
Débat Culture
Le Blockhaus DY10 : un lieu alternatif de création culturelle
Reportage
Depuis 1993, le Blockhaus DY10 s’affiche comme un lieu alternatif de création culturelle. Derrière ses murs de deux mètres de béton armé se trouve un espace de travail atypique où se retrouvent quotidiennement plus de 30 artistes.
A quelques mètres de l’Eléphant se trouve un autre emblème de l’Ile de Nantes : le Blockhaus DY10.
Vestige de la seconde guerre mondiale, il a connu le temps où le quartier n’était qu’une suite de friches, avant de se retrouver presque comme un étranger, un extraterrestre de béton, au milieu de projets architecturaux modernes et ambitieux. L’endroit ne laisse pas indifférent. Il intrigue, il semble vivant comme le montrent ces affiches sur les portes, interdisant d’uriner sur le bâtiment, ou le fameux détournement de la publicité de Gitanes, installée sur les murs extérieurs depuis des années. On se demande ce qui se passe à l’intérieur. Est-ce un squat ? Un lieu destroy ? Abandonné ? Une salle de concert ? L’absence de site web concernant le lieu ajoute une part de mystère. Alors pour répondre à ces questions que nous sommes nombreux à nous poser, je suis allé rencontrer Yann Jaffiol. Ingénieur du son, musicien et membre de l’association Blockhaus DY10, il travaille essentiellement ici. Il m’a raconté l’histoire récente du lieu et fait faire un tour du propriétaire. Plongée au cœur d’un monument nantais.
Il s'agit d'accueillir des gens qui se lancent dans des trucs atypiques
Deux mètres de béton armé façonnent l’armature du Blockhaus. On n’y capte pas le téléphone, les basses résonnent à fond lors des concerts et il n’y a pas de lumière naturelle. Pour passer du rez-de-chaussée au premier étage, on monte par une petite échelle métallique. On a par moment, l’impression de se trouver dans un sous-marin, dans un espace à part, fermé et décalé. Le Blockhaus n’est ni squat, ni un lieu anarchique, mais un bâtiment où travaillent plus de 30 personnes : des architectes, des graphistes, des illustrateurs de BD, des musiciens et d’autres artistes. Leur point commun ? Outre le fait de partager un espace de travail insolite et attractif, les membres souhaitent permettre à des personnes défendant une vision originale de leur art de bénéficier d’un espace de travail bon marché et créatif. Comme le dit Yann Jaffiol, il s’agit "d’accueillir des gens qui se lancent dans des trucs atypiques". Petit name dropping d’anciens ou d’actuels membres de l’association : iCare, Metalobil, Géraldine Luttenbacher [1], A Brûle Pour point, My Studio, ROBONOM, Compagnie 29x27, (troupe de théâtre) ou Hervé Tanquerelle [2], entre autres. Toutes les places sont occupées et le lieu est partagé en deux espaces bien distincts : en bas, la musique, les studios d’enregistrement, les concerts et les évènements expos ; en haut, les bureaux. Quand le premier étage vit plutôt le jour, le rez-de-chaussée s’anime principalement la nuit.
Le Blockhaus DY10 organise fréquemment des évènements. En décembre, la créatrice de bijoux Géraldine Luttenbacher et le créateur de luminaires François Lebot ont exposés là-bas. Le lieu propose également des concerts, mais ne s’occupe pas de leur communication, qu’elle laisse aux organisateurs. En demandant les meilleurs souvenirs de soirées au Blockhaus à Yann Jaffiol, il nous raconte les Nasty Parties, au début des années 2000, qui réunissaient parfois jusqu’à 300 personnes. Aujourd’hui les soirées Back to Garage ont repris le flambeau des Nasty Parties, mais ailleurs. Les meilleures soirées semblent derrière. Les membres de l’association ont évolué, un peu moins tournés vers la fête qu’il y a quelques années et le lieu a également changé. L’espace accordé aux évènements a notamment été réduit pour permettre d’accueillir de nouveaux membres. Le Blockhaus est-il alors un lieu underground ? Pour Yann Jaffiol, non ; le musicien préfère employer le terme d’« alternatif ».
Si personne ne semble s’accorder sur ce mot, une chose est certaine cependant c’est que les lieux underground sont toujours sur le qui-vive, ce qui les amène soit à s’organiser davantage pour perdurer, au risque de perdre leur "undergroundéité" ou à continuer à évoluer de manière précaire. L’avenir de Bitche dépend des décisions de la mairie, le Fouloir a fermé, le Blockhaus existe toujours, mais a évolué pour pérenniser cet espace comme un lieu de travail permanent pour les artistes de l’association. On peut alors se demander si un endroit peut être underground dans la durée ?
Texte et photos : Olivier Decré
[1] joallière-orfèvre d’art
[2] dessinateur de B.D. nantais connu notamment pour sa création du personnage de Tête Noire, petit catcheur mexicain qui se bat contre des monstres idiots.
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