
CARNET DE FESTIVAL
La Fabrique en phase avec l’électro berlinoise
Surprenante, curieuse et intelligente
Du 28 au 31 mars se déroulait à Nantes, le festival Berlin:go... jeu de mots ?! Ok pourquoi pas... Enfin pour autant, quatre jours où se sont rencontré arts numériques et visuels, workshop, conférence, projection et évidemment du bon son. L’équipe de Fragil a tout de suite répondu présent à cette invitation culturo-festive.
Depuis les débuts de la musique électronique, Berlin a toujours été une référence. En 60 ans, le nombre de labels et d’artistes berlinois reconnus à l’échelle internationale, témoignent de leurs influences dans les nouvelles tendances musicales. Cette musique est nourrie de colère, de mélancolie et d’une délicieuse folie bipolaire. Un festival unique. Alors plongeons-nous dans le Berlin qui danse jusqu’au petit matin, en prenant le soin d’essayer de ne rien manquer.
Une ouverture à base d’échange et de projection
Le bal s’est ouvert sur un workshop, dirigé par Mathias Delplanque. Atelier réservé aux musiciens pratiquant la musique assistée par ordinateur (MAO). Séance basée sur des exercices d’improvisation collective, qui s’est concrétisée le lendemain par un petit live. Mathias Delplanque est un artiste français ayant travaillé dans de nombreux projets à l’étranger. La presse française le cite comme « l’un des acteurs les plus intéressant de la scène dub française ». Adepte des installations sonores ou hybrides interactives, il expose ces œuvres en galeries ou festivals de culture numérique.
Minimal movie
La caméra nous plonge parfaitement bien dans l’esprit du clubbing berlinois : une vision excitante, dure et réaliste face à une société souffrante qui vit dans l’espoir de croire en ces rêves de jours meilleurs
En début de soirée, commence la projection de Berlin Calling, un film allemand racontant l’histoire de la vie d’Ickarus DJ compositeur de talent, mixant dans tous les clubs de la planète. Les excès en tout genre le conduiront tout droit à l’hôpital psychiatrique. Tiraillé par ces addictions et sa passion pour la musique, Ickarus devra faire face à ces démons pour boucler son dernier album et convaincre de nouveau sa maison disque de le suivre dans une nouvelle aventure. Même si le chemin des paradis artificiels reste parsemé d’embûches, sa créativité dépassera toutes ces addictions. La caméra nous plonge parfaitement bien dans l’esprit du clubbing berlinois. Une vision excitante, dure et réaliste face à une société souffrante qui vit dans l’espoir de croire en ces rêves de jours meilleurs. Paul Kalkbrenner joue le rôle de ce DJ compositeur, personnage tragicomique. Un film, qui reste ouvert à tout public avec une bande son de Paul K. de pure qualité.
Une approche intéressante
Vient l’instant de se poser dans le bunker du Trempolino, afin d’assister à la conférence de Théo Lessour, auteur du livre Berlin Sampler. Ce livre retrace l’évolution de la musique berlinoise au 20e siècle. L’analyse de Théo nous fait voyager du début du siècle dernier à travers des lectures ainsi que de nombreux extraits musicaux pour clôturer sur les années 90, en bouclant la soirée avec l’artiste et productrice Ellen ALLIEN.
Un style qui a de l’histoire
Les premiers extraits de la soirée nous permettent grâce aux lumières de Théo Lessour, de découvrir des compositions musicales révélant une simplicité engagée. Un style volontairement amateur nourri d’un vrai travail de fond qui s’est affirmée à travers le temps. On peut noter, coté musique contemporaine, cette volonté de tester différentes formes d’expressions sonores, avec des résultats parfois des plus troublants. Leurs créations instrumentales et conceptuelles représentent la matrice de cette tendance musicale.
Politique vs Musique
Réunissant dans un studio les meilleurs musiciens jazz, rock, contemporains de Berlin, pour une bonne séance de prise de L.S.D suivie d’enregistrement live complètement psyché. Ce joli monde a très certainement construit ce qui allait devenir la base de l’électro
La génération d’après-guerre marquée par le poids de son histoire sera nourrie d’un fort esprit de contestation. Cette force transpirera dans la musique, portée par un mouvement très engagé politiquement. D’ailleurs quelques unes de ces chansons deviendront les hymnes d’une révolte générationnelle. Les Rolling Stones ou Hendrix soutiendront particulièrement certains de ces groupes hippies squatteurs. Des artistes passeront dans la politique et inversement. En parallèle, des labels sortent de nombreux sides project et expérimentent encore une fois, de nouvelles approches musicales. Réunissant dans un studio les meilleurs musiciens jazz, rock, contemporains de Berlin, pour une bonne séance de prise de L.S.D suivie d’enregistrement live complètement psyché. Ce joli monde a très certainement construit ce qui allait devenir la base de l’électro. Le groupe Harmonia représente bien ce délire créatif. David Bowie avait vu juste car en 1977, il sort l’album Blow, cette pépite mélange à la perfection la créativité berlinoise et la pop anglaise.
