CONCERT
Danser la « Paul K  » berlinoise à Paris
Son nom est quasi imprononçable pour qui n’est pas teuton, et pourtant son sobriquet ne vous aura pas échappé. Paul Kalkbrenner. Aka Paul K, de ce côté du Rhin. Voilà plus de douze ans qu’il fait danser les Allemands de ses rythmes obsédants. C’est seulement depuis 2008 et la sortie du film Berlin Calling que l’Europe a rejoint la danse. Le rendez-vous était pris le 2 mars dernier au Zénith de Paris. Paul K tint promesse.
En techno, comme en politique européenne, les Allemands nous mènent à la baguette. En politique, la baguette d’Angela est une cravache sur les flans hollandais. La techno allemande est moins violente que sa chancelière, tout aussi frissonnante. Le chef d’orchestre s’appelle Paul Kalkbrenner. Sa baguette, une cigarette. Et les frenchies n’ont plus qu’à ravaler leurs miches de pain. Ce 2 mars 2013, l’« électro-sandwich » se négocie trois euros à la sauvette, devant le Zenith. La veille, le label de la « French Touch » Ed Banger fêtait ses 10 ans sous la Grande Halle de la Villette, à quelques mètres de là. Mais ce soir, Paul Kalkbrenner est de retour pour la troisième année consécutive. La grand-messe.
L’appel de Berlin
Paul Kalkbrenner se consacre à la techno depuis 1994, après une formation de trompettiste. Il s’est fait connaître outre-Rhin sur le label d’Ellen Allien, au côté de Sascha Funke. Ce n’est que depuis 2008 que l’Europe répond à l’appel de Berlin. Berlin Calling, le film de Hannes Stöhr, raconte les nuits d’Ickarus, DJ berlinois dont le sevrage de drogues le conduit en hôpital psychiatrique. La B.O est réalisée par Paul K, avec le concours de son frère, Fritz Kalkbrenner, et de Sascha Funke. Paul joue également le rôle principal. Sans formation d’acteur, sa performance trahit une histoire quasi biographique. Le film obtient le prix du public Arte. La conquête de l’Europe commence pour Paul K. Son single Sky and Sand — sur lequel son frère prête sa voix — s’installe des mois durant au hit-parade en 2009. En 2011, son album Icke Wieder devient disque d’or en Allemagne. Décembre 2012, sortie de son dernier album Guten Tag et début d’une grande tournée européenne. Il fallait donc s’y prendre à l’avance pour obtenir le précieux sésame permettant d’entrer dans l’arène du Zénith.
Sans formation d’acteur, sa performance trahit une histoire quasi biographique
Voyage voyage
Paul K, c’est un monde. Car si la B.O de Berling Calling fait trémousser le jeune premier « hypsterisant », d’autres albums embrigadent aussi les festivaliers invétérés et les habitués des « afters underground ». Pinte de bière à la main, cigarette au bec, Paul K lance le set. Feu vert, smoking is allowed. Des centaines de joints s’allument, un archipel de smartphones photographient le DJ. Des airs de Fabien Barthez, avec son crâne rasé et son éternel maillot de football. Un peu plus rachitique, définitivement plus souriant. Le Zénith devient vite un immense aquarium de fumée percé de rayons laser psychédéliques où s’échangent cachets d’ecsta et autres drogues festives. Le folklore électro en surface. La musique en profondeur. Paul K c’est profond. Ce sont des nappes mystérieuses qui viennent chercher ce que vous avez de singulier au plus profond de vous-même. La nostalgie, l’anxiété, l’émerveillement, l’impatience… Un gimmick bien introduit vous sort de votre torpeur pour partager cette émotion avec votre voisin : un sourire. Lui aussi, ses jambes bougent toutes seules, au même rythme que les vôtres. Son sourire lui crispe les zygomatiques. Ses yeux crient la joie derrière ses lunettes de fluo kid. Et puis soudain, vos mains se lèvent inexorablement. Toutes les mains se lèvent.
Surprises
Paul K a réussi à vous surprendre en calant sa ligne de basses en même temps que les percus
Ah le salaud ! Vous le connaissiez ce morceau pourtant ! Eh bien Paul K a réussi à vous surprendre en calant sa ligne de basses en même temps que les percus, avant même le drop qui vous faisait déjà tant planer. Et vous voilà dans une espèce d’osmose orgasmique avec les 4000 personnes présentes. 4000 paires d’yeux rivées sur le guru qui distille son élixir. S’il a le malheur de reprendre son souffle entre deux morceaux, c’est 4000 paires de pieds qui battent le pavé pour en demander davantage. Et ça marche. Visiblement touché par la ferveur du public parisien, Paul Kalkbrenner revient sur scène à deux reprises. Un nouveau maillot sur les épaules, un nouveau miracle au bout des doigts. Au terme d’un Sky and Sand d’anthologie, il tente de rejoindre sa femme en coulisse. Le public ne décolère pas. Après trois heures de live, on ne se lasse pas de Paul Kalkbrenner. Le voilà qui revient vêtu du maillot des Bleus. Scène de liesse. Et puis Aaron. Jubilation.
Texte et photos : Thomas Savage
Bannière : CC Martin sur Flickr
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