
Électro multimédia
Son + image = Gong Gong
Interview avec Gong Gong, Nantes, 22 avril 2008
Gong Gong c’est un duo de musique électronique… faux. Ce n’est pas qu’un duo, et ce n’est pas que de la musique non plus. Gong Gong est un quartet, voire un sextet. C’est de la musique, des images, de la vidéo, des installations, des lumières et beaucoup, beaucoup de câbles… Fragil les a rencontrés.
Thomas Baudriller et Jean-Christophe Baudouin se sont connus à Poitiers, il y a une quinzaine d’années ; ils ont depuis toujours fait de la musique, passant par des styles très différents. Il y a sept ou huit ans, on les voyait se balader avec des chariots de supermarché d’où ils faisaient sortir de la techno à plein volume. “À l’époque, on ne disait pas électro.” Le but était de faire danser les gens, et ça marchait très bien.
Entre hauts et bas, les choses ont évolué et leur deuxième album, Mary’s Spring, est sorti le 14 avril chez F Communication. On y trouve toutes sortes de sampler, machines et boîtes à rythmes, auxquels Thomas ajoute des sons de basse, de contrebasse électrique et de guitares, pendant que Jean-Christophe donne des coups de batterie et de “yeeepa… hou-koukoukoukoukou” [1]. Musique fondamentalement instrumentale, le chant n’y apparait que furtivement. Ce n’est toutefois pas un choix. Les Gong Gong “[rêvent] de trouver une voix avec qui [ils pourraient] collaborer”. Mais, dit Jean-Christophe, “c’est délicat, dans l’électro, c’est vite cliché, les voix”. Les deux bricoleurs aimant surfer entre cérébral, expérimental, électro, world et post-rock ont produit un onze titres issu d’un an et demi d’enregistrements maison. Les sonorités Gong Gong sautent à nos oreilles, inimitables ; chaque morceau est autonome, et se déploie sans se soucier de la cohésion de l’ensemble.
Mais alors Gong Gong est un duo ?
Création live
C’est en 2005 que les deux Gong Gong, peu après la sortie de leur premier album Laughing With The Moon, font l’heureuse rencontre de Laurent Rouvray et Pierre Le Gall. C’est le coup de foudre : ils partent immédiatement répéter cinq jours à la campagne… et une semaine plus tard : premier live. Mais quels sont les rôles des nouveaux arrivés ? Pierre s’occupe plutôt des images et de l’informatique alors que Laurent s’occupe de l’“installographie”. Ils ont eu carte blanche pour monter une création visuelle qui est maintenant partie intégrante des concerts de Gong Gong.
On travaille chacun de notre coté d'abord, et ensuite on se retrouve, et là chacun se mêle un peu du domaine de l'autre.
Avec le temps les domaines de Laurent et Pierre tendent à se fondre et la création évolue, s’enrichit et gagne plus de place sur scène. Pierre prépare des boucles à partir d’images de la télé, du cinéma, d’Internet, il les retravaille et les adapte. Il les diffuse les boucles lors des live en y ajoutant des effets à l’aide de son ordinateur, lui-même branché à deux vidéoprojecteurs qui dardent leurs rayons lumineux contre une quinzaine de petits miroirs. Ces miroirs, en fait des rétroviseurs assemblés sur une structure métallique, permettent de fragmenter, orienter et renvoyer les images sur scène, vers toutes sortes de surfaces qui s’improvisent, pour l’occasion, écrans. “On travaille chacun de notre coté d’abord, et ensuite on se retrouve, et là chacun se mêle un peu du domaine de l’autre ; c’est un peu comme dans la musique, où il y a quelqu’un qui s’occupe plus des mélodies et l’autre des rythmiques. Finalement, ils se retrouvent à un moment et ils font un morceau ensemble.”
L’équipe au complet et le collectif Nøvø
On avait dit sextet. Oui, avec Didier Bedat et Manon Ouvrard, on arrive à six. Didier fait la sono et intervient lors des live en ajoutant des filtres et des effets. Manon, nouvelle arrivée dans la famille, s’occupe de la lumière. “On avait vraiment envie d’avoir quelqu’un qui travaille la lumière avec nous… Il y a des écrans partout, qui se déplacent. La personne qui est à la lumière doit connaitre la création sinon ça ne marche pas.” Les six s’entendent parfaitement, et cela se reflète sur le plan artistique.
On connaissait un photographe, on connaissait un graphiste, il y avait des vidéastes, on connaissait quelqu'un qui faisait des sites internet, quelqu'un qui travaillait dans la culture et on s'est dit pourquoi pas ? On sera plus forts pour développer le projet Gong Gong.
Si on parle du Collectif Nøvø la famille s’agrandit encore. “On connaissait un photographe, on connaissait un graphiste, il y avait des vidéastes, on connaissait quelqu’un qui faisait des sites internet, quelqu’un qui travaillait dans la culture et on s’est dit pourquoi pas ? On sera plus forts pour développer le projet Gong Gong.” Le collectif a été créé autour du premier album autoproduit. Aujourd’hui, il perdure, et tous ses membres souhaiteraient continuer à faire évoluer le projet Gong Gong, par exemple en faisant intervenir le graphiste et le photographe lors des live. Mais pour cela ils auraient besoin de plus de temps ; pour l’instant, la grande famille est déjà bien assez prise par le débout de leur tournée, qui compte des dates un peu partout en France, mais aussi en Europe, en Asie et en Afrique du Nord.
Gong Gong sur scène
Fragil les a vus en concert le 18 avril dernier, au Barouf de Cholet. Premier live en France avec nouveaux morceaux et création visuelle. Des structures de toile créent des voûtes croisées sur les deux musiciens. Dès les premières notes, Laurent et Pierre sont actifs sur scène, et y placent, déplacent, accrochent et décrochent leurs écrans atypiques. Les images sont projetées sur des assemblages de “mogettes”, structures en toile blanche dont la forme rappelle celle des haricots blancs de Vendée. Parfois, les déambulations de Laurent et de Pierre mettent les musiciens à l’épreuve ; butant parfois sur une des machines, ils font sans le vouloir avancer ou rétrocéder l’une des boucles de Thomas ; les deux musiciens doivent alors réagir très vite. À un moment, ces derniers lancent leurs morceaux les plus dansants ; les deux autres surenchérissent en brandissant une dizaine de boules de papier ajourées. Tourbillonnantes, elles renvoient la multitude d’images projetées, et donnent à l’ensemble une touche disco-psychédélique bienvenue.
Energie, création, expérimentation. La musique fait corps avec les images. Les Gong Gong seront sur scène à Nantes lors du festival Scopitone, en septembre 2008, mais si vous ne pouvez pas attendre jusque là, allez les voir à la Flèche d’Or de Paris le 15 mai ou, pourquoi pas, à la Fête de la musique de Bangkok le 21 juin.
Amelia Cavarzan
Photos : Amelia Cavarzan et Jean-Philippe Fournier
Liens :
Pour écouter d’autres morceaux, c’est ici.
[1] Voir la fin du morceau Birds in Books.
Bloc-Notes
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