’Garage’, film britannique de Lenny Abrahamson
La solitude des voies de Garage
La quarantaine, les cheveux grisonnant, une démarche hors du commun… non ce n’est pas Georges Clooney mais Josie, pompiste. Au début, on n’ose pas regarder Josie dans les yeux. C’est un type gentil mais un peu idiot. Pourtant, Josie, c’est une belle rencontre.
Josie, n’est pas très beau. Dans la vie, Josie est l’unique employé d’une petite station service perdue en Irlande. Josie est sale et parle mal. Josie, à première vue, fait peur. Ici tout le monde connaît Josie, mais ici "Tout le monde est à moitié pourri", c’est Carmel, l’épicière, qui le dit.
Seul parmi les autres
Josie vit seul mais Josie aime les relations humaines. En ville, tout le monde le montre du doigt, on l’évite, on le charrie, on se méfie. Alors Josie boit des bières pour passer le temps, parle à un cheval, et se fait même un porno de temps en temps -pour rire.
Le long de sa route, Josie nous entraîne dans la noirceur béate de ses jours. Entre mélancolie et solitude les heures passent, et Josie reste. Pour qui ? Pourquoi ?
Scènes après scènes, Lenny Abrahamson, le réalisateur, nous offre l’intimité de Josie. Oui, Josie on le voit en slip, dans son lit, et même nu. Mais finalement, Josie c’est l’univers d’un homme bousculé par la vie et emporté par sa conscience ou son inconscience... un type génial que la vie méprise et ignore, un type qui ne ferait de mal à personne, et pourtant…
Un jour, arrive un garçon. 14, ou 15 ans peut-être. David se fait embaucher à la station service, petit job de gamin. Il deviendra l’égal de Josie, celui qui partage sa solitude, ses troubles et ses plaisirs.
Alors Josie boit des bières pour passer le temps, parle à un cheval, et se fait même un porno de temps en temps -pour rire.
Une tension pathétique
Après avoir passée les cinq premières minutes à m’interroger sur la réelle utilité de ma présence dans cette salle de cinéma, du fond de mon siège, j’ai compris. A travers la lenteur de l’action, on avance au cœur de la tension du film. On se risque presque à la toucher puis on se perd, on se noie, on se laisse prendre dans l’euphorie pathétique du jeu de Pat Shortt (Josie).
L’acteur irlandais Pat Shortt, reconnu pour ses talents comiques notamment grâce à Unbelievables aux côtés de Jon Kenny, nous transporte avec Garage dans une spirale triste et complexe, douce mais consternante. Un travail d’acteur rare qu’on apprécierait retrouver plus souvent.
Souvent, le silence envahit l’action. Parfois même on étouffe, on voudrait nous aussi partir loin de tout, au plus près des collines vertes d’Irlande. Là ou nous emportera la camera : au gré du vent, au bout d’une voie ferrée ou juste au bord de l’introspection.
Mais finalement, Josie, on l’a tous rencontré un jour. C’était ce type au fond du bar à qui on n’a pas osé sourire.
L’étoffe des anti-héros
Lenny Abrahamson et son scénariste Mark O’Halloran aiment peindre les ’losers’, mais avec générosité. Déjà en 2004 le duo s’était fait remarquer avec Adam & Paul, qui décrivait, entre humanité et humour décalé, une journée dans la vie dramatique de deux junkies dublinois. Garage, lui, a déjà reçu le prix Art et Essai du dernier festival de Cannes, le prix coup de cœur du festival du film britannique de Dinard, le prix du meilleur film au festival de Turin, ainsi que le Grand prix du festival Cinessonne.
Anne-Line Crochet
Le Katorza, cinéma d’art et d’essai de Nantes.
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