Festival So Film Summer Camp à Nantes (1/2)
C comme Cinéma...
Du 8 au 12 juillet avait lieu à Nantes le So Film Summer Camp, festival organisé par le mensuel cinéma du groupe So Press et les Editions Capricci. Pas de thème précis pour cette première édition mais une programmation éclectique et un brin décalée. Les festivaliers ont donc pu naviguer entre plusieurs cartes blanches, des séances en plein air à la cale des sous-marins, six avant-premières, quatre séances axées football et les traditionnels cocktails et rencontres. Le tout entre Stereolux, cœur des hostilités, et les trois cinémas partenaires : le Gaumont, le Katorza et le Concorde. Petit tour d’horizon des séances auxquelles nous avons assisté. C comme Cinéma, mais aussi choc, catastrophe, chef d’œuvre, coup de cœur, chaleur...
LE CHOC
Le soleil cogne ce jeudi en début d’après-midi le long du quai de la fosse. Pas vraiment un temps à s’enfermer dans un cinéma. Et pourtant. Comment passer à côté du chef-d’œuvre d’Elem Klimov ? Requiem pour un massacre suit le parcours initiatique d’un jeune biélorusse embrigadé par les partisans pour combattre l’occupant nazi en 1943. De l’innocence à l’horreur en caméra embarquée avec une mise en scène impeccable et un travail sur le son d’une intensité rarement égalée. Jamais la guerre, a fortiori la plus totale de l’histoire, n’a été filmée avec autant de justesse et de réalisme. Et puis cette affiche… Les quelques regards hagards croisés à l’issue de la séance confirment l’idée selon laquelle on sort difficilement indemne de ces 2H30 aux accents d’Oradour-sur-Glane.
LA CATASTROPHE
Le navet, entièrement assumé, du festival : United Passions - La Légende du Football. Le film qui a réussit l’exploit d’attirer une seule personne en salle dans la ville de Phoenix, une ville de plus d’1,5 millions d’habitants au compteur tout de même. Un véritable concours de clichés plus ou moins au service de la FIFA, qui concurrence l’Union Cycliste Internationale ou le Comité International Olympique en tant qu’institution sportive la plus corrompue. Gérard Depardieu en Jules Rimet n’est pas crédible pour un sou en jouant le bureaucrate façon 36 quai des Orfèvres. Tim Roth s’en sort un peu mieux dans le rôle de Sepp Blatter malgré les 25 ans qui séparent les deux hommes. Ce casting prometteur est complété par Sam Neill, le flic sadique dans l’excellente série Peaky Blinders Après la séance suivie par une vingtaine de curieux, quatre représentants de la rédaction de So Foot sont revenus sur leur enquête auprès du président de la FIFA. Puis venait l’heure du quizz pour gagner quelques goodies. Mention spéciale pour le « Qui a dit ça ? Blatter ou Balkany ? ».
LA CONFIRMATION
Mange tes morts est le deuxième opus que consacre le réalisateur Jean-Charles Hue aux gens du voyage après La BM du seigneur. Là où le premier volet avait un côté quasi documentaire sur la vie quotidienne d’une communauté Yéniche, Mange tes morts donne dans le polar nerveux, cependant tiré d’une expérience vécue par le réalisateur. Tout juste sorti de 15 ans de placard pour meurtre, l’imposant Fred fait un retour en fanfare dans le camp où il a grandit, sans être très bien accueilli par les anciens rangés des affaires. Il embarque alors ses deux frères et un cousin pour une virée nocturne à bord de son « Alpina ». Le film avait séduit la critique lors de sa présentation à la quinzaine des réalisateurs de Cannes en 2014.
Le petit événement de cette projection était la présence de Jean-Marc Rouillan, l’ex membre d’Action Directe ayant passé 25 ans de sa vie en prison pour les meurtres de René Audran et Georges Besse.
Le petit événement de cette projection était la présence de Jean-Marc Rouillan, l’ex membre d’Action Directe ayant passé 25 ans de sa vie en prison pour les meurtres de René Audran et Georges Besse. La soixantaine affûtée, le militant d’extrême gauche est brièvement intervenu pour prendre la défense de ces « résistants » pour qui il jouait les « écrivains » en prison. Les Yéniches sont en effet considérés comme le lumpenprolétariat de toutes les communautés des voyageurs.
La discussion de certains spectateurs avec un Jean-Charles Hue bavard s’est poursuivie devant le Katorza. Des échanges sur les gens du voyages plus intéressants que les embrouilles entre les Lopez qui ont récemment enflammé le net. C comme considération !