L’électro à la Berlinoise
Le style Do It Yourself garde une place prépondérante dans l’évolution créative des années 70, en passant entre autre par le Punk, rejoignant cette idée d’engagement culturel et artistique sur l’approche de l’amateurisme
Le style Do It Yourself garde une place prépondérante dans l’évolution créative des années 70, en passant entre autre par le Punk, rejoignant cette idée d’engagement culturel et artistique sur l’approche de l’amateurisme. La musique électronique berlinoise a su se nourrir de son histoire et de sa culture engagée. Un style unique en son genre comme Kraftwerk, insufflant au monde entier une électro expérimentale très novatrice. En sortant en 1974, l’album Autobahn, ils influenceront de nombreuses générations d’artistes. L’arrivée des années 80 représente la naissance du Clubbing, car malgré les dettes Berlin à toujours su faire la fête et sans aucune contrainte. « Nous sommes certes pauvres, mais néanmoins sexy. » C’est ce que déclarait, en 2003 , Klaus Wowereit, maire-gouverneur (SPD) de Berlin. La techno envahit peu à peu les plus grands clubs de la ville, les transformants en des temples mythiques dédiés à cette musique. L’UFO club de Berlin-Ouest est le plus célèbre d’entre eux. En découle la relève des années 90 assurée par une explosion d’artistes et de labels aussi talentueux que créatifs. Ellen ALLIEN Fondatrice du label BPITCH CONTROL en 1999 en est l’une des meilleurs vitrine de la scène électro berlinoise, avec des artistes comme Paul Kalkbrenner ou Sascha Funke à l’affiche du festival.
Deux jours pour profiter de tout ce savoir faire
Deux soirées riches en découvertes. Les têtes d’affiche Emika et Sascha Funke, ont su briller et ravir nos petites oreilles.
Emika pianiste accomplie d’origine tchèque, élevée à la musique classique a fait ces premières armes en Angleterre pour immigrer par la suite vers Berlin. Après quelques maxi, elle sort en 2011 son première album chez Ninja Tune. Une performance hypnotique, sombre et sexy, son style rejoint celui de l’artiste française Chloé. Derrière son pupitre de claviers et de machines, Emika nous confirme que cet album est taillé pour la scène. Un dubstep lancinant où l’on retrouve la mélancolie de Beth GIBBONS de Portishead. Une sensibilité féminine forte et une représentation poétique de la souffrance. Une électronica portée par de puissantes basses et des ambiances de films d’épouvantes.
Sascha Funke nous a offert un set endiablé dans la pure tradition du clubbing berlinois. Un live des plus apprécié du public, motivé pour entendre de la pure minimale, au détriment peut-être de l’éclectisme de la programmation. Même si d’autres comme Robert LIPPOK musicien, artiste en arts visuels et scénographe, nous a lui aussi, offert un set scotchant. On retiendra de ce festival, une domination féminine dans l’ensemble des performances scénique. Jahcoozi groupe au son électro Ragga tribal, pour faire court, dont la MC chanteuse sri-lankaise, Sasha Perera est une vrai show girl. L’album Barbed Wire est sorti chez Citizen Records. On peut également les retrouver sur des compiles Ninja Tune, du bon, rien que du bon. Passons à Notic Nastic... comment dire... on croirait voir la fille d’Iggy Pop c’est la plus grosse performance scénique du samedi soir. C’est vrai que l’on est un peu paumé car le son, comme sa présence sont plutôt troublants, mais on aime ça.
Le mixage de vidéos en temps réel (Vjing) était parfait, mais on regrette l’absence d’une déco Clubbing à la berlinoise et une programmation plus festive pour la soirée du samedi. Cependant cette première édition peut se féliciter de l’engouement du public ; un beau voyage à travers Berlin.
ElectrikmOOn
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