Dans l’intimité du groupe hip-hop/rock nantais
HHH : quatre jours à bord du Vito de l’amour
Fragil a embarqué avec le groupe de hip-hop/rock nantais HHH pour une tournée de quatre jours. On vous raconte (presque) tout !
15h. Je m’apprête à rejoindre les membres du groupe HHH pour quatre jours de tournée. Tout le monde est un peu en retard. Je découvre les membres au fur et à mesure qu’ils arrivent. Flo et Nathan, les premiers sur place, donnent le ton. « Ce week-end va être biiig ! » Un peu timide au début, je me suis rapidement sentie à ma place au sein du groupe. On check le matos, tant pis s’il en manque, et on décolle à bord du véhicule du groupe, le bien nommé « Vito de l’amour ».
La genèse
Fragil avait découvert HHH en première partie d’un concert de Pigeon John à Stéréolux en octobre dernier. Le hip-hop festif du groupe nous avait donné envie d’en savoir plus, de creuser plus en profondeur, notamment sur la signification de « HHH ». Trois lettres pour Hap Hip Hop.
Le groupe se compose à l’origine de Nathan (guitariste, pianiste et beatmaker), Basil (DJ et beatmaker) et de Jean-Ga (MC). Lorsque le MC quitte le groupe en février 2014, cela coïncide avec la rencontre de Nathan et Flo (au micro aussi chez les Various Brotherz) pendant le festival nantais Hip Opsession. Ils se rencontrent une première fois, puis une deuxième, et enfin une troisième fois, toujours par hasard. Une rencontre humaine avant tout. Le groupe a trouvé sa forme actuelle en septembre 2014, avec l’arrivée de Vincz aux percussions.
HHH est prudent sur les mélanges et ne s'adonne pas à des morceaux fourre-tout
HHH, c’est un hip-hop très rock, bercé par de nombreuses influences allant de la musique classique au jazz. Les inspirations du groupe sont très diverses à l’image de la pluralité des goûts de ses membres. La musique en est d’autant plus riche. Chaque titre a son style. HHH est prudent sur les mélanges et ne s’adonne pas à des morceaux fourre-tout. Tout est réfléchi. Les mots se baladent entre les notes de musique et les rythmes percussifs, pour le plaisir de nos oreilles.
La Rochelle solidaire
18h. Nous débarquons du Vito de l’amour et posons les pieds sur le sol rochelais. L’Aiôn est un bar culturel et solidaire programmant des concerts en tous genres et privilégiant la scène locale. HHH joue dans le cadre de trois jours autour de la culture hip-hop. Thomas, un des gérants du bar, nous confie avoir organisé dans son antre des concerts de musique classique comme des concerts de reggae. Le tout à prix libre, ce qui rend ces soirées accessibles à un large public.
Une grande horloge métallique indique l’entrée du lieu. Un hall tapissé de phrases et de proverbes et enfin un petit escalier en colimaçon nous permettent d’accéder au bar à proprement parler. Livre à prix libre, jeux de société, percussions africaines, guitare acoustique... HHH pénètre ici dans un lieu où tout est accessible aux visiteurs. Une très grande fenêtre sur la droite nous offre une vue sur les bateaux de plaisance du port de La Rochelle. En s’approchant du comptoir, on constate que le bar s’inscrit dans une logique de respect de l’environnement avec des produits locaux, biologiques et faits maison. L’atmosphère que nous offre le lieu est calme et chaleureuse.
Les premières notes de Don’t blame me se font entendre. Les lumières rouges et la proximité des spectateurs avec la scène rendent le tout très intime.
Après une discussion rapide avec l’ingénieur du son, les garçons s’installent sur l’estrade de bois. Ils ont l’habitude, chacun sait ce qu’il a à faire. Basil teste ses platines, casque sur les oreilles. Nathan change les cordes de sa guitare. Flo installe sur son pied, un micro décoré d’un gaffer rouge scintillant : « C’est un micro jamaïcain, il brille ! » Vince fait tinter son chime, cette percussion composée de tubes en métal tenus par une barre. Une heure plus tard, tout le monde est prêt. La salle s’est remplie entre temps ; on est jeudi soir, c’est soirée étudiante.
Le temps d’une partie de 10 000, ce jeu de dés dans lequel seul le hasard est susceptible de nous faire gagner, il est 22h. Le concert peut commencer. Un graffeur rochelais est à l’entrée du bar et propose du body painting aux spectateurs. Flo se fera tatouer HHH dans le cou. Les premières notes de Don’t blame me se font entendre. Les lumières rouges et la proximité des spectateurs avec la scène rendent le tout très intime. Le concert s’organise en deux sets. Le public ayant pris le temps de se familiariser avec la musique et les membres du groupe en première partie, sera plus chantant et sautillant en deuxième partie de soirée.
Huîtres, rôti et Alternateur
De retour chez Thomas, deux douzaines d'huîtres dans une main et un rôti de bœuf dans l'autre, c'est l'heure du repas
Après le concert, Thomas nous héberge chez lui. La chaleur du logement et les ronronnements du chat nous réconfortent, promesse d’une douce nuit avant la déferlante des prochains jours. Ce sont les ronronnements de Nathan qui nous réveillent le lendemain. Il pleut. En tant que Nantais, on ne se plaint pas mais cela fausse tout de même nos plans de balade portuaire, sablonneuse et photographique. On ne se morfond pourtant pas et partons nous ressourcer en ville. De retour chez Thomas, deux douzaines d’huîtres dans une main et un rôti de bœuf dans l’autre, c’est l’heure du repas.
