
HIP OPSESSION SUR GRAND ECRAN
Air Force 1 : première classe
Air Force 1 : anatomie d’une légende urbaine
La Air Force 1 de Nike a certainement autant voyagé que la flotte présidentielle américaine du même nom. Mais attention à ne pas confondre les documentaires réalisés sur ces deux homonymes. Avion présidentiel VS hip-hop. Nous choisissons le hip-hop et enfilons notre plus belle paire de sneakers pour nous rendre au Cinématographe. Hip Opsession invitait Thibaut de Longeville le 11 février dernier pour une diffusion de son dernier film Air Force 1 : anatomie d’une légende urbaine. Retour sur l’histoire de cette basket trentenaire.
Sept ans après la sortie de Sneakers : le culte des baskets, Thibaut de Longeville nous colle aux baskets et revient avec Air Force 1 : anatomie d’une légende urbaine. Avec Sneakers, le réalisateur français fan de hip-hop se demandait comment la culture hip-hop a influencé la croissance des plus grandes marques de sport, comme Nike ou Adidas. Design de la sneaker, qui l’a portée et rendue célèbre ou encore comment elle a été détournée par la street culture. Mais un format 52 minutes, ce n’est pas suffisant pour Thibaut de Longeville et sa passion, qui décide de remettre le couvert avec un deuxième documentaire sur la basket. Mais cette fois-ci, il se consacre à la Air Force 1 sous toutes ses coutures : de ses premiers pas sur les terrains de basket new-yorkais au succès mondial qu’elle connait aujourd’hui.
- Thibaut de Longeville, en interview dans les studios de Radio Prun’
Easy-branding
Thibaut de Longeville récidive donc en s’entourant de la même équipe que pour Sneakers : le culte des baskets. Narration, graphisme, musique... Tous les éléments sont réunis pour une réalisation remarquable. Les baskets, uniquement une histoire de sport ? Comme le témoigne ces deux documentaires, la vulgarisation de la basket, c’est avant tout une histoire de hip-hop. Et Thibaut de Longeville, en bon aficionado de hip-hop, ne manque pas de nous le rappeler par sa réalisation. Point non négligeable tout d’abord, c’est un des pionnier du rap américain KRS-One, qui assure la narration tout au long du documentaire. Une grande fierté pour le réalisateur français. Quand on parle hip-hop, on parle musique. Et bien sûr, pas de faux pas pour Thibaut de Longeville : prods de DJ Clark Kent, 20syl, Moon Beatz, Outlines, etc. Grand fan de 20syl (Hocus Pocus, C2C), il a tout de suite pensé à lui pour la musique du film. Il avoue même imaginer un documentaire consacré à la musique du MC et DJ nantais. La musique joue donc un rôle majeur dans ce film, mais on ne peut pas négliger le graphisme réalisé par Arthur King. Ce même graphiste qui avait fait revivre le track My Adidas de Run DMC dans le premier documentaire de Thibaut de Longeville. Graphiste, mais aussi réalisateur et DJ hip-hop, il travaille avec des marques comme MTV, Canal +, et bien sûr Nike. Mais il réalise également des clips, notamment Hip-hop de Hocus Pocus, qui reflète le style de King Arthur, que l’on peut retrouver aussi bien dans Sneakers que dans Air Force 1. Mélange d’une culture hip-hop, d’un langage publicitaire et d’un graphisme constructiviste. Issus du milieu marketing, Thibaut de Longeville et Arthur King défendent la force du « une idée, un visuel ». Efficacité garantie.
Commander 1200 paires pour chaque couleur
Aujourd’hui, qui ne connait pas la Air Force 1 ? En 30 ans, elle est devenue un véritable symbole de la street culture. Pourtant lorsqu’il la découvre, Thibaut de Longeville n’est pas séduit par le modèle, trop massif. Puis c’est un de ses potes sneaker addict qui lui offre sa première paire. Ce ne sera pas la dernière. Mais ce qui intéresse le plus le réalisateur, c’est son histoire, la manière dont cette sneaker a été détournée et réapropriée grâce à des phénomènes de rue pour atteindre une notoriété. Une notoriété telle que le créateur du modèle, Bruce Kilgore, ne l’avait même jamais envisagé lorsque la Air Force 1 est sortie en 1982. Pensée pour jouer au basketball, c’est la première chaussure qui intègre la technologie Nike Air. Et c’est à Harlem que le phénomène Air Force 1 se déclare. Aux pieds des meilleurs joueurs de New-York qui se retrouvent tous les étés au terrain de basket Rucker Park. Puis ce sont les « pharmaciens de rue », autrement dit les dealers de crack, qui écument le bitume de New-York en exhibant leurs Air Force 1 brand new. La culture hip-hop suit la même mode et ni une, ni deux, tout le monde les veut. Pourtant, Nike déjà est passée à autre chose et ne prévoit pas une nouvelle production. Mais c’est sans compter sur « los tres amigos », trois magasins situés uptown, qui ne souhaitent pas laisser passer cette opportunité. Ils demandent à Nike de rééditer la sneaker qui se vend comme des petits pains. Inédit pour Nike, mais ils imposent une condition : commander 1200 paires pour chaque couleur. Deal. A partir de ce moment là, tous les sneakers addict de New-York vont acheter leurs Air Force 1 à Harlem ou dans le Bronx. Elles ont trouvé leur surnom : les Uptowns.
Sneakerhead
C’est viral. La Air Force 1 se répand à une vitesse grand V, sans même le besoin de pub de la part de Nike. Depuis les années 70, la customisation des sneakers est devenue commune. Chacun donne une seconde vie à sa chaussure en y apposant sa signature, en arborant fièrement le symbole de sa culture, sa communauté. Nike comprend rapidement le mouvement, et commence à faire de même. Lancement d’une première édition limitée : à chaque ville sa chaussure pour New-York, Philadelphie et Chicago. La marque à la virgule ne s’arrête plus. D’édition limitée en édition limitée, il existe aujourd’hui plus de 1700 déclinaisons de la première basket à coussin d’air. Collaborations avec des artistes de tous milieux, chaque modèle se fait rare et se revend jusqu’à des milliers de dollars. Les dealers ont descendu les Air Force 1 dans toutes les rues de New-York. Jusqu’à ce qu’elles deviennent littéralement une drogue pour certains. Dans le documentaire, un témoignage prend de la place. Tout autant que ses nombreuses boîtes de chaussures. Véritable sneakerhead, DJ Clark Kent est le plus grand collectionneur de Air Force 1. Dans son film, Thibaut de Longeville en fait même un mini dessin animé DJ Clark Kent Air Force 1’s stories où il met en scène le célèbre DJ hip-hop et les 6000 paires qu’il a possédées. Pour vous faire une idée, 6000 paires de Air Force 1 ça équivaut à ½ million de dollar. Aujourd’hui il ne garde « plus que » 1500 paires dans sa garde-robe. Juste de quoi tenir 4 ans sans mettre deux fois la même paire. Parce que DJ Clark Kent ne porte pas deux fois la même paire. Des Air Force 1 ne se portent que brand new pour les amoureux des sneakers. Surtout quand tu veux porter des « white on white ». Grand Master Caz, un des pionners du hip-hop en est fan : « quand tu ouvres la boîte, si tu écoutes bien, tu entends les anges du paradis chanter ».
Bérénice Kesteloot
Crédit photos :
Bannière : Air Force 1 par m-s-y sur Flickr. CC.
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