
Je m’engage, tu t’engages... Elles s’engagent.
Parcours de femmes dans la Cité.
Le festival nantais Tissé Métisse propose tous les ans, peu avant Noë l, un patchwork de spectacles et de concerts, à la Cité des Congrès... Mais peu savent que Tissé Métisse, c’est également des tables-rondes, des échanges, des rencontres, bien avant que les festivités ne démarrent. J’ai assisté à l’une de ces réunions le 23 Novembre dernier, à la Maison des habitants de Bellevue. A cette rencontre-débat, était présente une vingtaine de personnes : des intervenantes variées, issues pour la plupart d’associations et de collectifs nantais, sont venues raconter leurs parcours de femmes engagées...
Samia Allalou, principale intervenante de la soirée, commence son témoignage. Elle est Algérienne, journaliste de profession. Elle est arrivée en France en 1994 suite à l’attentat du réalisateur avec qui elle travaillait à l’époque. Côtoyant des professionnels de la presse, de la radio et des acteurs du milieu artistique, Samia Allalou a rencontré de nombreuses féministes algériennes, luttant contre le Code de la Famille appliqué en Algérie (loi discriminatoire, dite la loi de l’infamie, qui autorise la répudiation et la polygamie. Le divorce est unilatéral, et la femme doit obéissance au mari). Ces rencontres ont orienté son engagement... La création d’une association s’est rapidement imposée : c’est la naissance de « 20 ans Barakat » (« 20 ans ça suffit »), au sein de laquelle Samia Allalou est toujours membre. La campagne est très active pendant 2 ans et les efforts de « 20 ans Barakat » sont récompensés en Février 2005, lorsque des amendements sur le Code de la Famille sont votés. Ce n’est pas l’abrogation souhaitée, mais cela est pris comme un encouragement à poursuivre le combat...
L’exemple de Zozan, originaire de Turquie.
Elle rappelle avant de se présenter que la Turquie est un pays laïc. Le droit des femmes n’y est pas un combat nouveau : les femmes turques votent depuis 1923, bien avant les Françaises... Zozan, qui était militante au sein des mouvements d’extrême gauche turcs, s’est mariée soit disant par choix après le coup d’état, en 1980. Elle avoue aujourd’hui que sa motivation principale à l’époque était de quitter ses parents, mais qu’une fois mariée, la situation était pire ! Alors elle a voulu quitter la Turquie, coûte que coûte, pour ne plus jamais y retourner. Elle comprend désormais que l’on puisse tout faire pour quitter son pays, quelles qu’en soient les raisons : ceci expliquera son engagement, en France, auprès des sans-papiers. Elle a tiré un trait sur son passé en Turquie, et s’est remariée en faisant croire au regroupement familial, afin que la communauté turque locale n’apprenne pas la vérité. Malgré cela, Zozan a subi beaucoup de critiques, ici, à Nantes. Elle raconte en riant que son engagement en tant que féministe lui a notamment valu d’être traitée de lesbienne...
Aujourd’hui, elle jouit d’une certaine reconnaissance, respectée auprès des femmes turques et kurdes nantaises : J’ai fait des choses et ça se voit. Salariée à « SOS femmes », résolument féministe, elle constate, en pensant à ses convictions antérieures, que la lutte pour le droit des femmes c’est tout de même autre chose que lutte des classes !
C’est au tour de Corinne Provost (« Femmes solidaires ») de prendre la parole. Les mouvements féministes sont pour elle un véritable levier pour le droit des femmes et des immigrées. Elle insiste sur l’importance du travail en réseau, et de la nécessaire proximité dans les villages et les quartiers, auprès des femmes directement concernées.
« La Caravane », expérience édifiante
C’est dans cette optique que le projet de « La Caravane » a vu le jour. Ce voyage itinérant, des bidonvilles américains aux banlieues françaises, est l’exemple parfait du type d’action de sensibilisation à mener afin de favoriser la proximité. Les caravanières, issues des pays du Maroc, parlent des droits de la femme mieux que quiconque aux femmes issues de l’immigration. Samia Allalou raconte son expérience au sein de « La Caravane » en région lyonnaise, organisée par le FCI (« Femmes Contre Intégrisme »). Les ateliers, en Arabe et en Français, ont libéré la parole : cette expérience, édifiante, est à renouveller. Le débat s’est ouvert puisque l’on a ramené des femmes de là-bas pour parler avec des femmes d’ici.
Devenir du militantisme ?
Corinne Provost élargit la réflexion. Pour elle, les associations se sont éloignées : à théoriser et à produire de la pensée, le militantisme s’est isolé et c’est pour ça que les écarts se sont creusés. C’est important, en allant au rapprochement, de récréer des liens.
à théoriser et à produire de la pensée, le militantisme s'est isolé et c'est pour ça que les écarts se sont creusés.
C’est là tout l’engagement de « Femmes Solidaires ». Face au retour des intégrismes de tous poils, il faut recentrer au coeur du débat la question de la laïcité et ne pas baisser la garde. La soirée se termine par une intervention de Marie-Hélène Nivollet : Face à la difficulté de toucher les publics issus des milieux populaires, place à l’action. Le droit des femmes doit avant tout passer par une offre concrète. Le milieu associatif doit agir dans cette optique.
Claire ROBIN
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