Univerciné Italie
L’Abbuffata : quand le cinéma s’invite à table
Pour l’ouverture du festival Univerciné Italien de Nantes, le public a découvert "L’Abbuffata", dernière œuvre cinématographique de Mimmo Calopresti. Film hommage au grand cinéma italien, "L’Abbuffata" est aussi le récit de trois jeunes qui ne rêvent que de faire du cinéma.
A Diamante, en Calabre Italienne, la mer est le seul horizon. La vie au village est rythmée par la pêche et le fracas des vagues. Jusqu’au jour où trois jeunes décident de réaliser leur rêve : monter un film.
Gabriel, Marco et Nicolas bousculent les habitudes du village avec leur ambition de cinéaste. Ils passent des heures à interviewer les habitants, qui, devant la caméra, livrent leurs envies, leurs histoires. Quand c’est au tour de la vieille tante de Gabriel de se raconter, elle leur parle de son grand amour de jeunesse : un cousin éloigné qui a émigré aux Etats-Unis et qui a promis de revenir. Quarante ans qu’elle l’attend.
Touchés, les trois amis voient dans ce sujet la matière idéale pour leur film. Ni une, ni deux, ils se mettent en quête de monter leur projet. Ils se tournent vers Néri, dit le Maestro. C’est un ancien réalisateur désabusé, qui s’est retiré à Diamante et les jeunes lui demandent en vain de l’aide. "Trouve moi un acteur et je te prêterai la caméra" est la promesse que fait le Maestro aux trois garçons, les croyant incapables d’y parvenir.
"Quand à 5 ans, j’allais au cinéma, j’avais l’impression qu'on allait attaquer une diligence"
A la recherche de l’acteur idéal
Pour jouer le rôle de l’amant de la vieille tante, il faut un homme d’une cinquantaine d’années et parlant anglais. Le casting commence dans le village, mais très vite, les cinéastes se confrontent à la dure réalité : l’anglais, ce n’est vraiment pas la langue de la Calabre ! Il y a bien le vieux professeur d’anglais, mais il débite son texte à la vitesse d’un escargot.
Ils se tournent alors vers Francesco, un acteur originaire de la région venu passer quelques jours de vacances à Diamante. Il leur propose d’aller à Rome et de rencontrer d’autres acteurs. Fraîchement débarqué dans la capitale de la Cinecitta avec Elena, la sœur de Marco, les jeunes tentent de faire des rencontres sans grand succès. Ce n’est que lors d’une soirée, qu’une femme française, Amélie, intéressée par le projet, propose d’en parler à son fiancé, célèbre acteur français : Gérard Depardieu.
Une jeunesse qui se raccroche à ses rêves
Mimmo Calopresti a toujours rêvé de faire du cinéma. Comme les héros de "L’Abbuffata", le cinéma a toujours été pour lui un moment de bonheur, une aventure : "Quand à 5 ans, j’allais au cinéma, j’avais l’impression que l’on allait attaquer une diligence".
La jeunesse, représentée ici, est une jeunesse avec des rêves pleins la tête. Toujours derrière leur caméra, Gabriel et les autres essayent d’échapper à l’ennui lié à l’enclavement de leur village. Pour ces jeunes, partir vers la ville est un leitmotiv récurrent. Pour Elena par exemple, Rome est le lieu de tout les possibles, une porte ouverte vers autre chose que sa vie de vendeuse de téléphones portables.A contrario, Néri est le personnage de la désillusion, aigri par la vie et par le milieu du cinéma dans lequel il a vécu. Réalisateur d’un seul film dont on devine que le succès n’a pas vraiment été au rendez-vous, il se montre négatif à chaque nouvelle initiative cinématographique des jeunes. Sans doute parce que lui-même n’a pas réussi son entreprise et qu’il connaît le revers de la médaille.
C’est un festin à la folie gargantuesque par la profusion des plats et où notre Gérard Depardieu confirme son image de bon vivant franchouillard
L’apparition de Gérard Depardieu dans le quotidien de ce village est le point culminant du film. Entre les soupirs fatalistes de Néri et l’impatience anxieuse des trois réalisateurs, l’attente du comédien français sur le tarmac de l’aérodrome est peut-être le moment où la tension est la plus palpable. Le rêve va-t-il se réaliser ?
Un film hommage
Mimmo Calopresti s’est d’abord essayé au documentaire avant de s’attaquer au cinéma. Sa première œuvre de fiction, "La Seconda Volta" ("La seconde fois"), évoquait les séquelles de l’époque du terrorisme et de la lutte armée en Italie à la fin des années 70.
"L’Abbuffata" est abordé sur un registre complètement différent : "Ce film se veut un hommage au grand cinéma italien". Le choix du titre n’est d’ailleurs pas un hasard. Il rappelle "La Grande Abbuffata" ("La Grande Bouffe") de Marco Ferreri, où les personnages mangent jusqu’à mourir. Mimmo Calopresti a écrit la scène de la fête du village en référence à ce grand moment de cinéma de 1973. C’est un festin à la folie gargantuesque par la profusion des plats, et où notre Gérard Depardieu confirme son image de bon vivant franchouillard.
Néanmoins même au 21ème siècle, la folie des grandeurs a parfois de fâcheuses conséquences. Sa digestion peut-être difficile, voire même mortelle.
"J’aime aussi beaucoup Fellini et sa manière de mettre du rêve dans son cinéma" explique le réalisateur. La dernière scène de L’’Abbuffata’ est une filiation avouée et reconnue à l’univers de Fellini. Cette revendication de faire un film hommage a les qualités de ses défauts : d’un côté, L’"Abbuffata" est un cumul de petits clins d’œil aux maîtres italiens, mais de l’autre, on peut déplorer le manque d’originalité dans la mise en scène et les dialogues.
Mais bon, tant qu’il y a du rêve…
Marie Delhaye
Le Katorza, cinéma d’Art et d’Essai de Nantes
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