Récitals
Au coeur de pénétrants secrets : les récitals du théâtre Graslin
Depuis l’automne 2005, Angers Nantes Opéra enrichit sa programmation d’une série de trois récitals répartis sur l’ensemble de chaque saison. Ces concerts permettent un autre regard et une autre écoute sur le rapport fascinant entre musique et texte.
Les programmes de mélodie française présentés en 2007 à l’opéra de Nantes-Angers ont livré à un public, malheureusement trop peu nombreux mais enthousiaste et ému, d’explorer les mystérieuses correspondances entre les textes d’Apollinaire, de Baudelaire, de Théophile Gautier et les partitions de Henri Duparc, de Francis Poulenc et de Maurice Ravel. Ceux qui sont passés à côté du récital envoûtant du magnifique Stéphane Degout, qui se produit sur les plus grandes scènes, en mars 2007, ont manqué un rare moment de bonheur musical.
Le récital permet des instants de grande intimité : l’artiste élabore un programme qu’il présente seul, avec un pianiste et, le temps d’une mélodie ou d’un Lied, il nous fait entrer dans un univers et nous raconte une histoire. C’est dans ce resserrement du temps musical et dans l’urgence du récit que naît la magie de l’instant. L’interprète est là, dans le dépouillement d’une scène d’opéra sans décor et, d’un regard, d’un signe de tête à peine perceptible, il montre à son pianiste qu’il est prêt, que l’air peut commencer. Le spectateur est témoin de cette émouvante complicité.
D'un regard, d'un signe de tête à peine perceptible, il montre à son pianiste qu'il est prêt, que l'air peut commencer.
Le retour de Jenufa
Le concert du 12 février était un événement. La soprano Olga Guryakova, lumineuse Jenufa dans l’opéra de Janacek la saison dernière, est revenue au théâtre Graslin pour interpréter des Lieder de Robert Schumann, des mélodies de Anton Dvorak et de grands airs d’opéras qu’elle chante de la Scala de Milan au Metropolitan Opera de New York en passant par les opéras de Vienne et de Paris. Accompagnée par la pianiste Anna Rakhman, elle a offert, dans une éclatante tenue viscontienne, un récital d’une fulgurante beauté.
Des chants d’amour et de mort
Le programme permettait de mettre en regard des univers contrastés. En première partie, le cycle de Lieder de Schumann "L’amour et la vie d’une femme" donne au sentiment amoureux les contours de vibrants secrets, parfois sur le ton du murmure tandis que les airs d’opéra projettent de gros plans sur des extraits, incroyablement habités. Ainsi, les deux airs de Tchaïkovsky extraits de "La dame de pique" et de "Eugène Onéguine", inspirés de poèmes de Pouchkine juxtaposent l’expression désespérée de l’attente de l’être aimé de Lisa, au seuil du suicide et les premiers émois du coeur de Tatiana dans une fervente lettre de déclaration. Le sommet de la soirée a été atteint avec le poignant extrait d’"Otello" de Verdi. Desdemone est accusée d’adultère. Sans comprendre ce qui lui arrive, elle attend son mari jaloux. Pour tromper l’angoisse,elle chante le vieil air du saule avant d’entrer en prière dans un bouleversant Ave Maria, aux accents tragiques. En rappel, Olga Guryakova a chanté le très poétique air de Rusalka de Dvorak, où une nymphe confie à la lune son amour impossible. Ces fragments émouvants sont autant de raisons d’assister à une représentation d’opéra. Le récital en est un fascinant prolongement. Il ne faut pas manquer celui de la mezzo-soprano Stéphanie D’Oustrac, le 29 avril prochain, consacré aux fureurs de Médée.
Christophe Gervot
Photographie : Vincent Jacques. Olga Guryakova dans "Jenufa" de Janaceck. Mise en scène : Patrice Caurier et Moshe Leiser. Angers Nantes Opéra. Mars 2007.
Bloc-Notes
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