
KREA n°1
Marie Bouts : récolteuse d’histoires
Dans l’univers de Marie Bouts se croisent la vague d’Hokusaï [1] et la patte persane de Marjane Satrapi, les terres du Far West et les lignes épurées de Matisse. Un mélange hétéroclite qui interpelle et fascine à la fois. Dessinatrice, mais également passionnée de photographie et d’écriture, elle préfère au travail en solo partir à la rencontre des gens, récolter des histoires et les raconter.
Marie Bouts n’a pas d’atelier. Elle considère que « la place de l’artiste est dans le monde. »
Dans une quête sans fin pour le définir, elle rassemble des histoires, au fil de ses rencontres et des lieux qui l’interpellent : dans des maisons de retraite, des foyers d’hébergement, ou parmi des associations de femmes. Ce besoin d’aller vers les autres, Marie Bouts l’a toujours ressenti. Durant ses études, la plasticienne a longtemps oscillé entre la littérature et les arts plastiques. De son penchant pour les lettres, elle a gardé le goût de l’écriture, ainsi qu’un rapport méticuleux à la définition. En se nourrissant des conversations avec ceux qui habitent ici, ceux qui travaillent là, elle cherche à saisir et comprendre ce qui l’entoure. Marie Bouts récolte des bribes de vie et construit son œuvre : une mémoire collective subjective.
Histoires et géographie
L’artiste lilloise a une façon de s’orienter bien à elle. Elle aborde le contexte par des repérages. « À partir de là je cherche un angle d’approche, je soulève des questions avec lesquelles je vais aborder les gens. » Grâce aux anecdotes que lui confient les personnes qu’elle rencontre, elle construit peu à peu une carte des représentations. Les histoires rassemblées, Marie Bouts les reproduit sur place par des lignes, des silhouettes, ou encore des chemins, qui traduisent les perceptions multiples du lieu en question. Des silhouettes en creux occupent la majeure partie de son œuvre : « C’est comme si le contour était un réceptacle, défini par tout ce qui l’entoure. Le secret de l’intimité de chacun, je ne peux l’approcher qu’en suivant le chemin de l’histoire personnelle. »
Le secret de l’intimité de chacun, je ne peux l’approcher qu’en suivant le chemin de l’histoire personnelle
L’atelier à tisser
La plasticienne travaille régulièrement en collaboration avec d’autres artistes vidéastes, musiciens, ou encore danseurs sur des projets ponctuels. Films, écrits, performances scéniques : elle ne cesse de renouveler et diversifier sa pratique. Après trois projets avec INTERIM, elle retrouve pour la quatrième fois toute l’équipe d’artistes au cœur de l’université de Nantes pour le projet Libre circulation.. « Lorsqu’on est venu en repérage, on a vu qu’il y avait beaucoup de liens et de croisements entre les disciplines. En même temps, on sentait un certain cloisonnement, comme s’il y avait des dons bien délimités pour chacun. »
Pour comprendre les liens tissés entre les personnes qui se croisent chaque jour sur le campus, Marie Bouts et Till Roeskens, autre membre de l’équipe INTERIM, mettront en place un système d’échange. Avec Alice Retorré et Julien Celdran, elle participera également au projet de la Voûte septine, fresque qui retracera la Genèse à partir de schémas récoltés dans l’université. Tous les trois dirigeront, avec Séverine Hubard, un atelier de poésie vernaculaire, qui jouera sur la définition des mots. Définir, comprendre et croiser les éléments du monde, Marie Bouts le fait constamment. À la fois enracinée dans ses rencontres et libérée par son imaginaire, elle crée un univers bien à elle : « à travers ce que les autres me livrent, je me livre un peu moi-même. »
Mathilde Colas et Benjamin Rullier du Master 1 Infocom de l’université de Nantes
Crédits photos : On Time - Équipe INTERIM
[1] Katsushika Hokusai (1760-1849), « fou de dessin  », peintre, dessinateur, graveur et auteur, considéré comme le père du manga et qui influença beaucoup d’artistes européens lors du mouvement du japonisme.
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