
CONCERT
Nneka : soul combat
Le concert de Nneka le 23 avril à la salle Stéréolux est venu réchauffer l’air de Nantes en apportant une soul ambrée de ragga et de hip hop. L’occasion évidente de présenter cette artiste engagée et talentueuse. Débrief.
Petit bout de bonne femme contre Maxi salle de bonnes âmes. Combat inégal ? Pas tant que ça. Le public a mis du temps à s’enflammer pour elle bravant pourtant ce lundi un vent violent mêlé de pluie soufflant un air automnale.
Pas folle pour autant, la jeune Nigérienne au sang teuton mêlé a compris comment amadouer son public nantais. Lui fredonnant une reprise caramélisée au beurre salé, il ne lui en fallait pas plus pour réveiller ses glandes sudoripares affolées par le refrain entonné d’Eurythmics, « Sweat dreams », pour ne pas le nommer. Public plus que ravi qu’il n’en aurait rêvé s’il avait eu en lieu et place la même reprise que lui aurait infligé Sylvie Vartan en son temps, « Déprime à quoi tu rimes avec ton parfum d’aspirine... ».
Une fois avalée cette vitamine C effervescente, la salle renvoya enfin en écho une part de ferveur que Nneka méritait amplement. Début de déhanchement sur « Soul is heavy » du dernier album éponyme jusqu’à exploser l’applaudimètre à la fin du tubesque « Heartbeat », extrait du premier album « No Longer At Ease » qui imposait du coup un rappel.
La chanteuse à textes mène un noble combat. « Je ne serai plus jamais tranquille parce que je ne veux plus me taire. Je dois parler », déclarait-elle aux Inrocks en 2008 à la sortie de No Longer At Ease. Le dernier album sorti en 2011 s’ouvre quant à lui avec le titre Lucifer qui fait référence aux monnaies d’échange à travers le monde... Un titre qui résonne de façon étourdissante dans le contexte actuel. Nneka chante aussi pour l’Afrique, les femmes, cogne sur la pauvreté, le racisme et le capitalisme, hurle freedom jusqu’à en briser des chaînes, et fait souvent référence à Dieu.
Elle y cite notamment Isaac Boro, un sécessionniste qui s'opposait à l'exploitation pétrolière au Niger
Son dernier opus, Soul is heavy (bien que chanté et instrumentalisé sans conservateurs de samples ajoutés) est aussi jugé plus hip hop que les débuts de l’artiste. Évolution musicale somme toute assez naturelle comme si on l’aurait reproché à Lauryn Hill et aux Fugees. L’album regorge pourtant de nombreuses mélodies parmi lesquelles Restless , Do You Love Me ou Valley.
Sans barrières ni frontières
Ses racines nigériennes constituent aussi l’ADN de l’album. Elle y cite notamment Isaac Boro, un sécessionniste qui s’opposait à l’exploitation pétrolière au Niger par les colonisateurs (Shell et Exxon en tête) et qui fut tué lors de la guerre civile de 1967. Elle rend aussi hommage à Ken Saro Wiwa, écrivain nigérian et militant écolo, exécuté par pendaison pas plus tard qu’en 1995. Et dont la Shell (encore elle) fut accusée de complicité dans cette exécution.
Parce que la musique peut aussi être le strapontin sans barrières ni frontières d’un engagement militant et le combat pour la défense de libertés élémentaires, de dignité et de respect. Le public nantais présent ce soir là s’est fait le réceptacle d’une cause universelle défendue par une artiste à la voix percutante aux rythmes d’un défibrillateur.
« Sweat dreams are made of this » chantait Eurythmics. Quand la musique prend alors tout son sens.
Jérôme Romain
Crédits photos : Romain Huchet
Bloc-Notes
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