4.50, le triomphe des Pilleurs d’épaves
Les secrets d’un spectacle sans paroles
Qu’on adore ou qu’on n’accroche pas vraiment, on ne peut nier la qualité de 4.50, la dernière création des Pilleurs d’épaves. L’impressionnante habileté technique des comédiens, la profonde poésie du spectacle, cet humour si particulier qui conquiert jeunes et moins jeunes, tout est réuni pour que « 4.50  » reste dans les mémoires. Les spectateurs, du reste, ne s’y sont pas trompés : à chaque représentation, les Pilleurs font salle (ou chapiteau) comble... Rencontre avec Momette, co-fondatrice des Pilleurs d’épaves et unique rôle féminin du spectacle.
Ambiance décontractée pour une interview au grand air : loin des salles de spectacle, loin même des chapiteaux, c’est chez elle, en pleine campagne nantaise, que nous reçoit Momette. Humble malgré le succès, souriante, elle s’est volontiers prêtée à nos questions. Evoquant tour à tour la genèse de 4.50, les relations avec le public et les raisons du succès, elle a ainsi dessiné le portrait d’une troupe qui place les rencontres humaines, aussi bien entre les artistes qu’avec le public, au centre de ses préoccupations. Mais nous en avons déjà trop dit - laissons à présent la parole à Momette...
La troupe : des parcours très divers, le goût de l’aventure
« Depuis mai 2005 on s’est mis à plancher sur le nouveau spectacle, qui s’appelle 4.50, avec une nouvelle équipe ; maintenant on est quatre sur scène : Arnaud Guillaussou (qui est sur scène avec nous et qui s’occupe de toute la régie lumière - son et des accessoires), moi, et on a fait appel à deux autres personnes : David Humeau (qui joue le grand), qui vient plus du milieu du théâtre, et André Tapia, que j’ai rencontré à l’école de cirque il y a quelques années. (...) Il a un parcours un peu plus circassien ; il a beaucoup travaillé sur ce qui est corporel, la danse, le mime, et moi j’ai un parcours plus clown, manipulation d’objets. A chaque fois ce qui nous intéresse tous, c’est d’arriver à mélanger un peu tous les bagages qu’on a, qui sont quand même très différents et assez ouverts sur pas mal de choses ; en général, on travaille sans metteur en scène, on ne part de rien - on ne part pas d’un texte, et donc l’intérêt est avant tout dans la rencontre humaine avec les gens qui vont travailler sur les mêmes projets. Sur 4.50 , c’était d’autant plus intéressant que David vient du théâtre à texte, et qu’André et moi on a plus bossé sur des choses sans paroles ; André, lui, a tout son parcours de danseur (...), moi j’ai mon passif de clown. L’intérêt était de se rencontrer, de trouver un langage commun et de voir ce que ça peut donner de travailler ensemble. Chacun avait son petit challenge d’aller à la découverte de nouvelles choses. »
Une scène de 4.50 m...
« C’est l’une des contraintes de base qu’on s’est posées assez vite, tous ensemble : un petit espace scénique avec la contrainte de ne pas pouvoir en sortir et de voir ce qui se passe quand on est quatre dans un espace de 4.50m de diamètre. Dans tous les spectacles qu’on a faits, il y a toujours ce travail sur les rapports humains. On a imaginé ce décor, qui a beaucoup évolué depuis le moment où on en a eu l’idée ; il y avait cette histoire de lampe mobile, un peu vivante, un peu lampe-marionnette. On a commencé à travailler un peu dans tous les sens, sans se donner trop de contraintes - on avait plein d’idées, ça partait dans tous les sens ! On a travaillé beaucoup en improvisation ; on avait envie d’arriver à un résultat qui ne soit pas trop didactique pour le public, trop narratif, on avait envie de pouvoir donner des clefs aux gens, mais pas trop non plus, pour que chacun puisse se faire un film différent, une interprétation différente : il y a des moments poétiques, des moments très visuels, sonores - la bande son participe beaucoup. »
Une histoire sans paroles
il y a d'autres façon de s'exprimer et de transmettre des choses, des sentiments, des sensations aux gens qui ne passent pas forcément par la parole
« Il y a un intérêt à chercher comment tu peux t’exprimer autrement que par la parole. Si on avait choisi de partir sur un texte, de parler en français, ça veut dire que tu cibles déjà un public qui va parler ta langue, ça veut dire que tu cibles une façon de t’exprimer qui est le langage, qui est facile parce que tout le monde parle et peut comprendre des mots ; mais après il y a d’autres façon de s’exprimer et de transmettre des choses, des sentiments, des sensations aux gens qui ne passent pas forcément par la parole. »
De la salle au chapiteau
« Ce qui est intéressant dans le chapiteau, c’est la promiscuité avec le public, et comme c’est un des thèmes du spectacle, c’est pas mal de voir ce que ça donne quand tu as des gens tout près : ils ont une autre façon d’entrer dans le spectacle, la promiscuité fait qu’ils peuvent vivre les choses de façon plus humaine, parce qu’ils nous voient de très près. Et nous on les sent aussi de très près, leur réaction va aussi nous guider, nous donner un peu la température. En salle c’est intéressant aussi, parce que comme tu es plus loin, les gens ont plus de recul, ils ont peut- être une vision d’ensemble plus large. Nous on va sentir le public plus loin, donc ça va nous aider par rapport à notre histoire de bulle, parce que pendant le spectacle on ne tient pas vraiment compte du public, on est dans notre histoire ; donc si le public est plus loin, c’est peut-être plus évident de rester dans notre univers... Les deux versions sont intéressantes, il y a du bon à prendre dans chacune des deux, aussi bien pour le public que pour nous. »
Les raisons du succès
« On essaie d’être le plus ouverts possible, de toucher un public très large ; j’aime quand le public est très mélangé, parce que les enfants peuvent lire quelque chose de très différent des grands : ils ne vont pas tout comprendre, mais comme c’est un spectacle très visuel, sonore, je pense qu’ils y trouvent leur compte. Les adulte, eux, vont avoir une autre lecture. Les langages qu’on utilise sont très simples : c’est de l’humour, de la poésie ; s’il y a des messages, c’est toujours très simple, on n’a pas envie de revendiquer quoi que ce soit - même s’il y a un fond, si on dit des choses, on laisse les gens le prendre comme ils veulent, on n’essaie pas d’imposer une façon de voir les choses. »
Propos recueillis par Gaël Montandon
Pour plus d’infos sur les Pilleurs d’épaves : www.madamesuzie.com
Pour ne pas manquer les Pilleurs sur la route des vacances, voici leurs prochaines dates :
Mardi 30 mai à Ifs ; jeudi 8 juin à Quimper ; vendredi 23 juin à Guérande ; du 20 au 23 juillet à Châlon/Saône ; du 16 au 19 août à Aurillac.
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