
CONCERT
La mystique de Wovenhand au Lieu Unique
Lundi 30 Septembre, sur la grande scène du Lieu Unique, se produisait Wovenhand, groupe d’alternative country fondé en 2000 par l’ex-chanteur de 16 Horsepower, David Eugene Edwards.
Wovenhand est l’une des figures représentatives du Denver sound, courant musical né au début des années 90, qui puise ses influences dans la musique country, folk, garage rock, mais aussi dans l’americana et le gospel (Jay Munly, DeVotchKa, Tarentella, Auto Club).
Très prolifique, le groupe a produit pas moins de 9 albums en 10 ans. Le dernier, Refractory Obturate, est sorti en avril dernier. Sans perdre une once de ce qui fait son identité, le groupe s’est aventuré avec élégance et maîtrise dans un univers musical encore plus intense, où les sonorités et les rythmes ne sont pas sans rappeler ceux du post-punk et du metal (cf les titres Field of Hedon, Hiss, El-bow). Se rendre à un concert de Wovenhand après la sortie d’un tel album c’est donc se préparer à un grand plongeon auditif dans le cosmos musical tourmenté du groupe, mais aussi à une chevauchée mentale dans le Black Canyon avec le roi David et la princesse Salomé.
Car la musique de Wovenhand plane au-dessus des grandes étendues américaines, les textes de David Eugene Edwards, petit-fils de pasteur nazaréen, sont empreints de références bibliques. Bien loin de chercher à diffuser une quelconque idéologie religieuse, la foi du chanteur lui permet plutôt d’exprimer sa mélancolie et ses questionnements face à une humanité et une religion corrompues et en perte de sens. Sa musique est aussi celle de la recherche d’une connexion spirituelle avec les autres sociétés, notamment celles victimes du colonialisme et des conquêtes religieuses. Dans les structures rythmiques et mélodiques de certains titres, on peut effectivement deviner des influences amérindiennes, nord-africaines ou encore Mongoles.
L’étrange et belle folk music
Mardi 30 septembre 2014, 20 heures. La nuit tombe sur Nantes. Le Lieu Unique est déjà bien animé. Certains sont juste venus boire un verre entre amis, d’autres ont déjà, dans la main ou la poche, leur place pour le concert des américains de Wovenhand. Quelques malchanceux sont aussi là, à la recherche d’une très hypothétique place. Les 500 tickets ont effectivement déjà été vendus.
21h30 L’étrange et belle folk music de Powerdove dissipe ses dernières effluves sonores. Le public est comblé. La chanteuse et ses musiciens quittent la scène. Balances. Une demi-heure passe. Wovenhand entre en scène.
Riffs puissants, basse lourde, batterie martelée, voix saturée
La décharge sonore est impressionnante. Ce concert sera rock. Très rock. Ou ne sera pas
Hiss, avant dernier titre du nouvel album, ouvre le bal. Riffs puissants, basse lourde, batterie martelée, voix saturée. Wovenhand donne le ton. La décharge sonore est impressionnante. Ce concert sera rock. Très rock. Ou ne sera pas. Les titres s’enchainent, tous aussi intenses les uns que les autres. Le charisme du chanteur, tant décrit par le public rencontré avant concert, s’impose comme une évidence. Il ne manque rien, ne serait-ce qu’une petite retombée de décibels, histoire de reposer quelque temps des oreilles en manque de protections auditives. David Eugene Edwards semble l’avoir compris. Il troque son électrique Gretsch contre un banjo et nous offre Corsicana Clip, premier titre de l’album. Mais après quelques mesures, on se rend compte du leurre, car le titre est encore loin d’être totalement apaisé (aucun titre ne l’est vraiment sur cet album). S’ensuit The Refractory. Le rythme se fait plus lent, mais déleste autant de pesanteur, pour s’achever par un beau et poignant couplet (intelligible seulement après réécoute du titre : Do you hear what I hear, way up in the sky, little lamb ? I stand corrected. The refractory may rest, in the shadow dim lit. We remember one bull remains, way up in the sky, little lamb).
Sans laisser au public assez de temps pour applaudir le titre à sa juste valeur, les quatre musiciens enchainent avec Obdurate Obscura. La cadence se ralentit encore. Le titre, orné de célestes larsens, sonne bien plus majestueusement qu’en version studio. Puis, grande surprise, Long Horn, un souvenir de 2012 sorti sur l’album The Laughing Stalk sort ses cornes. Malgré une rythmique et des riffs toujours aussi martiaux, la tension se relâche et le titre sonne presque insouciant et guilleret. Mais bon, ne nous y prenons pas, cela reste du Wovenhand. Sonnant comme une fin de récréation, le groupe nous renvoie vers son univers sombre avec Salome. Puis Good Shephered vient clore le bal. Titre donc l’introduction, en live comme en platine, sonne comme une étrange reprise rock gothique du générique de Friends.
Après pas loin de deux heures de concert, le groupe quitte la scène. Des chants amérindiens s’élèvent. Deux minutes d’applaudissements et David Eugene Edwards réapparait, seul, au banjo, nous interprétant Whistling Girl, une balade épurée et mélancolique parue sur l’album Mosaic en 2006.
Puis les quatre musiciens reviennent et nous interprètent un triomphal Kicking Bird, tiré d’un chant amérindien : The songs begin at nightfall. The wind blows to the north. The wind is blowing stronger. It blows my tail to the north. See the small dogs come running. See the poor dogs come running. See the horsemen come after. See the horsemen come laughing. The songs begin at nightfall. The wind blows to the north. The wind is blowing stronger. It blows my tail to the north.
30 degrés dans la salle du Lieu Unique. Aux arides sonorités se substituent maintenant les voix du public. Sous le choc, sous le charme de la mystique de Wovenhand.
Alice Godeau
Bloc-Notes
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