel des accessoires nécessaires pour jouer. Les rôlistes (néologisme créé dans les années 1980) font une interprétation du rôle de leur personnage.
Le jeu de rôle se distingue des autres jeux de société car il n’y a généralement ni gagnant ni perdant. Il constitue une forme interactive de conte, basée sur des relations sociales et collaboratives plutôt que sur la compétition. Le but du jeu est simplement le plaisir qu’on éprouve à participer à une histoire, à interpréter un rôle et à faire évoluer son personnage pour le rejouer dans une partie future.
[3] Cosplay : Le cosplay, est un mot-valise composé des mots anglais "costume" et "playing", une sous-culture japonaise, et une pratique consistant à jouer le rôle de ses personnages (héros de mangas, d’animation japonaise, de films, ou de jeux vidéo) en imitant leur costume, leurs cheveux (avec une perruque) et leur maquillage. On appelle les pratiquants des cosplayers. Très courante au Japon, cette pratique n’est pas rare aux États-Unis ou en Europe lors des conventions et autres festivals de mangas ou de science-fiction. Cette pratique est née aux États-Unis, créée originellement par les fans de Star Trek puis de Star Wars qui se costumaient en personnage pour la sortie des films, mais a connu une très grande expansion au Japon, pays qui organise désormais le « World Cosplay Summit » .
Bloc-Notes
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