Une partie de 10 000 et un café plus tard, nous nous engageons sur la route. C’est sur l’air de Denver le Dernier Dinosaure, que nous arrivons à Niort. L’Alternateur nous accueille dans le cadre d’une soirée hip-hop organisée par En Vie Urbaine. Cette association, qui fêtera bientôt ses 10 ans, promeut l’accès et la démocratisation des cultures urbaines et alternatives dans la région de Niort.
A l’Alternateur, on retrouve la même logique que pour l’Aiôn bar. Les concerts sont à prix libre, les produits biologiques et locaux priment sur le reste et des œuvres d’art singulières ornent les murs. Tandis que je pars à la pêche aux informations et aux images, HHH reprend le rituel d’installation de plateau. Eli, le frère de Nathan et ingénieur du son, nous a rejoint et prépare les balances. Ce sont des moments privilégiés, toujours détendus. « J’ai pas mon micro Jamaïcain ! » me lance Flo. Le micro du soir n’est effectivement pas entouré de gaffer rouge pailleté. Un autre groupe passera avant, ils sont de Poitiers et s’appellent les Aiguilleurs. Deux MC’s et un DJ s’affrontent dans une battle.
En aparté, on nous confie que les Niortais sont « très difficiles ». Malgré l’énergie de HHH et les tentatives de Flo d’établir le contact, la sauce ne prend pas. Le public reste froid et statique. Ou alors, tout est question de pudeur. L’atmosphère intimiste ne permettant pas l’anonymat, les spectateurs sont plus enclins à limiter l’expression de leurs émotions.
Heureusement, tout se réchauffe en loge. En fin de soirée, nous sommes rejoints par toute l’équipe d’En Vie Urbaine et de l’Alternateur. On entre un peu dans le cliché du groupe de musique en tournée, mais il faut avouer que les improvisations chant/guitare/beatbox et percussions sont toujours très bien accueillies et propices aux échanges. Cela permet également de se rendre compte que Flo n’est pas seulement bon en jeu de mots dans ses blagues, il l’est également en improvisation. Ses mots sonnent et résonnent, pointés d’humour et de dérision, abordant des thèmes lourds sur un ton léger. Pendant ce temps, Basil s’active à construire des rythmes intéressants. Nathan frappe avec entrain les cordes de sa guitare acoustique. La soirée se déroule entre reggae et chanson française, hip-hop et Domenico del Coco. Paroles sincères et humour noir au programme.
TROP D’LOVE (Saint-Valentin’s night)
Après une courte nuit de sommeil chez notre hôte Anne-Clémence, retour dans le Vito de l’amour, qui porte aujourd’hui très bien son nom, puisque nous sommes le 14 février. Direction Vénérand, un petit village à côté de Sainte. C’est une grande bâtisse en pierre qui se dresse devant nous. Un ogre rouge orne la porte d’entrée, c’est aussi le nom du bar culturel et associatif qui nous reçoit. À son seuil, nous accueillent Blandine, Benoît et Anne, gérants et propriétaires des lieux. Le rouge dominant nous livre un espace chaleureux et réconfortant. De grandes peintures et œuvres d’art de Paolo et Blandine sont dispersées. Paolo a également peint un ensemble de trois toiles affichées à l’extérieur sous un préau. Elles représentent des centaines de petits cubes de toutes les couleurs, se superposant dans un joyeux bazar. L’artiste nous confie avoir mis deux mois à dessiner chaque cube avant de les peindre à l’aquarelle.
On danse, on transpire, et les heures défilent sans crier gare marquant ainsi la fin des quatre jours de tournée
L’Ogre rouge se situe dans une zone rurale assez isolée. En dépit de son aspect très accueillant et des événements organisés, il est compliqué de toucher le public visé. Mais bien que peu nombreux, le public présent se laisse porter par la musique. L’ambiance est très intimiste. Les HHH ont enfilé leurs plus élégantes chemises pour l’occasion. Flo communique avec les spectateurs, qui le lui rendent bien. S’en suit un DJ set de Basil aux platines et MPC, et Vincz aux percussions. Avec le reste de la troupe, on s’installe à l’extérieur, prêts à commencer une nouvelle partie de 10 000 (dont j’ai enfin saisi les règles). Les quelques notes, succinctes mais efficaces, de Who’s bad d’OBF suffiront à nous faire lever de nos chaises pour aller dépenser toute l’énergie qu’il nous reste sur des rythmes de dub et de cumbia-électronique. On danse, on transpire, et les heures défilent sans crier gare marquant ainsi la fin des quatre jours de tournée.
De retour au gîte avec le lever du soleil, il est temps de faire le bilan de la tournée. « C’était biiig les (g)roots ! » Tout s’est déroulé mieux que ne l’aurait espéré les HHH. Des lieux atypiques, de belles rencontres, une énergie débordante sur scène. Le retour à Nantes se fait dans le calme, bercés par Colette Magny et l’application mobile Duel Quiz. La fatigue de ces quatre derniers jours retombe. Heureux, les HHH s’assoupissent des plans plein la tête, rêvant déjà d’une prochaine tournée.
Texte et photos : Alice Grégoire
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