FOCUS
East One, l’Est unique
East One retrace l’évolution de l’est londonien. Quartier d’abord populaire et pauvre, terre d’accueil des tisserands irlandais, des juifs ashkénazes puis des immigrants Bengalais au XXe siècle, il devient le refuge d’artistes aimantés par des loyers attractifs. Atypique et hétérogène, l’East end voyage sur différents supports et se raconte à travers différents témoignages.
Filmées en noir et blanc, en plan-séquence, les premières images nous présentent un vieil homme lisant un poème de manière habitée. Il s’agit d’un emprunt nostalgique aux archives de Bernard Kops, dramaturge, poète et écrivain né dans les quartiers Est de Londres en 1926, véritable figure locale considérée comme proche de la nouvelle vague anglaise des années cinquante.
- Bernard Kops
Tout du long le documentaire choisit de mélanger les genres : l’individuel et le collectif, le poétique et le trivial, l’immobilité et le mouvement, afin de raconter l’évolution, les changements fondamentaux de ce quartier bien spécifique de Londres.
Ainsi les Eastenders de très longue date font fusionner leur histoire et l’Histoire
Ainsi les Eastenders de très longue date font fusionner leur histoire et l’Histoire, exposent l’expérience d’une vie dans cette partie de leur capitale qu’ils ont vu changer progressivement sous leurs yeux.
Une tenancière de pub devenue mythique de par sa durabilité partage quarante ans d’activités, les changements de mentalité, les commerces voisins qui mettent un à un la clé sous la porte, l’invasion des franchises et la fin d’une convivialité. Une Indienne raconte l’histoire de sa famille, l’installation des immigrés Bengalais dans ce qui sera nommé Banglatown autour des zones portuaires, l’adaptation difficile à un monde étranger et souvent hostile. Un homme raconte encore les halles de Spitafileld, leur évolution commerciale qui a vu les boutiques remplacer les étales des primeurs. Un autre évoque l’univers du tissu, le savoir-faire miraculeux des petits tailleurs juifs, leurs échoppes exiguës et leurs tarifs défiant toute concurrence.
Véritables ponctuations, des photos illustrent les propos, issues à la fois des albums de famille des Eastenders et du travail professionnel de Phil Maxwell, passionné par l’East End et qui s’est constitué au fil des années de substantielles archives.
L’East end se révèle dans le micro et le macro. La promenade s’avère à la fois historique, artistique, humaine et poétique
Créant ainsi des ruptures de rythme bienvenues, le documentaire alterne les styles, imbrique intelligemment des bribes d’interviews à ces images toujours en noir et blanc. Prises de vues architecturales ou portraits intimistes, en longues séries accompagnées musicalement par Satie, Bach ou Moussorgski. Ces pauses contemplatives créent un état d’apaisement, affinent la disponibilité et intensifient la portée des témoignages. Les interventions ponctuelles du duo de guides Alan Gilbey et Steve Wells, véritables trublions à l’humour so british sont jubilatoires (à lire le livre East End Backpassages) et apportent une étincelle de gaîté roborative qui illumine l’ensemble.
L’East end se révèle dans le micro et le macro. La promenade s’avère à la fois historique, artistique, humaine et poétique. Une fructueuse association donc entre le réalisateur Hazuan Hashim et le photographe Phil Maxwell, une trêve nourrie loin de la frénésie trépidante. A respirer.
Agnes Foissac
Pour aller plus loin : http://fr.wikipedia.org/wiki/East_End
Crédits photos : Phil Maxwell
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