
REPORTAGE
Fashion Kucha Night
Petit rappel du concept des soirées PechaKucha pour celles et ceux qui ne les connaîtraient pas encore. Des créateurs (photographes, dessinateurs, designers, sculpteurs ou autres) se succèdent sur scène avec chacun 20 images défilant toutes les 20 secondes pour présenter leur oeuvre, soit 6’40 minutes chaque représentation. Evitant ainsi au public du bla-bla-bla, du PechaKucha comme disent ces joyeux lurons de nippons qui ont inventé ce concept en 2003 et l’ont exporté depuis. Retour sur cette quatrième édition nantaise qui s’est déroulée cette fois-ci dans le cadre du Lieu Unique.
Le lieu (unique finalement) avait été gardé secret jusqu’au bout. Le public (250 personnes retenues) préinscrit sur le site PechaKucha Nantes pour avoir le privilège d’assister à cette quatrième soirée attendait patiemment de recevoir la missive par mail. Bref, tous les ingrédients d’un événement hype, tendance, ultra select tel un défilé parisien de fashion week pour faire enrager les keupines étaient réunis. Et si t’en doutais encore, pour faire patienter le public dans l’immense salle à l’étage du Lieu Unique, au menu : un Dj nantais et des bagels. Enfin non, plus de bagels, trop de monde, tout comme le bar pris d’assaut, reste de la salade coleslaw. Faite maison. C’est tendance donc forcément, c’est bio. Ou l’inverse.
Séance photos de vacances
A l’invitation de Neige Roux (et donc pas blanche) et de Nathalie Boisson (j’vous jure on a rien bu), les Martinn organisatrices, le public finit par investir la salle du podium où défileront les dix créateurs présentés ci dessous. Avantage, pas de places privilégiées pour les Vip puisque chez PechaKucha, tout le monde est Vip. La soirée débute avec Thomas Langouet, jeune photographe revenu d’Inde, du Laos et du Sri Lanka nous présenter ses jolies diapos noir et blanc. Un regard critique et détaché sur son travail (comme disent les photographes) non dénoué d’humour, de quoi nous rassurer pour commencer. S’en suit Stations Services venu promouvoir les valeurs de l’économie sociale et solidaire au niveau local par le recyclage de matériaux à destination de créateurs où même l’expression « fashion week » est citée. La salle est ravie et nous aussi.
T’as des nouvelles du Géant vert ?
Côté dessinateurs, on s’attendrit devant l’émotion palpable d’Elodie Coudray et son imaginaire de personnages animaliers travaillés avec des collages de papiers. Et on s’est bien fendu la poire avec l’humour noir, cynique et scatologique de Gnot Guedin grâce à qui on sait désormais qu’on a enfin « coupé la bite du Géant vert » (sic) comme le prouve l’un de ses dessins. On s’est bien marré aussi avec Hugh Willa et son accent sculpté au couteau. Le souffleur de verre au physique de cow-boy à la Jesse James arrivé tout droit de Seattle, « la ville de Microsoft » (sic !). On veut pas dire, Hugh, mais y a plus rock’n’roll comme référence à Seattle genre Kurt Cobain ou Jimi Hendrix. Mais l’impressionnante maîtrise de ses sculptures sur verre inspirées de la physique fait qu’on le lui pardonne.
un défilé parisien de fashion week pour faire enrager les keupines
L’arnaque de la pub culinaire
On vous épargne la promo faite autour du lancement du magazine Séquence. Un gratuit de plus consacré au cinéma et distribué dans les salles. Ok les gars mais du multiplex ou de l’indé ? On a notre préférence pour Sylvie Pires da Rocha. Cette photographe culinaire va à contre courant des codes marketés où les aliments qu’on veut nous vendre sont la plupart du temps bidonnés. Et elle balance sur les pubs Sylvie, l’eau remplacée par de la glycérine, le lait par de la colle, la glace par de la fécule de pomme de terre, le chocolat par de la peinture, la fumée d’un café chaud par de l’encens, les aliments ne sont jamais cuits mais teintés, pour peu on relirait 99 francs de Beigbeder. Sylvie Pires da Rocha a la modeste ambition de nous redonner envie par le goût des aliments en les photographiant différemment, cuits, par morceaux ou simplement par la trace laissée dans un plat.
Du côté de chez vous
On termine notre soirée PechaKucha avec les architectes Marie et Grégoire de Tica, ainsi que Barreau & Charbonnet. Séquence Leroy Merlin avec des maisons en bois, des balcons suspendus que les brésiliens nous envient déjà, des chambres en chrysalide pour dormir comme Alien, de l’habitat flottant, des plans en photo qui défilent, y aurait-il des agents immobiliers dans la salle ? On félicitera les jeunes Barreau & Charbonnet de nous avoir offert 3’20 minutes de douceur avec leur lecture d’un extrait du Voyage de Gulliver de Jonathan Swift.
Evor for ever
Vous me direz, défendue comme ça, pas de quoi fouetter un chat cette PechaKucha. Et bien vous avez tort. On vous a gardé notre chouchou pour la fin. L’artiste plasticien Evor à qui des petits farceurs ont tout mélangé son diapo de photos. Remonté qu’il était Evor. Du coup, un débit de paroles à la vitesse de la lumière pour présenter ses sculptures végétales et organiques. Animalité, tribalité, végétalité, top crédibilité. Evor s’en fout de faire du beau ou de l’utile. Ce qui le botte c’est de mélanger des matières de récup’. Parti comme il était il finit par parler de lui-même à la troisième personne. « Sont parfois perchés les artistes. » Si c’est lui qui le dit alors...
Si vous souhaitez participer à la prochaine PechaKucha, n’hésitez pas à scruter régulièrement leur site et leur facebook pour vous y inscrire. Cette soirée fut aussi l’occasion pour Neige Roux et Nathalie Boisson de lancer un appel aux fonds publics et privés pour assurer la pérennité gratuite de ce formidable événement qui permet aux créatifs d’aller à la rencontre de son public. Qu’on se le dise ! Et si vous en voulez encore plus, aller relire sur Fragil l’article de Nadja consacré à la PechaKucha vol.3
Jérôme ROMAIN
photos : Nadja Altpeter
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