Le contre-exemple… Il y a quelques mois, la rédaction de Fragil se penchait sur la scène hip-hop à Nantes et ses difficultés à se structurer. Manque de moyens, de réseaux, de motivation, mauvaise image, rêve de spotline avant d’avoir posé un pied sur scène, frontière ténue entre social et culturel… Comme partout ailleurs la force du hip-hop nantais apparait aussi comme sa faiblesse : ça vient de la rue, comme le chanterait IAM. 

Zoxea au Ferrailleur de Nantes : une opération Sound action

Quelques semaines après notre article, nous recevions dans notre boite mail une invitation pour un concert au Ferrailleur organisé par Sound action. Et pas n’importe quel concert, les amateurs de Hip-hop jugeront : Zoxea, Busta Flex, et les Sages poètes de la rue. Le mail comportait cette annotation, l’air de rien : « dans votre article, il était écrit qu’il n’y a rien à Nantes hors Hip OPsession. Et bien voici un événement ! … et une structure activiste depuis 2004… ». Dont acte : il n’en fallait pas plus pour aiguiser notre curiosité. Sound action : kezako ?

Groove control

Jean-Baptiste Oyer, directeur de production àSound action.

L’équipe herblinoise commence à faire ses armes en 2004 au festival Art Hip-hop à la Trocardière. 120 artistes, des battles, des concerts, des rencontres… « Cette première édition était beaucoup trop ambitieuse, juge aujourd’hui Jean-Baptiste Oyer, directeur de production. Mais on débutait, on avait trop de gnak. » C’est en 2006 que la vingtaine d’activistes qui composent Sound action se structurent réellement. Ils optent alors pour le format associatif. Le cœur d’activité : le tour-management. Mais Sound action œuvre aussi dans la production de spectacles et évènements culturels : soirées DJ, concerts, organisation d’after durant le festival Hip-OPsession, etc.

O’Slim [1], Simba, Doc Brrown, DJ Freshhhh, Skara’B, Chambo, Iron Mike, Lindux, sont quelques-uns des artistes de l’escarcelle de Sound action. Ils proviennent de Nantes, Rennes, Angers, Morlaix, et sont beatboxers, MC, DJ, danseurs... Parce que le hip-hop est interdisciplinaire. Cette notion, d’ailleurs, Sound action l’a bien intégrée en faisant tourner le collectif Groove control [2] de Laval à Trappes, en passant par Rouen ou Ivry-sur-Seine. Un collectif de huit artistes pour un spectacle complet mêlant danse, chant, et musique.

Culture de la scène indé

Et bien voici un événement ! … et une structure activiste depuis 2004…

Alors le hip-hop : vilain petit canard de l’ébullition culturelle nantaise ? Pour Jean-Baptiste Oyer, la cité ligérienne n’est pas à blâmer : « ce n’est pas plus difficile à Nantes qu’ailleurs. Au contraire même, il y a ici une richesse culturelle énorme qui devrait permettre aux artistes hip-hop du coin de décoller. Mais il y a un problème de structuration dans le réseau hip-hop. C’est très long de mettre des choses en place, d’avoir les bonnes infos… Il y a peut-être aussi un manque de structures d’accompagnement en matière de la production et de tour-management. Nous, on s’est forgé tout seul. » Les guerres intestines dans le hip-hop nantais ? « Il y en a… Moi, je m’en fous. » Clair, précis.

Sound action entend se rapprocher de scène indé nantaise comme pour la venue des Sages Po’ au Ferrailleur.

Petit à petit, concert après concert, Sound action production tisse sa toile. Présente sur les évènements clés de Nantes (Hip-Opsession, Tissé métissé), l’association herblinoise entend pénétrer le milieu hip-hop nantais avec des valeurs bien marquées. « On veut laisser les artistes qui travaillent avec nous libres dans leurs projets, c’est important. On cherche aussi à se rapprocher de lieux qui défendent la culture indé, qu’elle soit hip-hop, rock ou autre, comme le Ferrailleur à Nantes ou la BaraKason à Rezé. On est très attaché à la scène, ce qui n’est pas forcément toujours le cas dans le hip-hop où beaucoup d’artistes attendent qu’on vienne les chercher. Nous, on dit à nos artistes que c’est sur scène qu’ils vont trouver leur public, roder leur discours et se perfectionner. C’est le cas avec O’Slim. »

Prônant le « croisement artistique » dans une culture pas toujours ouverte sur l’extérieur, Sound action a plus d’un décibel dans sa MPC. Le bruit court que Zoxea et sa clique se rapprocheraient davantage de l’association. A suivre. Sound action a aussi pour projet de créer un nouvel évènement hip-hop en région nantaise. Un nouveau festival ? Chut… on ne vous a rien dit.

Texte : Pierre-Adrien Roux

Photos : Misteur Mad

[1] O’Slim, vice-champion du Da mouth fight 2008 beatbox, lance cette année son spectacle solo « Simple et efficace » mélangeant beat-box, rap et humour… Il sera au festival Tissé Métisse, le 8 décembre à Nantes.

[2] Le projet Groove control a été créé à l’occasion des Transmusicales de Rennes en 2009. Il a été la « Sélection Bretagne » du Printemps de Bourges. Un maxi sortira d’ici la fin d’année.