Festival des 3 Continents 2008 - Nantes
Portrait d’une famille contemporaine
A propos de Still walking, de Hirokazu Kore-Eda
Parmi les films inédits présentés en compétition officielle par le Festival des Trois Continents cette année, Still walking de Hirokazu Kore-Eda a retenu l’attention du public et du jury du Festival. A travers la chronique d’une famille japonaise réunie le temps d’une journée pour commémorer la disparition du fils aîné, le réalisateur japonais nous peint le portait d’une famille contemporaine ordinaire, mêlant humour, tristesse et mélancolie, sur fond de poésie.
Une nouvelle fois, le thème du lien entre la vie et la mort et le thème du poids causé par l’absence, constituent la trame de fond d'un film de Kore-Eda
Une nouvelle fois, le thème du lien entre la vie et la mort, du poids causé par l’absence, constitue la trame de fond du film de Kore-Eda. C’est un sujet récurrent chez le cinéaste japonais qui avait déjà marqué les esprits avec Après la vie, film fantastique qui traitait des souvenirs des défunts et qui avait remporté la montgolfière d’or lors du Festival des 3 Continents en 1998, et avec Nobody knows, présenté en sélection officielle lors du festival de Cannes en 2004, qui racontait l’histoire d’enfants livrés à eux-mêmes après la disparition de leur mère.
Scènes familières
Cette fois-ci, c’est dans un cadre familial classique qu’il met en scène son sujet de prédilection. Un frère et une sœur, accompagnés de leurs enfants, viennent rendre visite à leurs vieux parents. Le pas de la porte franchi, on assiste aux embrassades enjouées des retrouvailles, aux questions sur ce que deviennent les différents membres de la famille, aux conversations banales du repas, avec les anecdotes et les histoires qui font sourire : situations anodines et tellement familières qui nous rappellent nos propres expériences.
Malgré la bonne humeur apparente et l’ambiance conviviale, les personnages semblent cacher une grande tristesse, un sentiment de malaise. Lors des repas, les plans fixes révèlent des regards et des silences qui en disent long. Affectées par le décès du fils aîné, les relations entre les vieux parents et leurs deux enfants semblent avoir pâli avec le temps, tandis que l’aura du fils disparu reste grande aux yeux des parents. Témoins discrets de ce jeu complexe de relations entre deux générations marquées chacune à leur façon par le drame, les petits-enfants n’y comprennent rien.
Prix d’interprétation féminine
Tout au long de cette journée ensoleillée, le spectateur suit ces personnages qui montrent une grande pudeur de sentiments en public mais se dévoilent plus facilement dès lors qu’ils se retrouvent en petit comité. Incarnant le personnage central de la mère de famille, l’actrice japonaise Kirin Kiki a reçu le prix de la meilleure interprétation féminine décerné par le jury du Festival. Son personnage particulièrement complexe mêle chagrin et amertume dissimulés derrière un visage jovial et une politesse exagérée de bonne maîtresse de maison. Cette femme, qui affiche une grande force d’esprit et un franc-parler amusant en public, révèle tout son désespoir lorsqu’elle essaie d’attraper un papillon qu’elle croit être l’âme de son fils perdu. Elle pousse aussi le masochisme jusqu’à inviter régulièrement l’enfant « responsable » de la mort de son fils, décédé en tentant de le sauver de la noyade 15 ans auparavant. Devenu adulte, il offre l’image d’une personne qui a raté sa vie.
Cinéaste attentif aux petites choses du quotidien, Hirokazu nous livre avec Still walking le tableau sensible d’une famille marquée par le deuil, mais pour qui la vie doit continuer, tant bien que mal, avec ses non-dits et ses secrets.
Erwin Eninger
Cet article a été réalisé conjointement par une équipe d’étudiants du Département Infocom de l’Université de Nantes. Equipe : Alexis Annaix, Antoine Bernier, Erwin Eninger, Aurélien Lahuec, Marco Streit. Coordination éditoriale et pédagogique : Renaud Certin et Emilie Le Moal.
Le regard de Fragil sur les 3 Continents 2008.
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