PORTRAIT
Marcial Di Fonzo Bo : l’inattendu
il met en scène Rosa la Rouge avec Claire Diterzi - au Grand T les 9 et 10 novembre prochain
Multiple, curieux, infatigable, il enchaîne les créations endossant tantôt le rôle d’acteur tantôt celui de metteur en scène. Voguant sans cesse entre théâtre et cinéma depuis vingt ans, il s’impose désormais comme un des acteurs les plus doués de sa génération. Marcial di Fonzo Bo n’a peur de rien quand il s’agit de jouer ou de créer, il nous le prouve à nouveau en s’emparant de la figure de Rosa Luxemburg pour présenter avec Claire Diterzi Rosa La Rouge au Théâtre le Grand T le 09 et 10 novembre 2011.
Il fallait le voir en Podesta déchainé dans Angelo Tyran de Padoue de Victor Hugo. En Richard III possédé au Festival d’Avignon. Ou encore concentré à l’extrême dans les mises en scène de Claude Régy. Qualifié d’insatiable, de boulimique de travail, de révolté, Marcial di Fonzo Bo a incarné mille visages au théâtre comme il incarne un mélange de culture et d’univers créateurs, inspirant les plus grands, se formant auprès des plus exigeants.
Né en 1968, dans un pays muselé par la dictature militaire, il rêve d’évasion et de liberté d’expression dont le théâtre deviendra l’exutoire radical et exemplaire. Il quitte donc cette Argentine corrompue, instable et brutale pour venir en France. Paris lui ouvre ses portes définitivement en 1987.....les lumières s’éteignent, le rideau s’ouvre, que le spectacle commence.
Des débuts formateurs
Le parcours de Marcial di Fonzo Bo est marqué par quelques grandes figures de la mise en scène européenne, qui vont former l’acteur, mais également aiguiser l’œil du futur metteur en scène. Le jeune argentin va se construire une seconde famille ...au théâtre bien sûr. D’abord avec Alfredo Arias qu’il assiste sur plusieurs spectacles. Bien conscient qu’il lui faut une formation plus académique, il entre en 1991 à l’école du Théâtre National de Bretagne (TNB), où il rencontre notamment Claude Régy qui l’engage sur trois spectacles.
Il dira qu’auprès de lui, il « progresse(ra) énormément en tant qu’acteur ». A ces deux pères de théâtre, vient se greffer le sulfureux Mathias Langhoff qui lui offre Richard III à Avignon lui valant le prix de la révélation théâtrale du Syndicat National de la Critique Théâtrale en France. Au total : six spectacles sous sa direction. Di Fonzo bo se forme avec des maîtres qui eux, le transforment au gré de ce qu’ils imaginent pour lui.
Né en 1968, dans un pays muselé par la dictature militaire, il rêve d'évasion et de liberté d'expression dont le théâtre deviendra l'exutoire radical et exemplaire.
Empruntant tous les visages possibles que peut offrir le théâtre, il va, au fil des rôles, s’imposer rapidement comme un des acteurs les plus doués de sa génération, et c’est en 2004, que le Syndicat National de la Critique Théâtrale le consacre meilleur acteur de l’année.
Mais parallèlement à ces expériences d’acteurs, particulièrement formatrices, Marcial di Fonzo Bo veut plus et il fonde sa propre compagnie Les Lucioles en 1994. D’acteur à créateur, la frontière est tentante pour beaucoup bien que périlleuse et âpre pour certains, lui s’y engouffre avec rage et s’y révèle virtuose. De cette compagnie naitra plus d’une dizaine de créations. Loin d’oublier ses origines et son histoire, il va s’attaquer à des auteurs argentins comme Copi ou Rafael Spregelburd. Entre amour d’une patrie lointaine et haine d’un système autoritaire et violent, il s’approprie l’univers féroce de ces dramaturges atypiques comme pour se rapprocher de cette Argentine détestée et adorée en même temps. Copi le fascine, il ira jusqu’à lui consacrer une création entière intitulée « Copi, un portrait » (1999). Il explore son univers décalé où s’ensuivent Eva Peron (2001 et 2006), La Tour de la Défense (2005), Loretta Strong et Le Frigo (2006). Autre auteur phare de sa soif créatrice Rafael Spregelburd, qu’il fait littéralement découvrir. Il mélange ces deux cultures comme il mélange les genres, de Sophocle à Copi en passant par Minyana, Marcial di Fonzo Bo a « le désir de décloisonner un métier où les clivages se multiplient, entre privé et public, théâtre et cinéma ».
Rosa la Rouge au destin noir
De retour d’Avignon où il a joué l’Entêtement, il présente Rosa la Rougecette fois ci au Théâtre le Grand T de Nantes le 09 et 10 novembre 2011 avec Claire Diterzi. A femme rebelle, femme sensuelle qui, la guitare au bras, chante Rosa. Si particulière, Claire Diterzi donne à voir la fureur d’une vie avec passion. Elle a largement participé au projet puisqu’elle a co écrit le spectacle avec Marcial di Fonzo Bo qui lui, la met en scène.
Rosa Luxemburg. Figure emblématique de la Révolution spartakiste. Rosa Luxemburg, femme multiple : révoltée et pacifiste, amoureuse et libre, engagée et militante. Elle qui consacra sa vie à la politique, à la préparation de cette révolution qui devait être l’écho de sa cousine russe. Elle qui appartenait « plus aux mésanges qu’aux camarades », se retrouva cernée par une bande de vautours en chemises brunes, une nuit de janvier 1919 qui, la face décomposée par les insultes, les yeux rougis par la haine, lui assenèrent un coup de crosse dans la tête pour finalement jeter son corps lourd dans le Landwehrkanal. Ceux dont elle prédisait qu’ils étaient « l’anéantissement de la civilisation » réussirent à assassiner la femme mais pas à tuer le mythe. Rosa Luxemburg était toute petite mais quelle grandeur d’âme ! Il faut que le monde se souvienne d’elle, pour sa pensée, son action, son engagement. Si elle fut pour une révolution, elle n’en était pas moins contre le système de terreur qu’avait mis en place Lénine, tête d’affiche d’une sinistre saga dont les acteurs allaient un à un se faire disparaître au fil du temps. Une femme qui défia le monde d’hommes qui l’entourait, une femme qui avait combattu pour tous contre l’injustice et qui finit seule face à la barbarie. Un cri contre l’intolérance, les injustices, un monde meilleur et plus juste. Une idéaliste, une passionnée.
La rage au cœur, le poing levé, c’est cette femme là que chante Claire Diterzi et que met en scène Marcial Di Fonzo Bo. A voir.
Julie Laval
Bloc-Notes
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