Publié le 21 mars 2005

Marion Mélaye


L’absurde Séance du Katorza a mis àl’honneur l’adaptation cinématographique du roman métaphysique et autobiographique "El Mar" de Blai Bonet (poète, journaliste et auteur dramatique).

Pour l’anecdote, si je vous demande le lien potentiel entre « Mylène Farmer » et ce Festival du cinéma espagnol ? Vous sêchez ! Et bien, la réponse se trouve en la personne du célèbre et très fascinant réalisateur-acteur et scénariste catalan : Augustí Villaronga (ou Agusti) ! Il est le réalisateur du tout dernier clip « Fuck Them All » de Mylène Farmer (mars 2005), qui a travaillé pour l’occasion avec Martial Leiter, artiste peintre et dessinateur.

El Mar : le film

Bon retournons à nos moutons ou plutôt à nos possédés, au sens dostoïevskien, avec les protagonistes de cette tragédie qu’est « El Mar »... Ce film noir de 1999, est un come-back en 1936, vers la Guerre Civile. Andreu Ramallo, Manuel Tur et Francisca, sont trois jeunes enfants. Ils assistent au meurtre d’un autre enfant par un de leurs amis, qui veut venger la mort de son père. Cette cruauté enfantine les poursuit plus de 10 ans après. Devenus alors adultes, le sort les réunit à nouveau dans un sanatorium majorquin. Francisca est devenue religieuse, Ramallo est un jeune homme beau et rebelle, au comportement violent. Quant à Tur, il se réfugie dans la prière et les remords perpétuels ; mais ses prières ne peuvent ni le guérir de la tuberculose, ni retenir son désir pour Ramallo... (avec Bruno Bergonzini, Roger Casamajor, Antonia Torrens, Angela Molina, Simón Andreu, Juli Mira).

D’ailleurs, pourquoi ce titre : « El Mar » ? Alors que la mer y est absente ! Mer des sentiments, de la tourmente de la Guerre Civile, de ses tortures et de l’horreur qui peuvent hanter les bas-fonds de l’âme humaine ? Ou bien simplement, de par le fait que le film soit tourné à Majorque ou Mallorca ? Cette évocation des Baléares qui n’est pas sans rappeler le lieu d’enfance du réalisateur.

Le réalisateur

En parallèle, cette même année, il jouera Fosc aux côtés de Lauren Bacall dans « El Celo » (ou « Presence of mind »). En quelques films, Agusti s’est distingué comme étant un cinéaste d’exception avec ses atmosphères gorgées d’ambiguïté voire de surnaturel. Avec « Tras el cristal » ou « In a glass Cage » (1985, Grand Prix du Festival de Barcelone), il conte l’histoire dérangeante d’un ancien nazi pédophile pris en charge par une de ses anciennes victimes.

Dans « El niño de la Luna » (1989, sélection officielle du Festival de Cannes ; Prix Goya du Meilleur scénario), un jeune orphelin se retrouve enfermé dans une mystérieuse institution pour enfants télépathes et « 99.9 » (1998) est un thriller surnaturel. Agusti Villaronga a également réalisé pour la télévision « Le passager clandestin » (1995), l’un des téléfilms de la collection « Simenon des Tropiques » (ARTE).De fait, il connaît bien les planchers des festivals et ses films défient la critique bien pensante.

Des visions noires, sanglantes et déviantes, en somme des tourments mis en abîme par un travail recherché du cadrage le plus juste et de l’expression du desespoir.

Marion MÉLAYE