La cuisine d’Elvis : théâtre et vidéo pour 1 h 30 de plaisir
Sexe, ketchup et vidéo
Déployant aussi aisément profondeur des sentiments qu’humour de mauvais goà »t, faisant rimer détresse humaine avec ketchup et problèmes sexuels avec hamburger, la cuisine d’Elvis, de Lee Hall, est de ces Å“uvres inclassables, offrant autant d’attraits que d’écueils à celui qui veut la monter. Marilyn Leray (comédienne et metteure en scène) et Marc Tsypkine (vidéaste) ont cependant relevé ce défi et le résultat, pour notre plus grand plaisir, est un moment de spectacle jubilatoire. Entrons sans plus attendre dans la cuisine d’Elvis...
Mam et sa fille Jill entretiennent des relations tumultueuses. Jill, en pleine adolescence, se trouve laide et tente de se consoler en passant son temps à manger. C’est que son « Dad » a eu un grave accident quelques années plus tôt, et qu’il est à présent en fauteuil roulant, tétraplégique, plus ou moins inconscient du monde qui l’entoure. Mais Mam, à 38 ans, se sent pleine de vie, et le prouve en ramenant un beau jour Stuart à la maison, un jeune apollon écervellé mais terriblement viril. Jill, elle, ne l’entend pas de cette oreille... A cela il faut ajouter une bonne dose de bouffe, de sexe et...d’Elvis !
Mam, à 38 ans, se sent pleine de vie, et le prouve en ramenant un beau jour Stuart à la maison, un jeune apollon écervellé mais terriblement viril.
Et c’est d’abord, en effet, le rire qui a conduit les auteurs du projet vers la pièce : « J’ai découvert cette pièce il y a 3 ans et demi », confie Marilyn Leray, « elle m’a fait rire (...). J’ai aimé son côté comique et mauvais goût . C’est comme un vaudeville moderne ; c’est l’histoire de l’amant dans le placard, en plus moderne ». Face à ce texte qui parle autant d’incommunicabilité que de hamburgers, qui se plaît à cacher les larmes derrière le rire, Marilyn Leray et Marc Tsypkine ont fait le choix de ne pas « tomber dans le pathétique ». Sans absolument rejeter les moments tragiques de la pièce, ils ont donc privilégié les aspects purement comiques.
Le King
C’est là qu’intervient Elvis, l’unique, le King. Ou, pour être précis, Elvis-Dad, puisque c’est le personnage de Dad (interprété par Patrice Boutin) qui, bien que tétraplégique, se lève soudain et, en habits d’Elvis, lance une chanson... La musique desdites chansons est d’ailleurs exécutée en direct par François Ripoche, qui a créé des compositions originales à partir du répertoire d’Elvis.
Quant au déguisement, très réussi, rien ne manque : le perfecto en cuir, les santiags, les lunettes à soleil...jusqu’au gestes « Elvis » ( mouvements des bras, le jeu des mains et des lunettes, ...) ! Mais Elvis, c’est aussi la bouffe ( coca, hamburgers et « deux douzaines de croissants »), la drogue. Pour aborder et illustrer cela (en tout cas les hamburgers, symbole elvisien par excellence), ce sont les compétences de Marc Tsypkine, vidéaste, qui ont été mises à profit.
Des avantages de la vidéo
L’une des particularités de cette version de La cuisine d’Elvis, c’est en effet l’utilisation de la vidéo. « On peut se permettre des choses en vidéo qu’on ne peut pas se permettre sur scène ; les scènes de sexe passent mieux », assurent M. Leray et M. Tsypkine. Et il faut bien avouer que les scènes de sexe auraient été difficilement montrables sans le recours à la vidéo : les jeux de montage et de position de la caméra permettent de faire comprendre les choses au spectateur sans tomber dans la vulgarité.
La vidéo, cependant, ne se contente pas de voler au secours des moments de jeu théâtral lorsque les scènes deviennent trop périlleuses : elle participe au spectacle, au même titre que la représentation théâtrale ; elle est d’autant mieux acceptée par les spectateurs qu’elle permet de rythmer le spectacle par l’alternance théâtre/vidéo. En outre, elle rend plus riche le contenu visuel de l’oeuvre : le spectateur est confronté à deux formes de spectacle, et comme le rappelle Marc Tsypkine, « les gens ont un rapport différent avec la vidéo et le théâtre ».
Le mot de la fin revient bien entendu à Elvis (par le double truchement de Lee Hall et de Patrice Boutin !!) : « Ce n’est une époque facile pour personne, et ce n’est pas une époque facile pour un King. »
Gaël Montandon
La cuisine d’Elvis a été jouée au Lieu Unique du 13 au 21 janvier ; mais si vous avez eu la malchance de la manquer au Lieu Unique, rien n’est perdu ! Elle sera au Studio Théâtre (02 40 29 07 61) du 7 au 18 février.
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