
A vomir de rire
Ultra Vomit transfigure le gras
Nouvel album "Objectif Thunes" et sur scène à Nantes le 10 nov.08
Dans la fosse à pogo, on se tord les boyaux ! Ultra Vomit, un des meilleurs plus-mauvais-groupe-du-monde, dilue son pastiche dans cinq doses de rock bourrin qui tache. Fils spirituels de Gronibard et de François Corbier, fruit de l’union contre nature entre Gojira et Carlos, ils rappellent, à l’instar de leurs aînés les VRP que pour être drôles, il faut surtout être doués.
Pour le profane non aguerri à l’art impie du Métal, il n’y a bien souvent qu’un pas homophonique de métal à mortel. Ultra Vomit (prononcez Vomite), groupe auto-défini heavy métal parodique, n’a rien de ça. Ultra Vomit, c’est du Rabelais musical réactualisé sauce 20ème siècle... Du Rabelais pour les tripes et le trip, de la potacherie, et de la dérision.
La bande à Vomito
Articulé autour d’un showman imitateur vocal et d’un fondu de la double-pédale, U.V. adopte la géométrie variable. Aux manettes, donc, un clône d’Angus Young, auto-proclamé le Roi Fetus. Son acolyte, le batteur Stickskiller, s’est fait un pseudo d’un jeu de mot étonnament subtil au regard de sa dégaine de hardos de foire. A la seconde guitare, un pur produit de l’hémocore teenage, immature au deuxième degré, un skate-board dans chaque narine. Comme tout bon groupe, U.V. fait une forte consommation de bassistes, le dernier connu était un chimpanzé décérébré aux mains glabres et adroites, qui gravissait les graves dans une conscience aiguë de la scène.
Leur démarche, c'est du gore sublimé. En un sens, Ultra Vomit, transcende le gras
Bon pour l’hôpital Saint-Jacques [1] alors ces quatre là ? Pas tant que ça. Parce que si leur show est ultra drôle, c’est qu’il est avant tout ultra travaillé. Sous leur scalp, se cache assurément, au delà du plaisir, une grande maîtrise musicale, qui va aussi avec la bouteille aussi -entendons l’habitude de la pratique scénique et instrumentale. Les chevelus blêmes des Hell Fest 2008 et Fury Fest 2005 qui se sont pris une bosse dose d’U.V. se rejoignent à propos de la maîtrise technique du quatuor.
Du grindcore au pastiche gore
Huit ans après leur rencontre, en 2000, autour d’un kébab, les voilà rendu à leur deuxième album avec Objectif : thunes qui vient s’ajouter à M. Patate et cinq autres galettes de démos. "En achetant un disque d’Ultra Vomit, vous augmentez vos chances de revoir un jour le groupe en concert." La video promo, d’un mauvais goût très sûr, explique pourquoi.
U.V. comme Ultra Vomit et aussi comme Ultra Violent. A leurs débuts, sur Kebabized at birth, ils jouaient dans le registre grindcore, appliqué aux tendres et fleuries paroles de belles chansons populaires. Citons pour exemple la reprise hardcore du salace Tirelipimpon devenu l’excellent Mechanical Chihuahua.
Aujourd’hui, Ultra Vomit est monté d’un cran, et ne s’attaque plus à Grand-mère-confiture et à Tonton-mayonnaise, mais joue dans la cour de Motorhead -avec un poireau en guise de médiator- dragouille Joe Coker dans une version death métal de You Can Leave Your Hat On ; et s’attaque aux plus grands tels Michel Delpech ou les oubliés de Kyo-dans un pastiche nettement moins cul-cul, mais nettement plus cru... La relève des Rolling Bidochons [2] est désormais assurée.
Sous leur scalp, se cache, au delà du plaisir, une grande maîtrise technique
A voir sur scène
Mais une galette d’Ultra Vomit ne sera jamais du même tenant que leur gerbe scénique. En version concert, c’est le festival de la poilade, parsemé de morceaux de deux minutes maximum et d’un chapelet d’incongruités.
Dans le désordre : interlude de blagues de camionneur ("C’est l’histoire d’un pingouin qui respirait par l’anus. Un jour il s’est assis...et là, il est mort !". "Le slip du type qui a cinq sexes lui va comme un gant !" ) ; hommage au Cap’tain Igloo ; concours d’imitation de Chubaka (génération Star Wars) ; et enfin un hymne monstrueux : une métamorphose de I like te move it, move it de Reel 2 Real en I like to vomit, vomit !.
Pied de nez à la prise de tête
Ils se disent parodiques, on répondrait plutôt pasticheurs, c’est- à-dire capable de rendre hommage avec talent. Ils ne détruisent pas une chanson, ils la recréent en mode obscène, fendard, au gré des sous-genre de la veine métal. Leur démarche, c’est du gore sublimé. Par leur savoir-faire, Ultra Vomit, transcende le gras !
Alors pourquoi ce décalage, pourquoi l’art du pastiche burlesque, le grotesque affirmé lorsque l’on a ce talent ? Est-ce l’envie d’un coup de poireau-médiator donné à ceux qui s’y croient ? Est-ce aussi une certaine pudeur à ne pas vouloir faire du noble ? On s’en fout un peu. Peut-être faut-il mieux préférer se fondre simplement dans cet instant de trip et de délectable absurdité ; parce qu’il y a bien de l’absurde là dessous. Finalement, dans ce goût gras de la vie, de la fête et du rire , c’est la puissance du rire salvateur que l’on retrouve.
Rabelaisien, on vous dit !
Gabriel Tamalet et Renaud Certin / Photos : Régis Hémon
Prochain concert : Maison de Quartier de Doulon, Nantes, 10 nov. 08.
[1] Hôpital Saint-Jacques : unité psychiatrique du CHU de Nantes. 85 rue Saint Jacques.
[2] Les Rolling Bidochons est un groupe français capable de transformer n’importe quel tube du rock en chanson de corps-de-garde.
Bloc-Notes
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