
KREA N°1
Julien Celdran : maître du discours
Insaisissable. C’est le premier mot qui vient à l’esprit quand on pense à Julien Celdran et à son œuvre. L’artiste, dont le travail explose dans la rue, sème le doute et cultive le flou. Il peut tout aussi bien organiser un vote de slogan quotidien au sein des locaux d’Arte que décorer un camion de sandwicherie.
Les rites, les signes et les symboles marquent ses compositions artistiques. À Roubaix, des masques étaient disposés sur une table, sans ordre défini, jusqu’au moment où « le masque se donnait à voir quand la personne le mettait et se regardait dans le miroir. »
La création ne prenait sens que par l’intervention du public. Julien Celdran crée en lien continu avec son contexte.
Du contexte naît le concept
Lors de son séjour d’étude à Glasgow, il découvre l’Environment Art Department. Sur place, il expose illégalement de faux panneaux de signalisation, en concurrence avec une « esthétique sous monopole d’État. » L’interaction entre l’artiste, le spectateur et la réalité donne alors toute sa dimension à l’œuvre. Le rendu matériel et visuel ne suffit pas, il faut une connexion avec une situation particulière. En cela, il admet être « davantage un artiste contextuel qu’un artiste conceptuel ».
J’aime bien le doute, semer le doute, embrouiller en expliquant
Ses travaux créent du débat, interrogent le regard. Un questionnement politique sous-tend son œuvre et marque ses dispositifs participatifs. L’organisation de votes pour l’ornement de paraboles et lampadaires dans les rues de Strasbourg permet d’exprimer « le goût des gens. » Il dit vouloir désormais s’en détacher par peur de se répéter ou « que cela tourne à la démocratie genre téléréalité. » Ses conférences, où l’artiste se met plus en avant, poussent aussi à l’implication de chacun. Julien Celdran met à disposition des signes, des données que les gens doivent connecter.
« Fausse science, fausse magie, vraie poésie »
« J’ai trouvé plus d’inspiration dans des bouquins de sociologie ou d’anthropologie que dans des livres d’art ». Passionné par l’ethnographie et les films d’archives du CNRS, l’artiste sonde l’être et son environnement. Pour lui, les rituels ont « une poésie propre » qui le fascine. Julien Celdran confie approfondir ses projets d’auto-anthropologie : « discipline scientifique dont personne ne sait très bien de quoi elle retourne ». Explorant de nouveaux horizons artistiques, il était à Nantes au mois d’octobre pour le tournage d’une leçon inaugurale de ce nouvel art, l’occasion d’expérimenter une « fausse science, fausse magie, vraie poésie ». Véritable metteur en scène d’une réalité détournée, il aime « semer le doute, embrouiller en expliquant ».
Après une semaine de repérage à l’université avec l’équipe INTERIM, Julien Celdran y a vu un ensemble « complètement éclaté ». Strates, lieux, disciplines, cette institution vouée à la transmission échange peu entre ses organes internes. Les pratiques quotidiennes auraient fait disparaître « l’idéal encyclopédique ». De la femme de ménage à l’enseignant chercheur, en passant par les étudiants, l’université serait un objet pluriel où chacun vit une réalité distincte. Parcourue de flux permanents, il s’agit pour l’œil de l’artiste de révéler les fils qui tissent cette machine complexe, de « donner une image de cette diversité en montrant que c’est relié ». Attaché au pouvoir des mots, à l’échange et à l’interaction, il sera le maître de la Cérémonie.
Juliette Hurel et Charlotte Varenne du Master 1 Infocom de l’université de Nantes
Crédits photos : On Time - Équipe INTERIM
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