Il y a 150 ans naissait Puccini
L’année de toutes les Tosca
A Nice, Toulon...avant Nantes
L’année 2008 célèbre le cent cinquantième anniversaire de la naissance de Giacomo Puccini. Parmi ses oeuvres les plus fortes, "Tosca" est l’opéra de tous les excès et de toutes les confusions, un huis clos étouffant où le sentiment amoureux se mêle à la religion, la politique et l’art.
La Tosca de Puccini (1858, 1924)a été représentée en janvier dernier à Nice, dans une mise en scène de Paul Emile Fourny et en avril à Toulon, dans une vision de Sylvie Auget en co-production avec les opéras de Montpellier et de Saint Étienne. C’est un spectacle qu’il faudra voir lors de la reprise d’Angers Nantes Opéra, à la rentrée prochaine : la mise en scène en sera confiée à Patrice Caurier et Moshe Leiser.
L’opéra de la confusion des sentiments
Tosca se déroule à Rome en moins de vingt quatre heures. Les trois protagonistes meurent dans ce temps restreint au terme de trajectoires personnelles qui les ont placés au coeur d’effroyables dilemmes qui prennent vie sous les plumes des auteurs du texte : Luigi Illica et Giuseppe Giacosa. Trois personnages principaux se partagent le devant de la scène. Mario Cavaradossi évolue entre son engagement politique et sa relation amoureuse avec la cantatrice Floria Tosca. Celle-ci avance aveuglée, dans un monde qu’elle croit fait d’art et d’amour. Le tyran Scarpia, enfin, se livre à un credo sacrilège, en plein Te Deum à l’église, où il expose son désir de posséder la diva.
Dans le spectacle proposé à Nice et qui sera repris dans trois villes italiennes (Modena, Ferrara et Piacenza), Paul Emile Fourny a opté pour une vision fantastique de l’ouvrage. Des anges du bien ou du mal tournent autour des personnages centraux, en référence au film La Cité des Anges de John Cage. Cette solution permet une fin spectaculaire où le machiavélique Scarpia, même mort, a le dernier mot. Le spectacle niçois réunissait le ténor Brandon Jovanovich, fervent Mario et mémorable Steva dans Jenufa à Nantes l’an passé, l’intense baryton Franck Ferrari, terrifiant Scarpia, et Nicola Beller-Carbone, Tosca à la présence miraculeuse, qui ose des demi teintes d’une rare beauté. Elle a quelque-chose de Maria Callas. Les spectateurs d’Angers Nantes Opéra découvriront cette artiste émouvante en septembre.
Il y a une vie débordante sur le plateau, due à l'urgence de ces dernières heures de vie pour trois êtres écorchés, liés entre eux par des sentiments troubles.
L’opéra de tous les excès
La mise en scène de Sylvie Auget, présentée à Toulon, permet à tous les protagonistes d’aller au bout de leurs débordements. L’équipe réunie a un vrai bonheur de jouer et Sylvie Auget a su créer un esprit de troupe, ce qui est réjouissant au théâtre comme à l’opéra. Il y a une vie débordante sur le plateau, due à l’urgence, aussi, de ces dernières heures de vie pour trois êtres écorchés, liés entre eux par des sentiments troubles.
Le second acte est un sommet : Scarpia a fait arrêter Mario et contraint sa maîtresse à le voir torturé, pour obtenir un secret politique, mais aussi, dans un jeu sadique et pervers, pour jouir de la douleur de celle qu’il aime. La scène finale est aussi très intense. Sur le toit du château Saint Ange, l’aube se lève et Mario attend son exécution. Persuadée par une fausse promesse que ce sera un simulacre, Tosca, tel un metteur en scène, explique à son amant les bons gestes pour mourir. Il s’écroule. Dans un ouragan de lyrisme et d’aveuglement, elle hurle "Bravo l’artiste !". Monique McDonald est incandescente, personnage habité, toute de bruit et de fureur. Lorsqu’elle se rend compte de sa méprise et avant de se jeter dans le Tibre, son chant se transforme en cri. L’orchestre, conduit par Marco Balderi, qui sait jouer de son charme pour guider les musiciens, se déchaîne. La composition de Mario d’Alfredo Portilla atteint un même niveau d’émotion et son aria d’adieu à la vie à l’acte 3 transporte et bouleverse.
Tous les artistes sont à citer mais parmi eux, Guy Etienne Giot donne un étonnant relief à Sciarrone, homme de main de Scarpia. Très investi scéniquement et dramatiquement, c’est lui qui annonce la victoire de Napoléon à Marengo. Il sculpte ses phrases grâce à une voix claire et de beaux graves qui contribuent à l’accomplissement du drame. Il reprendra ce rôle pour Angers Nantes Opéra. Marco Di Sapia,jeune baryton au visage viscontien (on le croirait sorti des Damnés), crée une figure de sacristain d’une grande justesse dans ses contradictions, avec une belle énergie . L’opéra de Toulon a offert une brûlante émotion et un beau moment de théâtre.
En attendant Nantes et Angers...
Patrice Caurier et Moshe Leiser offriront leur vision de Tosca à Nantes puis à Angers-> en septembre et octobre prochain. En nous souvenant de leur travail accompli sur le fascinant et claustrophobique Château de Barbe Bleue, on ne peut qu’attendre avec impatience ce que sera cette nouvelle proposition pour un huis clos étouffant, dans lequel l’amour n’est jamais très loin de la mort !
Christophe Gervot
Tosca sera représenté à Nantes à l’opéra Graslin les 23,25,28,30 septembre et le 2 octobre 2008 et à Angers au Quai les 10 et 12 octobre, avec Nicola Beller Carbone dans le rôle de Tosca. Plus d’infos.
Tosca à Nice : photo supérieure et 5 / Photos : opéra de Nice
Nicola Beller Carbone : Tosca
Brandon Jovanovich : Mario
Franck Ferrari : Scarpia
Tosca à Toulon : photos de côtés sauf 5 / Photos : Frédéric Stephan
Monique McDonald : Tosca
Alfredo Portilla : Mario
Sergey Murzaev : Scarpia
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