
Le festival 3 continents fête les 100 ans du cinéma IndienÂ
Nantes accueillait pour la trente-cinquième année consécutive le festival des 3 continents. De l’Afrique à l’Amérique en passant par l’Asie, le festival met à l’honneur les films et documentaires des quartes coins du monde. Parmi la centaine de films projetés cette année, douze consacraient le cinéma indien.
À l’occasion du centième anniversaire du cinéma de Bollywood, la cérémonie d’ouverture et de clôture rendaient d’ailleurs hommage aux grands noms du cinéma indien. Aux détours de deux salles obscures, retour sur deux films qui ont marqué les festivités.
Fleurs de papier - Kaagaz ke phool
Mélodrame aux teintes autobiographiques, Fleurs de papier retrace les dernières années de Suresh Sinhan, célèbre cinéaste dans une Inde traditionnelle encore emprise à une morale forte. Rejeté par sa belle-famille à cause de son métier, Suresh trouve du réconfort en la personne de Shanti, une jeune femme qu’il propulse au statut d’actrice célèbre. Oscillant entre l’amour de sa fille Pummy et celle de sa muse Shanti, Suresh sombrera finalement dans une déchéance totale où pas même l’amour du cinéma ne parviendra à le sauver. Une plongée dans la vie d’un homme, de la gloire à la chute, de la reconnaissance à la solitude.
Réalisé en 1959 par Guru Dutt, Fleurs de papier n’a dans un premier temps pas connu le succès escompté. Il aura fallu quelques années et la reconnaissance du cinéma international pour réinscrire Fleurs de papier dans l’héritage filmique indien. Au détour d’une projection, Hariharan Krishnan, célèbre acteur indien et invité d’honneur du festival, confiait au public avoir redécouvert le film de Guru Dutt grâce à la critique française. Mise en abîme du cinéma, l’œuvre de Guru Dutt interroge sur la place du septième art et la renommée éphémère qui en découle. Fleurs de papier nous donne à voir les coulisses de la création, le travail d’écriture, les dictâtes du métier ou encore les caprices des comédiennes. Loin des clichés du film bollywoodien classique, Guru Dutt réinvente un genre, en ajoutant aux dialogues et à la musique une poésie rare. Fleurs de papier touche et émeut autant qu’il fascine.
A Peck on the Cheek - Kannathil Muthamittal
Dans l’Inde contemporaine, Thiruchelvan, écrivain renommé et sa femme Indra vivent avec leurs trois enfants dans une riche propriété. Amudha, l’aînée des enfants, y fait régner la terreur, tantôt démoniaque, tantôt angélique. À son neuvième anniversaire, la petite fille apprend qu’elle a été adoptée et que sa mère biologique vit au Sri Lanka. Commence alors une quête identitaire qui se terminera sur cette Île d’Emeraude, où la guerre éclate. La fillette y rencontrera sa mère biologique, une jeune femme encore tourmentée par l’abandon de son enfant unique. Entre introspection et découverte du monde, Amudha incarne une étape de la vie : celle du passage de l’enfance à la pré-adolescence.
Bollywood est devenu le lieu emblématique d’une adaptation aux évolutions modernes, d'un mariage entre le passé et le présent
Aux antipodes de Fleurs de papier, A Peck on the Cheek semble n’avoir d’indien que le nom et l’origine. Très américanisé, ce film étonne et interroge sur notre rapport au cinéma Bollywoodien. Spectateurs occidentaux encore très marqués par certains clichés véhiculés sur le cinéma indien, A Peck on the Cheek nous surprend en nous présentant une Inde modernisée, dénuée de son aura exotique et merveilleux. Une esthétique du spectaculaire, où chaque scène brise les codes traditionnelles du cinéma indien. A Peck on the Cheek nous montre le renouveau du septième art indien, plus que jamais ancré dans le vraisemblable. Lassé des histoires amoureuses impossibles sur fond de musiques traditionnelles, Mani Ratman, a su s’adapter aux évolutions contemporaines, pour faire de son film un pont entre Hollywood et Bollywood. A Peck on the Cheek plaît et plaira aux cinéphiles avertis pour qui beauté rime avec modernité.
Entre ces deux films, une quarantaine d’années s’est écoulée et autant de changements dans le fond comme dans la forme. Déjà en pleine mutation à la fin des années cinquante, le cinéma indien n’a cessé de se renouveler, pour tracer les contours d’une esthétique nouvelle, plus proche du septième art occidental. Bollywood est devenu le lieu emblématique d’une adaptation aux évolutions modernes, d’un mariage entre le passé et le présent.
Nivine Potros
Crédits photos : Festival des 3 Continents / J.G. Aubert
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