Publié le 31 août 2006

Pascal Couffin


Lu dans l’édition du 31 aout de Libé, François Bayrou, chef de l’UDF reproche aux grands groupes industriels qui détiennent des médias de réduire la présidentielle àun duel entre Sarkozy et Ségolène Royal. Dépassant cette récente dérive gauchiste de Bayrou, l’article pointe le mal profond que traverse la presse en France et constate une inquiétude des politiques qui souhaiteraient reprendre la main sur ce terrain.

Ce sujet est redevenu une question politique selon Arnaud Montebourg, député et récent allié de Ségolène Royal, la madone des sondages. Il y a de quoi s’inquiéter en effet de voir l’érosion inéluctable de bon nombre de titres de la presse quotidienne nationale, de constater la pénétration des gratuits à la pauvreté éditoriale flagrante. La presse de qualité comportant des reportages, des analyses et une diversité de points de vue serait entrain de disparaître. A qui la faute : un lectorat moins exigeant, aux gratuits qui ont percé ? Soyons lucide, le mimétisme de la presse à reproduire les mêmes infos et les mêmes analyses a fini par lasser, les connivences avec le pouvoir économique ont fait perdre ses journaux en crédibilité.

Ce constat est inquiétant car une démocratie digne de ce nom se doit de disposer d’outils permettant le débat, d’exposer une pluralité de points de vue. La presse doit jouer ce rôle mais elle le joue de moins en moins. Est-il normal de ne jamais lire dans Ouest France des enquêtes critiques, des sujets de fond ? Non, ce journal pas non plus mauvais par ailleurs, affiche la bonhomie et le consensualisme et refoule la critique dans sa rubrique le courrier des lecteurs avec tous les dérapages que cela comporte.

Journaux en fin de vie

Faire de la presse est désormais très lourd en investissement et très coûteux. Le Monde arrive tant bien que mal à se maintenir, Libération doit entièrement se recapitaliser sans réel espoir d’arriver à devenir rentable. Les modèles économiques arrivent en fin de vie, de nouveaux émergeront dans les années à venir. Pour l’instant on est en phase de mutation et la révolution numérique bouleverse tout sur son passage, sans pitié. C’est à la fois excitant car tout est à réinventer mais inquiétant car nous avons besoin de journaux.

Alors oui, le politique doit se réapproprier cette question, permettre les conditions de développement de nouveaux titres et pas seulement maintenir sous perfusion des journaux détenus par de grands groupes industriels. Au sortir de la seconde guerre mondiale, de nombreuses dispositions avaient été prises pour garantir le pluralisme de la presse. Ces mesures ont été progressivement contournées et la main mise des nouvelles messageries de la presse parisienne (NMPP) ne permet pas l’émergence d’une nouvelle presse. Il est grand temps de débattre sur ce sujet dans les prochains mois avant qu’il ne soit trop tard !

-  Lire l’article de Libération
-  Presse quotidienne nationale, les raisons d’une crise très française. Un article du Monde du vendredi 1er Septembre