Samedi matin, jour de marché, les Caddies envahissent le Carreau des Halles. À proximité d’une laverie automatique, d’un bar d’habitués et d’un sexshop se profile la vitrine du petit espace d’art contemporain, le bien nommé La Gâterie. La petite pluie fine ambiante n’est pas propice pour les passants à s’arrêter/s’offusquer/se questionner devant la vitrine. « Mais les jours de marché, on voit du monde passer et s’arrêter, sans toutefois oser rentrer » confirme Sonia Campos, présidente de l’association Transversale.

À l’origine de La Gâterie, quatre associations – Arthymus, Courbe(s), Nomades et Domino Panda – qui fédèrent leurs énergies et leurs talents et fondent une cinquième association, collective celle-ci, Transversale. « Parce qu’on venait tous d’univers très différents, de la musique, de l’édition, d’Internet… c’est cette transversalité-là qui fait notre force aujourd’hui » selon Sonia.

Un lieu alternatif

En l’espace d’une année, La Gâterie a organisé cinq expositions et cinq événements appelés temps forts dans leur programmation. « Ça peut être une performance visuelle, une projection de court-métrage, un concert… Ce temps fort draine un autre public, ça permet d’ouvrir nos horizons. Notre modèle, c’est la salle du Confort Moderne à Poitiers qui allie très bien tous ces projets culturels. De l’art, de la musique, de la danse… pourvu que ce soit alternatif, underground, atypique » explique Emmanuel Ménard, trésorier de l’association Transversale et président d’Arthymus.

La Gâterie : que des passionnés qui militent pour un art hors des sentiers battus

Martin Roulet, Marion Franzini, Rocky Zéro & The Blind, Julien Perrier… Tous les artistes exposés en 2011 le sont, alternatifs, underground, en expérimentation. « Ce qu’on souhaite, c’est être un lieu de tremplin, entre l’atelier et les futures expositions. Ici, l’artiste vient expérimenter. Il fait de l’in-situ, on le laisse s’approprier l’espace comme il l’entend. Nous ne sommes pas une galerie, l’artiste ne vend pas ses œuvres mais présente son travail » confie Sonia. Ainsi, Martin Roulet, premier artiste exposé à La Gâterie, a pu présenter son travail sur les mots envahissant littéralement l’espace avec ses lettres à taille humaine ; aujourd’hui, il a repris cette idée qu’il a décliné et qu’il présente à La Ferté-Bernard (72). La Gâterie voit les premiers balbutiements d’un artiste, les premiers pas d’un nouveau projet, elle lance puis laisse ses plasticiens voler de leurs propres ailes. Une façon bien à elle de soutenir la création contemporaine ; des initiatives comme on aimerait en voir plus souvent. Que des passionnés, qui veulent faire entendre une voix différente des circuits artistiques classiques et qui militent pour un art hors des sentiers battus. Une gageure dans une ville comme La Roche-sur-Yon, pas toujours réceptive aux nouveautés qu’on lui propose.

« On s’est rendu compte que c’est parfois par leurs enfants que les parents s’ouvrent à l’art. On a mis en place notre premier atelier à destination des enfants cette année. On leur présente l’exposition en cours, là, en l’occurrence celle d’Émilien Adage et on trouve un projet à faire en lien avec l’expo. On souhaite également s’ouvrir à un travail avec les écoles, des séances scolaires pourraient avoir lieu ici mais notre espace est réduit, c’est là la difficulté » confie Emmanuel. Et d’ajouter : « On n’a pas encore réussi à toucher les moins de 25 ans qui sont souvent réceptifs aux circuits alternatifs. ce public-là zappe, papillonne, passe du temps sur le Net, on va essayer de capter leur attention ».

Fait ton tube le 28 avril prochain risque fort de les séduire. La Gâterie s’intéressera au travail de Simon Dronet dont les courts-métrages sur You Tube ont beaucoup fait parler (il collabore notamment à l’émission Métropolis sur Arte). Les films seront projetés sur la façade du bâtiment et, entre deux sessions, le groupe Rock’n’roll Remember jouera. Pour la fête de la musique en juin prochain, Sonia et Emmanuel promettent également une belle soirée à La Gâterie mais c’est encore bien trop tôt pour en parler. De beaux projets à venir et des militants enjoués qui travaillent dur pour que l’art reste pluriel dans un espace de création singulier. Longue vie à La Gâterie !

Delphine Blanchard