Publié le 22 août 2004

Pascal Couffin


Comment conter les mémorables moments passés lors de la 14ème édition de la Route du Rock àSt Malo ? Cette année la programmation dite audacieuse, et donc intéressante àsuivre, n’aura pas déméritée. Coco Rosie, les Kills, Lali Puna, Air, TV on the Radio, Blonde Redhead, Dyonisos et John Spencer Blues Explosion ont réchauffé l’atmosphère d’une route du rock parfois chaotique et pluvieuse.

Qu’on se le dise, à la route du rock, on peut y aller à moto mais s’il est un accessoire indispensable, ce serait la paire de botte. Vous savez les bonnes vieilles bottes portées en région Bretagne par les Loups de Mer. Pour écouter du bon son, nos jeunes petits loups ont du bien ficelé leurs chaussures afin de ne pas les perdre dans la boue après tant de pluie tombée sur le Fort de St Père.

Warm Up L’atmosphère si particulière de la route du rock ne tient pas à ses conditions climatiques aléatoires mais plutôt à l’originalité de la programmation et au caractère si particulier du lieu : un fort vauban. Le premier soir, le Beta Band revêtus de leurs habits de garagistes ont fait un dernier tour d’honneur après l’annonce de leur split prévu à la rentrée. Dans une veine plus rock’n’roll les Kills formés de la fantastique VV et de son compagnon de scène Hotel, ont chauffés de leur riffs primitifs le public. Dans l’univers des groupes à « The », The Kills tirent bien leur épingle du jeu de cette redécouverte de la scène rock qui malheureusement n’est pas enrichie de nouveautés.

S’en suivirent sur scène la nuit tombante, les belges de Deus. Après une absence trop longue, les festivaliers piaffaient d’impatience de réécouter leurs chansons et d’entendre de nouvelles qui annoncent un nouvel album. Quelques titres admirablement interprétés ravirent les foules mais nous sommes ressortis quelques peu déçus de ce concert. Restait au LCD Soundsytem à marteler de leur beat les oreilles des spectateurs avant l’arrivée de RJD2.

Du gros dans les filets Grosse affluence le samedi. Des cohortes de festivaliers sont arrivés sac au dos, duvet sous le bras et pack de bière bien senti à l’autre. Les douves du Fort de St Père Marc en Poulet (et oui ça ne s’invente pas) se couvrirent de tentes. Du gros poisson à l’affiche ce soir : les rescapés de la French Tour et Electro Star avec Air, la dite révélation TV on the Radio et la sulfureuse Peaches. Avant les très attendus Air, Lalipuna, belle signature du label allemand Morr Music a distillé son électronica racée à un public connaisseur quoique un tel lieu soit peut-être trop vaste pour l’écoute d’une telle musique.

Puis virent AIR. Yeap, Yeap. On croyait que le duo snobait l’hexagone préférant les sirènes japonaises ou américaines. Dans la douce tiédeur malouine, AIR égrena de nombreux titres du premier album et de la BO qu’ils réalisèrent pour le film de Sofia Coppola : Virgin Suicide. Dur de résister quand même à « Playground Love » et l’interprétation de « Kelly watch the star ». A se demander si cette route sera vraiment rock’n’roll. Et ce n’est pas la soft pop des versaillais Phoenix qui nous contredira. Phoenix s’est joué des instruments mais aucune originalité et charisme n’arrive à faire décoller ce groupe. Il ferait mieux de suivre l’exemple du Beta Band. Un groupe qui a laissé votre journaliste dubitatif, c’est bien TV on the Radio. Ce curieux mélange de soul et de rock reste une expérience intéressante mais le mélange est surprenant. Ils ont pourtant été encensés par l’ensemble de la presse musicale spécialisée.

Peaches ! La miss pêche qui joue de la provoc à encore frapper. On vous rassure pas les spectateurs. Ca lui arrive parfois quand on est méchant avec elle, quand on l’injurie par exemple. La portée de ces textes Ô combien remarquable : « suck my dick » et autres joyeusetés du même acabit n’ont pas résonnées dans les oreilles du festivalier. C’est plutôt son show provocant bien que linéaire qui a marqué. Enfin une vrai performance rock’n’roll. Côté musicale, il faut l’avouer, c’est oubliable. On s’est quand même bien marré.

Apocalypse road Dimache. La fatigue. La pluie qui vint gâcher la fête. Blonde Redhead tant attendu par un public averti a essuyé un concert dantesque : leur admirable prestation fut écourtée par l’orage grondant. Les jumeaux et Kazu sur son piano ramassèrent des sacrés coups de tabac que seuls de solides marins auraient pu supporter. Une heure de pause, le temps que tout ce petit monde patauge gentiment en sirotant quelques bières bien fraiches et Dyonisos pour leur dernier concert, ont comme à leur habitude tout donné. Ils mériterons leur pause artistique au Maroc où ils sont en résidence pour quelques semaines. Et c’est le John Spencer Blues Explosion qui clôturera réellement les hostilités climatiques avec son blues noir, ces riffs rageurs. Ca a joué fort peut être un peu trop.

Cette 14ème édition fut un succès. On attend avec impatience l’année prochaine. La réussite de cette édition augure sans nul doute de nouveaux paris artistiques.