
EXPOSITION À LA ROCHE SUR YON
Barthélémy Toguo : la force de l’image
L’artiste camerounais Barthélémy Toguo expose à la médiathèque Benjamin Rabier à La Roche sur Yon jusqu’au 31 aoà »t. Il revendique l’héritage de Goya ou Picasso et offre, ici encore, un art politique et engagé.
Il vit entre entre Paris, New York et Bandjoun. Il pratique l’estampe, la sculpture, la photographie, l’aquarelle… Il expose cette année à Saint Etienne, Gravelines, Arles, Paris… Boulimique et intrépide le garçon ? Plutôt avide de tout ! Avide de rencontre, avide de connaissance, avide de culture… Son art transpire de toutes ces richesses culturelles acquises au fil des années et l’exposition yonnaise, bien qu’un peu petite, est symboliquement grande et imprégnée de tout cela.
Les photographies. Elle ne sont qu’au nombre de deux dans cette exposition mais deux des plus emblématiques du travail de l’artiste. Avec un humour souvent cynique, Toguo dénonce dans ses photographies les discriminations, les frontières, le racisme ou les guerres et pratique l’autocritique ironique comme dans sa série Stupid african president. Se mettant en scène, il théâtralise ainsi le grand cirque politique africain. C’est fort, chargé en émotions, percutant et pertinent (photos ci-contre).
Les estampes. Son apprentissage artistique débute par le dessin à l’école des Beaux Arts d’Abidjan, en Côte d’Ivoire, et se poursuit à l’école supérieure d’art de Grenoble puis à la Kunstakademie de Düsseldorf. Tout petit, Barthélémy Toguo griffonne dans ses cahiers les scènes de vie quotidienne qu’il regarde émerveillé, notamment les camions marchandises transportant cacao, café et billes de bois. Dans les estampes présentées ici, l’artiste parle de la sexualité, des plaisirs ou encore des pratiques et des troubles du corps. On y voit des corps inachevés, amputés, aux gestes laissés en suspens « de peur d’en signer la beauté définitive » explique-t-il. Le dessin pour parler de l’intime et du sensuel. La photo quand il s’agit de l’universel. Toguo passe d’une discipline artistique à une autre avec aisance et multiplie les médiums comme rarement les artistes savent le faire.
Les sculptures. Ses sculptures les plus connues sont également exposées ici. À la tronçonneuse, Toguo façonne des billes de bois pour en composer des tampons géants rappelant les cachets apposés sur les passeports, dans les aéroports. Le bois, comme un clin d’oeil à l’enfance et aux racines africaines. Par ces tampons géants en forme de buste, il détourne avec humour les outils administratifs et retrace l’identité complexe des migrants. Paradoxe d’une société qui favorise la libre circulation des biens mais entrave celle des personnes.
Les installations. Tapissées sur les murs de la salle d’exposition, des centaines de pages de journaux. Les articles sont rayés, seules restent les images. L’installation est impressionnante et le message on ne peut plus clair. À l’heure de l’hyper information, finalement que nous reste-t-il en mémoire ? C’est d’ailleurs l’expérience que Toguo lui-même en a fait. Il habite alors Düsseldorf. Ne comprend pas l’allemand. Alors quand il reçoit le journal, ce sont les photographies qu’il se contente de feuilleter. En rayant, chaque mot, il réécrit l’actualité et la photographie prend tout son sens. En s’approchant, on reconnaît des personnalités internationales. Ici, Nicolas et Carla en visite en Égypte… Là, Robbie Williams qui fait un show… Plus loin, l’acteur Michel Bouquet sur scène. Les photos racontent alors une histoire commune… Que l’on soit Français, Allemand, Camerounais… Et la force de l’art de Barthélémy Toguo c’est d’être universel.
Delphine Blanchard
Exposition Signs in the leaves. Visites commentées le 6 juillet et le 31 août à 16h.
Certaines oeuvres ont été acquises par l’artothèque de La Roche/Yon, elles seront donc bientôt empruntables.
Bloc-Notes
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