LE COUP DE GÉNIE
21h15 ce samedi soir dans les travées du Katorza. Frédéric Taddeï, costume gris et chemise ouverte, présente sa comédie préférée. Le présentateur de Ce soir ou jamais annonce la couleur d’entrée : « Il y a la Bible et il y a The invention of lying ». On ne peut en effet que saluer après coup le génie scénaristique de Ricky Gervais qui réalise et tient le premier rôle de cette comédie passée un peu inaperçue en France à sa sortie en 2009. Cela s’explique en grande partie par la traduction de son titre en... Mythoman. Pas très engageant.
Frédéric Taddéi, costume gris et chemise ouverte, présente sa comédie préférée. Le présentateur de Ce soir ou jamais annonce la couleur d’entrée : «Il y a la Bible et il y a The invention of lying».
Gervais réussit l’exploit de dérouler brillamment et sur plusieurs thèmes un pitch très simple : la première date d’un homme et d’une femme au restaurant sans avoir la possibilité de mentir. Mademoiselle étant jouée par une habituée des nanards, Jennifer Garner, alias « les oreilles décollées les plus sexy d’Hollywood » selon Taddéi. On rit énormément tout en prenant conscience du caractère indispensable du mensonge. Celui-ci s’avère être un puissant facteur de régulation sociale. Brillant.
LE COUP DE COEUR
Plongée dans la vie des supporters du Standard de Liège en Belgique au travers de plusieurs portraits d’hommes et de femmes qui ont dédié une partie de leur vie à leur club de cœur. Du collectionneur qui réserve une pièce de la maison pour les objets étiquetés Standard à la femme qui lave sa tenue de supportrice après chaque défaite en passant par le minutieux découpeur de tous les articles de presse traitant du derby wallon contre Charleroi.
On apprécie les longs gros plans sur ces visages rouges et blancs qui ont la fierté et la fidélité chevillées au corps. A l’image de leur combat contre la direction du club qui souhaite transformer le stade et ses alentours en parc d’attraction. Un film salutaire à l’heure des excès liés au primat financier dans le football moderne. La discussion qui suivait la projection était animée par deux membres des associations Tatane et A la nantaise qui ont respectivement rappelé l’importance des valeurs humaines et défendu l’actionnariat populaire aux seins des clubs de supporters.
LA CHALEUR
Dasn Wake in fright, un jeune instituteur de passage dans une petite bourgade du bush australien est contraint de prolonger son séjour après avoir perdu ses économies dans un jeu de hasard. Ted Kotcheff, réalisateur du premier Rambo, livre une œuvre inclassable au rythme haletant et à la testostérone débordante.
Le film donnait presque l'impression de suer, boires des bières, se battre et chasser le kangourou aux côtés des protagonistes à l'écran.
Projeté en plein air à la cale des sous-marins, le film donnait presque l’impression de suer, boires des bières, se battre et chasser le kangourou aux côtés des protagonistes à l’écran. Pour ceux qui hésiteraient à y jeter un oeil, Wake in fright a « laissé sans voix » Martin Scorsese himself.
LA CONCLUSION
On a aimé :
Les parties de baby-foot à Stereolux avec un ancien champion de France barbu intraitable.
L’entarteur Noël Gaudin esquivant les courants d’air de la terrasse du Nid.
Le petit kit du festivalier très complet. Avec le Bob s’il vous plaît.
La proximité avec les invités du festival et notamment Éric Cantona, patient et ouvert face au public comme toujours. Et dieu sait pourtant que les Nantais ne gardent pas forcément un bon souvenir du King
Le confort des sièges du concorde, idéal pour les grandes jambes ou les dos récalcitrants. Dangereux pour les amateurs de siestes en même temps.
On a moins aimé :
Le beau temps, Wimbledon, le travail et tout ce qui a empêché de compter au moins 30 personnes sur certaines séances.
La programmation qui s’est parfois chevauchée, obligeant par exemple les amateurs de ballon rond à choisir entre Cantona et un documentaire prometteur sur l’arbitrage lors du dernier jour.
Les « artistes » qui monopolisaient les toilettes handicapées du Nid à plusieurs. C comme cocaïne.
Jacques Le Pévédic
La semaine prochaine, deuxième volet du Festival So Film Summer Camp à Nantes avec une passe d’arme Canto vs Taddeï sur la notion de mérite.
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