ART
Hell’O Monsters : d’étranges créatures
Focus sur le travail du trio artistique belge
Jerôme Meynen, François Dieltiens et Antoine Detaille sont trois artistes belges regroupés sous le nom de Hell’O Monsters. Leur collectif est né autour de leur passion commune pour le graffiti. Aujourd’hui, ils s’éloignent de leur discipline première et délaissent la bombe au profit des feutres et des pinceaux, pour des réalisations conçues avec minutie et précision. Les murs restent tout de même leur support d’expression favori : des fresques murales qu’ils exposent dans les galeries et les foires d’art contemporain du monde entier.
Le 11 février dernier à l’Atelier, à quelques heures du vernissage. Jerôme Meynen, l’un des membres du collectif règle les derniers détails d’éclairages sur une fresque aux nuances pastel. Pour leur deuxième exposition à Nantes, les artistes belges présentent aussi quatre illustrations à l’acrylique et à l’encre de chine.
À première vue, le tableau est assez sinistre. Mais cet univers inquiétant est contrasté par la finesse des traits, adoucis par des teintes pastel et habillés par des formes géométriques
Sur le mur blanc de la galerie nantaise, des masques au long nez fin et feuillu, des têtes d’oiseau qui s’entremêlent à des jambes et des bras humains. À première vue, le tableau est assez sinistre. Mais cet univers inquiétant est contrasté par la finesse des traits, adoucis par des teintes pastel et habillés par des formes géométriques. Une ambiguïté avec laquelle ils jouent avec leurs illustrations, mais aussi par le choix de leur pseudonyme. « Hello » est synonyme de convivialité, mais en perdant le « O », « Hell » évoque alors l’enfer et « Monsters » renvoie à ces créatures fantastiques, à l’écart des normes sociétales. Un qualificatif qui traduit aussi leur volonté de faire de leurs trois personnalités un seul univers : « On travaille à trois à la manière d’un seul artiste. »
Monstres et masques de carnaval
Leur univers est peuplé d’êtres étranges et de symboles récurrents comme les crânes, la nature, le smiley, des personnages et des animaux hybrides où l’homme devient animal et inversement. De nombreuses références qui dressent un constat noir de l’humain, très souvent malmené dans leurs dessins. Ils caricaturent les adultes, non sans une bonne dose d’humour noir, avec une simplicité et un style enfantin. Une imagination avec laquelle ces grands enfants donnent vie à leurs créatures.
Leurs sources d’inspiration sont en partie liées à leur enfance, au début des années 80, où les films traitaient avec humour de l’image du monstre
Leurs sources d’inspiration sont en partie liées à leur enfance, au début des années 80, où les films traitaient avec humour de l’image du monstre, comme Ghostbuster ou Mars Attacks ! Une époque où le smiley commençait à émerger en Belgique, avec l’arrivée du courant electro et techno : le new beat.
« Nos sources d’inspiration sont nombreuses, de la peinture du Moyen-Âge, un peu boschien, aux personnages polymorphes et beaucoup de patterns (= motifs) qui viennent de toutes les origines : du design italien aux patterns africains. Nous essayons de globaliser tout ça et de créer une unité afin de tirer l’utile de tous les horizons possibles. »
Le souci du détail
Les travaux de Hell’O Monsters sont aussi une affaire de minutie. Pour la réalisation des peintures murales, ils utilisent une technique particulière. Ils s’aident de pochoirs qu’ils recoupent soigneusement au cutter, pour ensuite réaliser des aplats uniformes et opaques. La dernière étape consiste à tracer avec un marqueur noir ou à l’encre de Chine, tous les motifs qui sont la structure même du dessin. Des écorces, des planches de bois, des poils de singes, le plumage des oiseaux, des nervures des feuilles, etc. Toutes ces textures animent et donnent vie à leurs personnages.
Une perception de leurs travaux qui varie en fonction de leurs voyages, où ils présentent aussi bien des dessins, des installations ou encore des vidéos
Une diffusion internationale
Les trois artistes exercent leur art depuis dix ans et comptent près de trente expositions personnelles et collectives à leur actif. Depuis leur première diffusion publique, en Belgique, ils ont exposé à travers toute l’Europe, aux États-Unis et même en Chine, au sein de la galerie très prisée d’Agnès B. Une perception de leurs travaux qui varie en fonction de leurs voyages, où ils présentent aussi bien des dessins, des installations ou encore des vidéos.
Pour illustrer la diversité des points de vue sur leurs œuvres, Jerôme Meynen revient sur leur expérience à Hong-Kong. « En Chine, notre exposition avait le même nom que celle présentée à Paris, Modern Ghost, et il y a eu toute une polémique, car les fantômes sont beaucoup plus présents dans la culture asiatique. C’était justement la fête des fantômes, qui sont considérés comme dangereux. Ils ont alors pensé que nous avions choisi ce titre pour ça alors que ce n’était absolument pas le cas. »
Les produits dérivés
Les expositions font souvent l’objet de livres vendus en édition limitée. Mais les trois artistes font parfois vivre leurs œuvres sur textile. Leur collaboration avec la galeriste Agnès B a abouti à la mise en vente d’un carré de soie et de t-shirt. Des créations de design textile qui restent cependant exceptionnelles pour le collectif belge : « À proprement dit, ce ne sont pas réellement des projets de réalisation dans le temps. On fait des designs textiles quand il y a des commandes intéressantes, mais cela reste limité. On essaye de garder un certain contrôle sur ce que l’on fait, pour ne pas perdre cette identité qui reste axée sur l’art, même si nous avons un pied dans le design graphique avec ce genre de commande. »
Hell’O Monsters s’envole maintenant en direction de Madrid pour participer à ARCO, la foire internationale de l’art contemporain espagnol, l’équivalent de la FIAC à Paris.
Flavie Mandin
Crédit photos : Christophe Martin (Espace LVL)
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