Univerciné Italie
Vers une "Destinazione" inconnue
Festival du cinéma italien, au Katorza de Nantes
"La Destinazione" plonge dans les réalités sociales d’un petit village sarde éloigné du monde contemporain, au travers des yeux d’un jeune gendarme. Dès sa sortie en 2000, le premier long métrage de Piero Sana, a rencontré le succès : prix au Festival Lincoln Center-Open Roads en 2004, au festival d’Annecy en catégorie Cinéma Italien, et au Festival des Films du Monde de Montréal en 2003.
Emilio est un orphelin de dix sept ans. Un beau jour, il décide de tout quitter : ses copains, les soirées, ses petits boulots de DJ…Il veut faire quelque chose de sa vie ! Pour lui, le seul moyen de pouvoir construire quelque chose de stable et de gagner de l’argent est de s’engager dans les Carabinieri [1]. Il veut être gendarme juste un temps, pour enfin avoir une situation.
Le choc des cultures
L’ aventure d’Emilio commence dès son départ alors pour Rome où il va suivre sa formation : il y fait la connaissance d’hommes venant tous d’endroits différents. C’est un enrichissement culturel pour ce jeune homme. Au côté de professionnels, il apprend la ponctualité, l’ordre, le respect…Au sortie de sa formation, il n’est déjà plus le même : le jeune garçon sait désormais quelle direction donner à sa vie.
A la fin de cette formation à Rome, il est affecté en Sardaigne, à Coloras. Mais ce petit village perdu dans les montagnes est resté attaché à ses valeurs et ses rites, bien loin de ce qu’Emilio connaît. A Coloras Emilio vit le choc entre deux cultures. Rien à voir avec "le continent" : pas de discothèques, pas de bars, pas de belles voitures…
Emilio y rencontre une jeune fille, Giacomina. Tous deux vont tomber amoureux. Mais, ombre au tableau : dans ce village où tout est différent, une jeune Sarde ne peut pas avoir de relation avec un étranger. Leur histoire d’amour se heurte à l’opposition des villageois, méfiants vis-à-vis des "continentaux", et encore davantage si ces derniers sont carabiniers.
Bientôt, lors de sa première mission, il fait la rencontre d’Efisio, un jeune homme du même âge que lui. Efisio est un fils de berger qui aide son père à garder le troupeau de mouton. La vie des deux jeunes hommes sont mise en parallèle même si tout les oppose. Ils partagent un point commun : leur innocence. Efisio va perdre la sienne lorsque deux voleurs de troupeau tuent son père devant lui. Le berger va devoir assumer ce qu’il a vu et témoigner pour rendre justice à son père. Emilio, lui, va devoir prendre son rôle de gendarme au sérieux et faire face à une mission délicate pour son âge : l’arrestation de deux hommes. Tous ces évènements vont les faire grandir et leurs destins vont alors prendre des chemins bien différents.
Lorsqu’il arrive à Coloras, petit village de Sardaigne, Emilio est complètement dépaysé. Rien à voir avec le continent…
Entre fiction et documentaire
Piero Sana, a fait, pour ce film, un choix original. Il a choisi de filmer ce petit village de Sardaigne dans des traditions du début du 20éme siècle. Or l’histoire se déroule à notre époque. Ce choix donne alors l’impression d’assister à un documentaire, qui fait la part belle à la description de tous les rites et de toutes les traditions qui existaient à l’époque dans les petits villages Sardes : le défilé des mariés dans le village, les danses traditionnelles, jusqu’au rituel du deuil durant lequel toutes les femmes se réunissent autour du lit du défunt, pleurent et prient. En solidarité avec la veuve, elles portent le noir pendant toute une période…
On comprend également que la Sardaigne était une société matriarcale : les femmes tiennent une place importante dans les décisions du village et ce sont elles qui tiennent la maison. Ce film a donc une valeur documentaire qui permet de montrer les valeurs anciennes, et souvent archaïques, qui existaient il y a encore peu dans les petits villages de Sardaigne. Ce choix accentue la différence entre la manière de vivre dans les villages éloignés et le continent.
Piero Sana illustre alors les difficultés de se faire une place et de s’intégrer dans un milieu aux valeurs complètement différentes des nôtres. On comprend peu à peu qu’il est impossible pour Emilio de construire sa vie à Coloras, ce monde trop de différent du sien, si bien que la fin du film voit le jeune garçon partir vers une autre destinazione…
Céline Anton
Le Katorza, cinéma d’Art et d’Essai de Nantes
[1] Les Carabinieri : la gendarmerie italienne
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