Françoise et Jean-Philippe Billarant : une passion, des amitiés, une collection
Centre d’art le Silo à Marines (Val d’Oise)
Il est chef d’entreprise. S’appelle Jean-Philippe Billarant. Est président du conseil d’administration de la société nantaise Aplix et surtout collectionne, avec sa femme Françoise, depuis 35 ans, des œuvres d’art que l’on peut qualifier de conceptuelles, minimales ou encore géométriques.
Trente-cinq années passées à collectionner et enfin l’aboutissement il y a quelques mois avec l’ouverture du Silo, près de Paris, soit 2400 m2 d’espace où l’on peut retrouver des œuvres de Daniel Buren, Dan Flavin, Sol LeWitt, Donald Judd, Carl André, Bertrand Lavier et tant d’autres… Des amis, que des amis, bien avant d’être des artistes collectionnés. « Cette collection, c’est le résultat de longues années d’accompagnement. Quand on choisit un artiste, on veut une relation durable avec lui. On veut qu’une relation de confiance s’établisse et nous sommes fidèles. Le point de départ, ça n’a jamais été de faire une collection pour en faire une mais on s’est dit plutôt, allons à la rencontre des gens de notre temps. Nous étions jaloux des générations passées qui avaient côtoyé les plus grands noms alors plutôt que ressasser cela continuellement, nous avons pris le parti d’aller de l’avant, d’aller à la rencontre de ces artistes en devenir et qui sont devenus, au fil des ans, de véritables amis » explique Jean-Philippe Billarant.
Minimal, conceptuel, concret, géométrique… autant de qualificatifs qui font peur quand on parle d’art. « C’est pour cette raison que le Silo est en visite uniquement sur rendez-vous. Nous voulons accompagner chaque visiteur pour prendre le temps de leur expliquer à la fois notre démarche mais surtout leur donner les clés pour comprendre ces œuvres-là, parfois difficiles d’accès, nous en convenons ». Le couple Billarant lui-même n’a jamais été du sérail, leur culture artistique s’est construite en autodidacte, ils ont appris au cours de ces années passées à côtoyer la fine fleur de la scène contemporaine. C’est certainement pour cela qu’ils ont une approche modeste vis-à-vis de leur parcours et surtout un sens du partage et de l’explication. Bien loin des sphères artistiques élitistes, Françoise et Jean-Philippe Billarant veulent partager leur passion avec le plus grand nombre. « Toutes nos acquisitions étaient dans des containers et, à un moment donné, nous avons voulu être cohérents dans notre démarche. Alors l’idée de l’espace culturel pour présenter notre collection s’est insinuée ». Ils achètent alors un ancien silo à grain en 2007, demandent l’aide de Dominique Perrault (l’architecte de l’usine nantaise Aplix, bâtiment remarquable tout en métal plié), puis font intervenir le jeune architecte Xavier Prédine-Hug. Un écrin parfait, semblable à une construction suprématiste, pour leur riche collection minimaliste. « Malheureusement, ce n’est qu’une infime partie qu’on peut présenter, il en reste encore beaucoup en containers mais nous allons faire tourner les œuvres ».
Et la collection risque de s’agrandir encore et encore puisque les Billarant continuent de sillonner les routes… Centres d’art, Frac, galeries… en France, en Allemagne, au Bénélux mais aussi aux États-Unis. Des voyages au long cours pour dénicher des artistes dont les œuvres interpellent. « Au tout début de notre collection, on s’intéressait aux peintres figuratifs régionaux mais dont on s’est vite rendu compte qu’ils étaient trop lisibles. On aime plutôt les choses qui résistent. Lisez Mallarmé par exemple, vous apprendrez des choses différentes à chaque lecture. C’est exactement pareil pour notre collection ». Et d’ajouter : « Nous sommes les ennemis du coup de cœur. Nous sommes, au contraire, critiques envers ce que nous découvrons. Cela nous interroge donc c’est intéressant bien plus que cela nous plaît donc cela nous intéresse. Puis les artistes que nous découvrons en ce moment, nous n’avons pas leurs références culturelles en terme de musiques électroniques, de littérature contemporaine alors nous sommes obligés de faire l’effort d’appréhender tout cela afin de comprendre le sens de leur démarche et cela, plus que tout, c’est enrichissant pour nous ».
Curieux, les Billarant le sont de nature. En 1980, les spéculations autour du marché de l’art les choquent et les agacent, ils se tournent alors vers la musique. « Le plaisir à entrer dans une galerie n’était plus le même, on nous disait, achetez vite sinon ça va partir d’ici quelques jours, ce n’était pas notre façon de voir les choses. Alors on a commencé à commander des œuvres musicales à de jeunes musiciens pour des instituts comme l’Ircam ou le Centre Pompidou ». Parce que l’œuvre d’un Karlheinz Stockhausen ou d’un Pierre Boulez est aussi minimaliste et conceptuelle qu’un tableau de Claude Rutault ou Robert Barry et que art pictural et art musical tissent une conservation secrète que chacun peut entendre s’il tend un peu l’oreille.
Alors, il ne reste plus qu’une chose à faire : se rendre au Silo, écouter la petite musique de la collection de Françoise et Jean-Phiippe Billarant et surtout se laisser bercer par les histoires de ces deux passionnés entre amitié durable et culture artistique.
Delphine Blanchard
Visite sur rendez-vous : Le Silo - Route de Bréançon - 95640 Marines (environ 50 km de Paris) . Contact : 01 42 25 22 64 ou lesilo@billarant.com
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