
MONNAIE LOCALE (3/3)
« La monnaie locale ? Pas entendu parler de ça  »
Après un tour d’horizon des initiatives dans le monde, retour à Nantes pour conclure ce dossier sur la monnaie locale. A partir de juin 2013, le succès de la monnaie nantaise - dont le nom sera dévoilé début janvier - dépendra de son utilisation, ou non, par les acteurs économiques. To be or not be ? Enquête.
« Pas entendu parler de ça » répond-on à UFC Que choisir Nantes lorsque interrogé sur la monnaie locale. Etonnement, incompréhension, indifférence : à six mois du lancement de ce qui pourrait être un carburant dynamique de l’économie locale, l’engouement pour cette monnaie locale ne semble guère dépasser les bureaux chargés de la développer et les 306 internautes qui ont participé au concours pour lui donner un nom.
Une monnaie patiente
FONDES Pays de la Loire est une association qui a pour objectif de participer au développement économique social et solidaire sur le territoire de la région des Pays de la Loire. Elle est partenaire des groupes de travail qui se réunissent autour du projet de monnaie locale. « Nous sommes un acteur de référence dans ce projet, » explique Grégoire Delrue, son président, « car le monde de l’économie sociale et solidaire est directement concerné à deux titres. D’une part, il fonctionne en circuit court donc local. D’autre part, il est affecté par une fragilité de trésorerie. » La monnaie locale sera-t-elle efficace pour ce manque de liquidité ? « Réponse de normand : oui au regard des expériences en Europe, mais non si les acteurs ne s’en saisissent pas ».
Il est encore trop tôt pour prophétiser sur le succès ou non de cette monnaie. « C’est un projet qui nécessite le temps de la démocratie, » reprend Grégoire Delrue. « Il s’inscrit dans une logique de différentiation par rapport aux cycles économiques court-termistes. C’est une monnaie patiente, c’est-à-dire qu’elle ne cherche pas de la rentabilité immédiatement. Sa conception doit être en cohérence avec son ambition. » Patience donc.
C’est un projet qui nécessite le temps de la démocratie
« Un habillage, un subterfuge »
Jean-Pierre Lucas président de Pays de la Loire Initiatives (réseau de financement et d’accompagnement des entreprises régionales) attend justement. Il a bien entendu parler de monnaie locale au détour de quelques articles de presse mais il attend que son réseau soit impliqué autrement que par « quelques réunions très techniques ». Pour lui, la monnaie locale « ça n’est pas la préoccupation principale des entreprises aujourd’hui. Au contraire, elles cherchent à se développer commercialement, au delà du territoire. Les entreprises responsables y trouveront peut-être leur intérêt, mais si vous enlevez les associations, les mutuelles, il ne reste plus grand chose dans l’économie sociale et solidaire. » Il n’exclut cependant pas le fait qu’une partie des financements versés aux entreprises du réseau le soit en monnaie locale. Conscient des difficultés de trésorerie, Bruno Cailleteau, secrétaire adjoint de l’Union départementale CGT-FO, rappelle que des mesures pour palier à ce manque font partie des revendications du syndicat. Mais pour lui, « la solution n’est pas là. C’est l’augmentation des salaires qui contribuera à la relance de la croissance. La monnaie locale est un habillage, un subterfuge qui laisse les salariés dans la précarité ».
La greffe n'a pas pris, c'était une démarche trop descendante
Six mois pour convaincre
Dans un entretien accordé à Altermondes, Jean-Yves Praud, vice-président du Conseil Général d’Ille-et-Vilaine chargé de l’Economie sociale et solidaire, rappelle que son département s’est impliqué « dès 2005 dans la mise en place de la première génération de monnaies SOL. Mais la greffe n’a pas pris, c’était une démarche trop descendante ». Fort de cet échec, le projet a été repensé, et une nouvelle phase d’expérimentation verra le jour en janvier 2013 avec la mise en circulation de 40 000 gallécos. L’opération séduction de la monnaie nantaise semble s’adresser principalement aux citoyens. « Il est vrai que le gain immédiatement identifiable est principalement pour les entreprises » nous confiait Pascal Bolo le 14 novembre dernier, mais également que « le jour où ça démarrera, il faudra qu’il y ait suffisamment d’adhérents (ndlr : entreprises) pour amorcer la pompe ». Juin 2013 en ligne de mire.
Thomas Savage
A lire :
Une monnaie nommée Ne-mo ? sur le fonctionnement de la future monnaie locale nantaise
Ma monnaie locale ne connaît pas la crise, tour d’horizon des initiatives dans le monde et par le passé
Crédit images :
Bannière : Without money, CC Toban Black
Colonne : L’Arlésienne de V. Van Gogh photographiée par Sharon Mollerus CC
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