Hip-Opsession 3 : Nantes 2007.
Casus Belli : Le Rap, une histoire de coeur
Son nom s’abrège en CB, comme...CASUS BELLI -’acte de guerre’- deux mots aussi trompeurs que ‘Massive Attack’. Entre conviction et réflexion, le lyonnais parle comme il écrit. Fragil lui a demandé de tester le mic !
Fragil : Peux-tu te présenter en quelques mots et expliquer ton nom de scène ?
Casus Belli : Casus Belli de Lyon, j’appartiens à un label indépendant Cbstyle, fondé en 2002. L’autonomie de notre démarche est fondamentale pour nous, bien au-delà de notre réussite. Casus Belli vient du latin et signifie acte de guerre, la version officielle de ce nom est que je cherchais dans un dictionnaire un mot porteur de sens, qui puisse véhiculer un message, celui d’avoir des mots pour arme.
"Pourtant j’suis peace dans la vie / c’est affolant ! "
F : J’ai vu tes influences sur ton site, Tupac, Dc.Dre, Wu Tang, Ideal J, essentiellement du rap old school, as-tu une forme de nostalgie quant aux années 90 ?
CB : Tupac, Dc. Dre etc sont les artistes qui m’ont fait entrer dans le rap, ils ont été des révélateurs pour moi, ce sont mes propres fondations. J’y suis attaché par affection, quand j’ai besoin de respirer je les réécoute, ils me ressourcent.
F : Le rap actuel, je parle de celui qui est étouffé par le commercial et qu’a dénoncé assez virulemment Casey par exemple, ce rap dit underground ne te permet-il pas de te ressourcer également ?
CB : Je suis un artiste bizarre, je n’écoute jamais de musique. Donc je ne connais que très peu le rap français.
"Le rap vient du cur...c'est de la joie et des larmes à la fois : c'est authentique !"
F : Vraiment ? Pourtant on dit souvent que pour créer il faut connaître les créateurs ?
CB : Oui, mais tu vois plus jeune j’écoutais énormément de musiques différentes, la musique traditionnelle arménienne en rapport avec mes origines par exemple, ou de la variété française. Dans ma musique actuellement je m’en inspire, le rap U.S aussi me stimule.
F : Le public Lyonnais est réputé pour son exigence et comme étant très froid. As-tu eu du mal à te faire accepter et reconnaître ?
CB : Non, bizarrement, on a été adoptés dès le début. Nous n’avons pas connu de difficultés, ils nous ont soutenus dès nos premières scènes.
F : Et que penses-tu de ces artistes qui percent dans leurs régions et restent totalement inconnus dans les autres métropoles telles Paris ou Marseille ?
CB : C’est une affaire d’oseille, pour passer sur skyrock c’est 20.000 euros, tout ça c’est du business ; nous, on fait de la musique pour le plaisir, on n’en vit pas et ce n’est pas un problème. A côté on a un travail, si un jour on peut en vivre tant mieux mais si ça n’arrive jamais, on ne va pas se prendre la tête. J’ai besoin de faire de la musique pour moi-même, pas pour bouffer le soir.
"Rester authentique voilà ce qui nous mène."
F : Je peux te poser une question peut-être un peu provoc’, mais répandue dans les milieux un peu extérieurs au hip hop ?
CB : Pas de problème, vas-y.
F : Penses-tu qu’il faille être nécessairement issu de banlieue pour faire du rap ?
CB : Non, bien sur que non, regarde Kamini, c’est du rap de village, mais c’est du rap et ce qu’il dit est bien. Dans un de mes textes je dis « reste le même quoi qu’il se passe », le truc c’est de rapper avec authenticité, quelles que soient tes origines. Maintenant c’est sûr, être de banlieue permet d’être plus crédible auprès du public, puis les souffrances des banlieues sont différentes de celles des milieux aisés ou de campagne. Mais tu vois, nous on est là, c’est une aventure et surtout une histoire d’amitié qui dure depuis 15 ans, on est ensemble, on rap pour soi c’est tout. Rester authentique voilà ce qui nous mène.
F : Il y a 10 ans il y avait une barrière entre l’east et l’west aux Etats-Unis, maintenant ceci tend à s’effacer, mais penses-tu qu’en France il y ait une différence de style entre Lyon, Paris ou Marseille ?
CB : Non, je ne crois pas, il n’y a pas un style de rap mais plusieurs différents et c’est ça qui fait sa richesse, à Lyon c’est diversifié, chacun à son propre style. Mais malgré tout, si je devais me situer par rapport à cette opposition, je serai du côté east.
"Le rap c’est une histoire de cœur."
F : En un mot le rap, tu le définirais comment ?
CB : Le rap c’est l’émotion. Tu vois une fille comme Casey me touche, ça doit toucher, il faut des paroles sensées qui émeuvent. Le rap vient du cœur, c’est l’essentiel. Après quand j’écris, c’est selon mon état d’esprit. Le rap c’est de la joie et des larmes à la fois, c’est authentique.
F : Un rêve pour l’avenir ?
CB : Me voir à 50 ans sur ma terrasse, avec mes potes actuels et toute une bande de marmots qui courent. Le plus important pour moi c’est de fonder une famille, je me suis marié à 24 ans et j’ai trouvé la bonne personne pour être heureux.
F : Un bonheur simple donc, loin du star-system. Quelque chose d’autre à ajouter ?
CB : Rester soi même et ne pas oublier qu’on est rien sans les autres, tous individuellement nous ne valons que peu de choses. S’unir fait la force, avec les autres on arrive à quelque chose, c’est tout. Et ne jamais oublier que le rap c’est une histoire de cœur.
F : Merci Casus.
Interview et Photo : Alizée QUELIER
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