
FOCUS
A l’heure des grands projets urbains, quelles perspectives d’emploi dans les quartiers nantais ?
«  Clause d’insertion RU  », un nom barbare qui cache un dispositif ambitieux pour favoriser l’emploi dans les quartiers dits «  sensibles  » (les «  ZUS  »), au service du Renouvellement Urbain.
Le principe ? Acheter des prestations de travaux ou de services auprès d’entreprises privées qui, en échange de capitaux, ont l’obligation juridique d’embaucher des personnes en difficultés résidant en ZUS [1].
A travers des missions principalement dans les secteurs des travaux publics ou du bâtiment (terrassement, menuiserie), l’objectif est de favoriser l’accès à l’emploi des plus vulnérables : il s’agit ainsi d’une véritable chance pour les jeunes sans qualifications, les chômeurs longue durée ou encore les personnes handicapées de s’insérer ou se réinsérer sur le marché du travail. Parfois, la clause d’insertion RU [2] motive les personnes qu’elle mobilise à commencer ou reprendre une formation, favorisant leur accès à la professionnalisation sur le long terme. En 2011, on estime ainsi cet objectif d’accès à l’emploi et à la professionnalisation atteint à 49% pour la ville de Nantes : un bilan jugé satisfaisant.
Focus sur le quartier Dervallières-Zola
Parmi les bénéficiaires, on retrouve 48% de jeunes de moins de 26 ans, une majorité de personnes peu qualifiées... mais aussi 84% d'hommes
Objet d’un grand projet de Renouvellement Urbain, il convient de s’intéresser de plus près au bilan du quartier Dervallières-Zola. Depuis 2005, la ZUS a connu la mise en place de 15 opérations via cette clause d’insertion RU, financés principalement par les collectivités territoriales et les bailleurs sociaux (Nantes Métropole, Habitat 44, etc). Ainsi, 147 personnes ont réalisé un total de 38 000 heures de travail dans le cadre de contrats rémunérés, pour un accès à l’emploi estimé à 43%. Un bilan plutôt bon d’autant plus que, parmi les personnes qui ont bénéficié d’un emploi dans le cadre de la clause d’insertion RU, on retrouve 48% de jeunes de moins de 26 ans, une majorité de personnes peu qualifiées... mais aussi 84% d’hommes, métiers traditionnellement « masculin » des travaux publics et du bâtiment obligent !
Un frein à la mobilité sur le marché du travail ?
Le prochain projet de renouvellement urbain prévu aux Dervallières consistera en la construction de l’Immeuble Insertion Emploi Dervallières (financé par Nantes Métropole Aménagement), dont les 1600 heures d’insertion prévues débuteront dès septembre 2012.
L’occasion de se pencher sur un des grands enjeux soulevés par le dispositif de la clause d’insertion, à savoir la problématique liée à la mobilité sur le marché du travail, encouragée et nécessaire, mais peut-être freinée par ce mode d’emploi créé pour les habitants des ZUS et réalisé dans les ZUS elles-mêmes. Si, par sa dimension locale, la clause d’insertion RU permet de redonner une certaine visibilité aux personnes les plus éloignées du marché du travail en leur offrant une nouvelle expérience professionnelle dans un secteur où elles ne sont pas qualifiées (c’est l’entreprise qui doit faire passer des savoirs-faire), il est possible qu’elle freine également l’accès à l’emploi en enracinant les résidents dans leur quartier. En effet, les heures d’insertion répondent à un besoin temporaire ; le risque est que leurs bénéficiaires ne sachent quitter leur quartier pour un pôle d’emploi plus dynamique. A l’échelle individuelle, travailler dans son quartier de résidence peut également s’avérer délicat, notamment dans le cas d’opérations de réhabilitation dans lesquelles les travailleurs sont amenés à intervenir littéralement « chez leurs voisins », pouvant engendrer des tensions.
Les heures d'insertion répondent à un besoin temporaire ; le risque est que leurs bénéficiaires ne sachent quitter leur quartier pour un pôle d'emploi plus dynamique
Cependant, les opérations qui se sont menées aux Dervallières depuis 2005 n’ont mobilisé « que » 46% de travailleurs issus de la même ZUS. Ce qui signifie que 54% des autres travailleurs sont issus d’autres ZUS, ce qui est sans doute favorable car preuve d’une certaine mobilité. Cette mobilité est d’autant plus souhaitable qu’elle est rendue aisée par le type de contrat de travail proposé par la clause d’insertion RU : jamais d’horaires atypiques, ce qui permet une circulation facilitée par les transports en commun.
Sophia Galière
Crédits photos
Photo colonne 1 : Quartier HLM du Valy-Hir par adeupa de Brest.
Photo colonne 2 : Maquette du projet Equipement Insertion Emploi par © Serero Architecte.
[1] Zone Urbaine Sensible
[2] Renouvellement Urbain
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