Festival Univerciné Italien 2011
Les Italiens ne sont pas morts !
Rencontre avec la réalisatrice Paola Randi
Dans le cadre du festival Univerciné Italien, le film Into Paradiso était projeté samedi 19 février au Katorza à Nantes. Ce long-métrage, réalisé par Paola Randi, relate la rencontre imprévisible entre un Italien prénommé Alfonso et un immigré sri-lankais appelé Gayan, dans la ville de Naples, avec pour toile de fond une mafia bien loin de celle de Gomorra. Dans cette comédie dramatique, Paola Randi nous prouve qu’en matière d’amitié rien n’est impossible et que deux individus, que tout oppose, peuvent créer un lien fort et indissoluble. Into Paradiso est un film traitant de l’immigration avec ironie.
La réalisatrice est convaincue que l'ironie est un moyen efficace de traiter des questions importantes
Les Italiens doivent retrouver confiance en leurs valeurs qui sont le multiculturalisme, l'accueil et la tolérance
Gayan (Saman Anthony), un ancien champion de cricket sri-lankais fauché, arrive à Naples dans le but de trouver le Paradis. Il s’intègre dans la communauté sri-lankaise de la ville par le biais de son cousin. Allant de désillusions en désillusions, il souhaite retourner dans son pays. Alfonso D’Onofrio (Gianfelice Imperato), lui, est un biologiste spécialisé dans les cellules qui est depuis peu au chômage. Il décide de rappeler un ami d’enfance, le politicien Vincenzo Cacace, dan le but d’obtenir une lettre de recommandation. Ce dernier va lui confier une mission : livrer une arme à feu à des mafiasos. Mais la livraison échoue et Alfonso se retrouve obligé de se cacher dans l’appartement de Gayan, avec pour otage le politicien véreux. C’est là que commence une cohabitation insolite et cocasse, mais pour le moins attendrissante.
Montrer la crise d’identité
Pour Paola Randi, l’idée de faire ce film est venue en regardant des enfants jouant au football dans les rues de Naples, alors qu’à côté des petits Sri-lankais jouaient au cricket. En Italie, ce sport est méconnu. Son idée était de montrer la crise d’identité d’un individu lorsqu’il se retrouve immergé dans une autre culture que la sienne. Ce sentiment est d’abord ressenti par Gayan, qui se retrouve déraciné mais trouve du réconfort dans la communauté sri-lankaise de Naples. Il y venait pour trouver le Paradis, il se retrouve face à des problèmes de précarité et de racisme. Alfonso, lui, est contraint de se cacher dans l’habitation de Gayan. Par ce biais, Paola Randi explique qu’elle a voulu « renverser le point de vue sur l’immigration ». C’est Alfonso qui, à son tour, connait une crise d’identité en devenant un étranger dans sa propre ville. Mais peu à peu celui-ci s’acculture, allant jusqu’à tomber amoureux d’une jeune Sri-lankaise. La crise d’identité d’Alfonso se dissipe au fur et à mesure que les deux Sri-lankais s’ouvrent à lui. La réalisatrice dit avoir choisi cette communauté comme toile de fond car c’est une collectivité organisée, qui se situe à l’opposé de la culture italienne et est très présente à Naples. « Cette confrontation de cultures est propice à l’humour ». La réalisatrice est convaincue que l’ironie est un moyen efficace de traiter des questions importantes. Le Ministère Italien des Biens et Activités Culturels (MIBAC) a d’ailleurs reconnu Into Paradiso « d’intérêt culturel national ».
Un besoin d’espoir
Diplômée en droit et fille d’avocat, Paola Randi s’était au départ spécialisée dans le droit social. Ayant opéré un virage à 90° en devenant réalisatrice, elle a pourtant su garder son intérêt pour les problèmes de société. Pour elle, « le cinéma comprend tout les arts et comporte un grand intérêt social ». A travers son film, elle espère relancer un certain espoir chez les Italiens. Pour elle, « l’Italie a beaucoup de richesses, mais elle l’a oublié ». C’est en cela que réside tout l’intérêt de son film : « les Italiens doivent retrouver confiance en leurs valeurs qui sont le multiculturalisme, l’accueil et la tolérance ». Dans le film, alors qu’ils sont en danger de mort, Alfonso et Gayan franchissent les obstacles ensemble. L’entraide prime. « Même s’ils ne sont pas très malins, ni rusés, ils réussissent à battre la mafia ». D’ailleurs, en ce qui concerne la mafia, la réalisatrice explique que même si celle-ci fait partie de la réalité de Naples, elle a souhaité la tourner en dérision. Ce qui l’intéresse, c’est « d’essayer de comprendre la cohabitation des gens normaux avec la mafia ». La mafia y est donc représentée de façon abstraite et symbolique.
Tout le long du film, le politicien véreux Vicenzo Cacace ne fait que répéter aux deux protagonistes qu’ils sont, de toute façon, tous les trois morts. Avec Into Paradiso, Paola Randi montre bien que les Italiens ne sont pas morts comme le dit ce dernier. P. Randi garde espoir et crie à qui veut l’entendre que « les Italiens sont en train de se réveiller ! ».
Corentin Vital
Portrait de Paola Randi : Marine Resson
Plus d’Infos :
Cet article a été réalisé conjointement par une équipe d’étudiants du Département Infocom de l’Université de Nantes.
Equipe : Laurette Bouysse, Xavier Pennec, Marine Toux, Corentin Vital. Coordination éditoriale et pédagogique : Emilie Le Moal.
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