Publié le 10 février 2005

Gautier Lamy


Récits émouvants et horrifiants, détails plus ou moins macabres sur l’une des plus grandes tragédies du 20e siècle, la souffrance humaine couvre les murs de l’espace Cosmopolis (jusqu’au 27 février).

Savants de renom (Einstein, Oppenheimer) et même prix Nobel de physique (Niels Bohr, James Chadwick, Enrico Fermi et Isidor Isaac Rabi) ont participé à cette entreprise, destinée à l’origine à contrer l’Allemagne nazie qui s’élança la première dans l’aventure. Le nucléaire, arme salutaire et bienfaitrice de la paix mondiale... l’illusion ne survécut pas à l’année 1945.

Tout l’historique et les détails techniques de cette prouesse de l’histoire de la science, présentés en ouverture de l’exposition, ne servent qu’à mettre en avant le fruit du génie humain et ne rendent ainsi que plus effroyables les images qui succèdent à cet exposé scientifique froid. La galerie photographique (Gonichi Kimura, Toshikichi Kikuchi, Yoshito Matsushige et Hajime Miyatake) se passe de commentaires : récits de rescapés, tragédies familiales, descriptions à la limite du supportable (photos à l’appui) des blessures immédiates et des pathologies post-bombardements.

Hiroshima et Nagasaki, sinistres noms, vagues souvenirs tout droit sortis de l’imaginaire collectif deviennent une cruelle réalité et surgit alors aux yeux du visiteur l’absurdité d’un grand gâchis. Les stigmates encore béants longtemps après la catastrophe sont pris en clichés (réalisés en 1979) signés Hiromi Tsuchida, comme autant de personnages marqués, de vies irrémédiablement redéfinies au moment et en fonction du drame, pulvérisées pour se reconstituer un peu plus loin par la force de la vie qui dû continuer malgré tout.

On ne peut sortir de cette exposition qu’en se demandant, sans trouver de réponse, en quoi cette tragédie a pu servir l’humanité, si ce n’est offrir au monde entier un souvenir impérissable (espérons-le) des folies exterminatrices possibles en ce bas-monde.

Des débats et un cycle de conférences s’organisent en rebond à l’exposition, dévoilant les nouveaux combats, évoqués sur un ton oscillant entre optimisme mesuré et quasi-fatalisme, concernant la prolifération nucléaire clandestine, la frilosité des grandes puissances nucléaires sur les question de désarmement, les effets du nucléaire sur la santé des victimes et des anciens combattants des campagnes d’essais...

L’ère nucléaire est encore bien loin d’être finie, il faut en convenir. Raccourcissons la complainte en disant sans a priori que beaucoup reste à faire pour garantir au monde une paix « non-nucléaire ».

Pour en savoir plus :

Le Site Internet de Nezumi : comporte un certain nombre de photos présentées à l’expo. Un bon aperçu.

Gautier Lamy