Souvenir en huis-clos d’une petite jeune fille
Par la Compagnie Meta jupe
Ma petite jeune fille a été créée par la Compagnie nantaise meta jupe, le 11 janvier dernier au Centre Dramatique de Lorient. Née d’une rencontre d’Hervé Guilloteau et de l’écrivain Rémi De Vos, elle traite du non dit, d’une histoire tragique.
L’action se déroule aujourd’hui, au coeur d’une commune d’un millier d’habitants, à l’intérieur d’une salle municipale. Gaëtan a réuni les personnes qui l’ont soutenu lors du décès de sa maman. Il a préparé un repas et apporté quelques disques. Aimé est venu. Un rideau accordéon divise l’espace en deux. Il faut partager l’espace avec l’animateur d’une radio locale. Deux situations cohabitent dans un huis-clos, une composition qui excite la mémoire. Aimé se souvient... de cette petite jeune fille. Le sujet qui fâche. Soupçon de maltraitance, d’abus... les parents de la petite jeune fille handicapée refuse de la faire opérer. Elle a huit ans lorsque les services sociaux la retirent de sa famille. C’était peut-être dans les années 1970, au coeur de cette commune peuplée de tensions et de troubles sociaux. Son récit ennuie, ses questions gênent, la suite est un cauchemar. Une pièce qui dérange par sa vulgarité, sa dimension tragique.
« Cette pièce traite du non-dit », explique Hervé Guilloteau, le metteur en scène. « D’une histoire tragique, survenue dans un milieu où l’on se tait. » Ce milieu dit « défavorisé ». Une histoire vraie. Elle revient dans l’esprit d’Hervé Guilloteau lors de l’enterrement de la mère d’un ami. « Dans le cortège, j’ai remarqué un type portant des vêtements à moi, que j’avais quand j’avais quinze ans. Je suis allé le voir, il n’a jamais pu me répondre, il était devenu muet. » Cet homme, au blouson et à la chemise plus que connue, c’est le frère de la petite jeune fille. Intrigué, Hervé Guilloteau interroge des amis, cherche à comprendre. Tout reste flou dans ce petit village. Des mystères qu’il ne faut pas dévoiler. « Il y a de ces histoires qui deviennent des obsessions. »
« Lorsque j’ai parlé à mon père de Ma petite jeune fille, il m’a dit : ne raconte pas ça. C’est là que j’ai décidé de le faire. » L’idée de la pièce se construit au gré des rencontres. « J’avais décidé de ne plus travailler sur des textes qui existaient. J’avais envie de raconter des histoires à moi et de travailler sur l’idée d’un spectacle total, à partir d’une petite idée en tête puis d’arriver à quelque chose quelques mois plus tard. »
En 2003, il se confie à Rémi De Vos, écrivain du Nord qu’il avait rencontré en 2002 sur le projet Code Bar, au Lieu Unique à Nantes. « J’ai parlé à Rémi de cette opération qu’elle devait subir, des services sociaux, de la violence. Cette petite a sans doute subi les pires choses. Mais simplement, lorsque j’étais enfant, ce n’est absolument pas ce qui m’a touché. Et d’ailleurs tout ça n’était que présomption. Cette rencontre était en fait mon premier accès à la différence. C’est pour cette raison que je n’ai pas voulu aller plus loin dans ce spectacle sur le sujet de la maltraitance. Ce n’est pas du théâtre social... mais plutôt le récit de la fin d’une amitié. » Rémi de Vos, lui, a déjà rédigé des scénarios et des pièces de théâtre. Les idées des deux hommes fusionnent autour de l’histoire de la jeune fille. « Il y a eu des allers-retours entre ses propositions et les miennes, explique Hervé Guilloteau. Au final, Rémi signe les textes, et moi le spectacle ».
L’interprétation dégage une foule de thèmes. Parler des autres, parler de soi, ne pas pouvoir revenir en arrière, ne pas pouvoir traduire les désirs en actes. En filigrane, on comprend vite qu’il y a beaucoup d’ Hervé Guilloteau dans le rôle d’Aimé. Mais le metteur en scène aux yeux noirs n’aime pas « les héros d’une cause » et se garde « bien de juger » les coupables. Il « questionne », essaie de « comprendre pourquoi face à certains problèmes, nous sommes incapables d’y répondre de la bonne manière ».
Coline FERRO.
Bloc-Notes
-
«  Chasse fermée  » remporte le prix du public au palmarès d’Univerciné 2013
-
Hellfest 2013 : Fragil prend refuge dans le nid des enfers
-
La 7ème Vague ouvre le bal des festivals
-
Le sculpteur Yonnais Pierre Augustin Marboeuf expose à Nantes pour la première fois
-
Edito du 12 avril 2013 : du fond des abysses